Explication de la première partie du texte "Le message, c'est le médium" de Marshall McLuhan
Contexte et idée centrale
Marshall McLuhan est connu pour son approche révolutionnaire de la communication, où il affirme que le médium utilisé pour transmettre un message est plus influent que le contenu même du message. Cette idée est au cœur de sa célèbre formule : « Le message, c'est le médium. »
Dans la première partie de cet extrait, McLuhan s'intéresse à la manière dont les technologies modifient nos structures sociales, nos modes de vie, et même notre perception du monde, indépendamment de l’usage spécifique qu’on leur attribue.
Points clés
- La fragmentation dans la culture moderne :
- McLuhan commence par critiquer notre culture occidentale, qui a tendance à analyser et diviser pour mieux comprendre et dominer. Cette démarche nous empêche souvent de voir les effets globaux des technologies sur nos vies.
- Exemple : Nous nous concentrons sur ce que fait une technologie (son "contenu") plutôt que sur son impact systémique sur la société.
- Le médium comme prolongement de l'homme :
- Les médias et technologies sont des extensions de nous-mêmes. Ils modifient nos capacités physiques, mentales ou sociales.
- Le vrai message d’un médium, c’est le changement d’échelle, de rythme, ou de modèle qu’il introduit dans la société. Ce changement affecte nos relations, nos activités, et nos institutions.
- Exemple de l’automation :
- McLuhan compare deux types de technologies :
- La machine mécanique : Elle est fragmentaire, centralisée, et superficielle dans sa manière de façonner les relations humaines (ex. : chaînes de montage).
- L’automation : Elle est englobante, décentralisée, et favorise une participation plus active des individus à leur travail et à la société.
- Cela illustre comment un médium peut restructurer des activités humaines, au-delà de son usage apparent.
- Le "contenu" d'un médium :
- Selon McLuhan, le contenu d’un médium est toujours un autre médium. Par exemple :
- Le contenu de l'écriture est la parole.
- Le contenu de l'imprimé est l'écriture.
- Ce contenu est souvent un leurre : il masque l’impact réel du médium sur nos relations sociales.
- Exemple de la lumière électrique :
- La lumière électrique est une information pure. Elle est neutre en apparence et n’a pas de contenu tant qu’elle n’est pas utilisée pour transmettre un message spécifique (ex. : une publicité ou une marque).
- Cependant, son message réel est le changement qu'elle apporte : l'élimination des contraintes de temps et d’espace, et la transformation des activités humaines qui en découle (neurochirurgie, match de baseball, etc.).
- Impact universel des technologies :
- McLuhan prend l’exemple du chemin de fer et de l’avion :
- Le chemin de fer a transformé les villes, les loisirs et le travail en amplifiant les fonctions humaines existantes, peu importe les marchandises transportées.
- L’avion, avec sa rapidité, tend à dissoudre les structures ferroviaires, redéfinissant ainsi la société.
- Cela montre que l'impact d'une technologie est indépendant de son utilisation spécifique.
- Les usages cachent l’impact réel :
- Le contenu d’un médium tend à masquer son influence profonde. C’est pourquoi nous avons souvent du mal à identifier les transformations qu’il opère.
- Exemple : IBM, à ses débuts, pensait fabriquer des machines de bureau. En réalité, elle transformait la gestion de l’information.
Enseignements principaux
- Un changement de paradigme dans l’analyse des médias :
- McLuhan invite à dépasser une analyse centrée sur le contenu pour s'intéresser à l'impact structurel du médium lui-même.
- L’universalité des effets des technologies :
- Les technologies restructurent les relations humaines, quelle que soit leur utilisation.
- L’importance de la matrice culturelle :
- Chaque médium agit dans un contexte culturel et social spécifique, mais ses effets transcendent les frontières géographiques et les usages particuliers.
Application pédagogique
Pour comprendre pleinement ce texte, il est utile de poser des questions :
- Quelles sont les technologies modernes (smartphones, réseaux sociaux) qui illustrent cette idée ?
- Comment les modes de communication actuels (ex. : messages vocaux, vidéos) changent-ils notre perception du temps, des relations ou de la société ?
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1. La mécanisation et la causalité :
- Critique de l'économie classique : Les auteurs cités (Robert Theobald, W.W. Rostow, John Kenneth Galbraith) montrent que l'économie classique ne peut expliquer le changement et la croissance. La mécanisation est décrite comme fragmentant les processus, ce qui empêche une vision globale.
- L’électricité et l’instantanéité : L’électricité, en éliminant la succession linéaire au profit de l’instantanéité, réintroduit une forme de causalité et de relation entre les éléments. Cette transition illustre un bouleversement majeur dans les paradigmes cognitifs et sociétaux.
2. Le cinéma : de la succession à la structuration :
- Accélération mécanique : Le cinéma est vu comme un médium qui, par son mécanisme séquentiel accéléré, pousse à repenser la relation entre les éléments visuels et narratifs.
- Message du médium : McLuhan affirme que le cinéma a permis de passer d’un modèle linéaire à une configuration spatiale et structurelle. Cela marque une rupture culturelle où les connexions linéaires cèdent leur place à une structuration plus complexe.
- Cubisme et cinéma : Le cubisme est cité comme une révolution artistique parallèle, rejetant la perspective classique pour offrir une vision simultanée et globale des objets, favorisant une conscience instantanée.
3. La culture typographique et ses limites :
- L’héritage de la typographie : McLuhan, à travers Tocqueville, analyse l’impact homogénéisant de la typographie sur les sociétés. En France, cette culture typographique a uniformisé les pensées et préparé le terrain à des changements comme la Révolution française.
- Contraste entre cultures : En Angleterre, les traditions orales et juridiques (Common Law) ont résisté à l’homogénéisation typographique, ce qui a préservé une culture plus fragmentée et imprévisible. En revanche, les États-Unis, avec des institutions plus simples, ont adopté pleinement cette homogénéisation typographique.
- Grammaire de l'imprimé : Tocqueville comprend que chaque médium, comme l’imprimé, impose ses propres postulats et structures mentales. Cette "grammaire" révèle les lignes de force d’une culture.
4. Le médium comme message :
- Le concept central : McLuhan met en avant que "le message, c’est le médium". Cela signifie que l’impact d’un médium ne réside pas dans son contenu, mais dans la manière dont il structure les interactions et la pensée.
- Exemple de la pédagogie : La pédagogie moderne, influencée par l’électricité, adopte des méthodes structurales axées sur les relations globales (théorie des ensembles, par exemple) plutôt que sur des problèmes spécifiques.
- Dangers des médias : Les médias possèdent le pouvoir d’imposer leurs postulats. Il est essentiel de les comprendre pour ne pas être aveuglément influencé par leurs structures implicites.
5. Tocqueville et la perspective historique :
- Observation critique : Tocqueville, grâce à sa distance critique, réussit à analyser l’impact de la typographie sur les sociétés française et américaine. Son analyse montre comment les structures médiatiques façonnent les institutions et les comportements.
- Le paradoxe aristocratique : Bien qu’aristocrate, Tocqueville incarne une figure intellectuelle capable de dépasser les limites culturelles imposées par son époque.
Synthèse des idées principales :
- Transition des médiums : L’électricité et le cinéma ont transformé la perception du temps et de l’espace, en remplaçant la succession linéaire par une vision simultanée et globale.
- Critique des structures médiatiques : Chaque médium (typographie, cinéma, électricité) impose une "grammaire" qui façonne les sociétés.
- Importance de la conscience critique : Comprendre les postulats des médias est indispensable pour éviter leur influence inconsciente.
- Héritage historique et culturel : Tocqueville est utilisé comme exemple d’un observateur critique des transformations médiatiques.
1. La rupture entre cultures orales et visuelles : le cas de A Passage to India
- Analyse de Forster : Le roman illustre l'incompatibilité entre les cultures orales/intuitives orientales et les expériences rationnelles/visuelles occidentales. Adela Quested ne peut appréhender l’Inde car elle est conditionnée par une pensée rationnelle et typographique.
- Question possible : Pourquoi McLuhan utilise-t-il A Passage to India comme exemple ?
- → Pour montrer comment les médias façonnent la perception et la pensée, et comment les technologies visuelles occidentales entrent en conflit avec des sensibilités orales.
2. L'alphabétisation et la détribalisation :
- Effets de l’alphabétisme : L’écriture alphabétique uniformise la pensée en rendant la perception séquentielle et continue. J.C. Carothers décrit comment l'alphabétisation détribalise les sociétés tribales et provoque des traumatismes culturels.
- Impact de l'électricité : L’ère électrique submerge toutes les cultures (tribales ou alphabétisées) dans un flot d’informations auquel elles ne sont pas préparées, entraînant des crises d’identité.
- Question possible : Comment l’électricité affecte-t-elle les cultures tribales et occidentales selon McLuhan ?
- → Les deux subissent un déracinement culturel : les tribaux face à l'écrit, les Occidentaux face aux médias électroniques.
3. Le conflit sensoriel et l'effondrement mental :
- Interaction des médias : L’électricité mélange les perceptions orales et visuelles, provoquant un choc culturel. McLuhan cite Wyndham Lewis (The Childermass), qui dépeint ce bouleversement comme un "massacre des innocents".
- Question possible : Que signifie le "conflit entre l’œil et l’oreille" ?
- → Il s'agit de la lutte entre des modèles de perception écrits (alphabétisation) et oraux (résistance culturelle), amplifiée par les médias électroniques.
4. Les normes culturelles et les médias :
- Critique des normes occidentales : Les sociétés alphabétisées imposent des critères uniformes (tests d’intelligence, comportements standardisés), qui marginalisent les individus "différents".
- Rôles culturels : Dans des sociétés non alphabétisées, les différences physiques ou sociales sont mieux intégrées (ex. nains, infirmes, enfants).
- Question possible : Pourquoi McLuhan critique-t-il les tests d’intelligence ?
- → Parce qu’ils reflètent un biais culturel alphabétique qui élimine d'autres formes d’intelligence, comme celles liées aux perceptions orales ou tactiles.
5. La collision entre technologies :
- Conflit alphabétisation-électricité : La technologie électrique (radio, télévision) s'oppose à la technologie typographique (livres, imprimerie). Les Américains, selon McLuhan, ignorent les impacts de cette collision sur leur société.
- Question possible : En quoi consiste la "collision" entre technologies selon McLuhan ?
- → Elle désigne l'affrontement entre des modes de pensée visuels séquentiels (imprimerie) et globaux/intuitifs (médias électroniques).
6. L'illusion du "contenu" :
- Critique des analyses superficielles : McLuhan rejette l’idée que le contenu des médias soit leur principal effet. Le médium lui-même modifie les perceptions et les rapports sensoriels, indépendamment de ce qu’il communique.
- Exemple : Les recherches de Schramm sur la télévision n'ont rien révélé car elles se focalisaient sur le "contenu", pas sur la nature transformationnelle du médium.
- Question possible : Pourquoi McLuhan affirme-t-il que le "contenu" est une distraction ?
- → Parce qu’il détourne l’attention des effets subliminaux et structurants des médias eux-mêmes.
7. Les transformations culturelles par les médias :
- L'art comme résistance : Seul l’artiste peut anticiper et comprendre les effets des médias sur les perceptions sensorielles, car il explore activement ces transformations.
- Exemple historique : McLuhan compare les impacts de l'argent au Japon au XVIIᵉ siècle avec ceux de la typographie en Occident.
- Question possible : Pourquoi McLuhan place-t-il l'artiste au centre de l’analyse des médias ?
- → Parce que l'artiste est le plus apte à remarquer et interpréter les changements sensoriels et culturels provoqués par les technologies.
8. Une urgence à comprendre les médias :
- Appel à la conscience : Pie XII et McLuhan soulignent l’importance de comprendre les médias pour ne pas subir leurs effets de manière inconsciente.
- Question possible : Que signifie la métaphore de McLuhan sur le bifteck et le chien ?
- → Elle illustre comment le contenu distrait l’attention, empêchant de percevoir les effets structurels des médias.
Introduction : La révolution des médias et leurs impacts
McLuhan distingue les médias chauds et froids en fonction de leur degré de participation du public et de la "définition" ou quantité d'information qu'ils transmettent. Cette dichotomie reflète comment les médias façonnent la culture, la société et même les comportements humains. Le texte aborde également les bouleversements sociaux et culturels engendrés par l’introduction de nouvelles technologies.
1. Médias chauds vs. Médias froids : Les principes fondamentaux
- Médias chauds : Ils se caractérisent par une forte intensité sensorielle et une "haute définition". Ils concentrent l’attention sur un seul sens et laissent peu de place à la participation active.
- Exemples : La radio, le cinéma, l’imprimé.
- Effets : Ils engendrent spécialisation et fragmentation. Par exemple, l’alphabet phonétique a contribué à des bouleversements culturels comme les guerres religieuses et le nationalisme.
- Médias froids : Ils présentent une faible définition et nécessitent une forte participation pour combler les "lacunes".
- Exemples : Le téléphone, la télévision, la parole.
- Effets : Ces médias favorisent l’interaction et l’engagement collectif.
Illustration : La danse comme métaphore culturelle
- La valse, rapide et mécanique, illustre un médium chaud adapté à l’âge industriel.
- Le twist, plus participatif et improvisé, symbolise un médium froid adapté à l’âge de la télévision.
2. Les bouleversements culturels des technologies
- Impact des nouvelles technologies sur les structures sociales :
- Exemples historiques :
- L’introduction des haches d’acier par les missionnaires a détruit la hiérarchie traditionnelle aborigène.
- L’écriture et l’imprimé ont brisé les structures médiévales, favorisant l’individualisme, puis une monopolisation corporative.
- La technologie électrique, en revanche, détribalise et retribalise à travers des processus d’accélération et de participation globale.
- La réaction humaine face à l’intensité des médias :
- Le "censeur freudien" agit comme un mécanisme de refroidissement face à des expériences intenses.
- Les nouvelles technologies imposent des réajustements culturels, souvent accompagnés de résistances et de retards.
3. L’âge de l’électricité : Une nouvelle ère médiatique
- Le mythe et la simultanéité :
- Les médias électriques transforment la perception en introduisant une simultanéité et une "conscience mythique".
- Exemples : Les spirales du musée Guggenheim de Frank Lloyd Wright illustrent une pensée concentrique et non linéaire, propre à l’ère électrique.
- Changement dans la communication :
- La télévision, en tant que médium froid, favorise la participation collective et redéfinit la culture américaine.
- Transition de la communication mécanique à une communication participative.
4. Les pays industrialisés et "retardés" face aux médias
- Les sociétés traditionnelles, considérées comme "froides", sont mieux préparées à absorber les technologies électriques grâce à leurs traditions orales.
- Par contraste, les sociétés industrialisées, avec leurs habitudes de spécialisation, peinent à s’adapter.
Exemples concrets :
- Le charleston est perçu comme avant-gardiste en URSS industrialisante, tandis que le twist reflète un retour à une culture participative en Occident.
Conclusion : Vers une gestion des médias
- Le rôle des médias dans l’évolution sociale :
- Les médias ne sont pas seulement des outils de transmission d’information, mais des forces qui restructurent les sociétés et les valeurs culturelles.
- Le futur de la communication :
- McLuhan suggère une régulation de l’exposition aux médias pour équilibrer les effets culturels. Par exemple, réduire ou augmenter les heures de télévision en fonction des contextes culturels pour moduler la "température" sociale.
Analyse du texte
- Les médias chauds et froids : définition et exemples
- Médias chauds : ils sont définis comme étant "complets" ou "riches" en information. Leur contenu est conçu pour être absorbé passivement par le public. Exemples : radio, phonographe, littérature méthodique.
- Médias froids : ils sont plus "incomplets", laissant des lacunes que le public doit combler par sa participation active. Exemples : télévision, aphorismes, écriture fragmentaire.
- Ces distinctions reposent sur la quantité d'information offerte par le média et sur le niveau d'engagement nécessaire pour en tirer du sens.
- Exemples culturels et artistiques
- McLuhan évoque des répétitions télévisées de Glenn Gould et Stravinsky, considérant que la télévision, média froid, s'y prête particulièrement bien car elle nécessite l'engagement du spectateur.
- À l'inverse, la radio ou les disques permettent une consommation plus passive, adaptée à des œuvres "finies".
- Participation et incomplétude
- McLuhan insiste sur l'importance de la participation active dans les médias froids. Il illustre cela par des métaphores culturelles, comme les aphorismes de Francis Bacon qui, en étant concis et ouverts, forcent le lecteur à réfléchir et compléter le sens.
- Culture visuelle vs culture orale
- McLuhan compare les cultures axées sur l'oralité et celles centrées sur la visualité (notamment dans les sociétés alphabétiques). Dans une culture visuelle, l'apparence visuelle prédomine au point d'occulter d'autres aspects (comme le son du nom d'une personne).
- En revanche, dans une culture orale, le son et l'identité sonore sont primordiaux.
- Humour, farces et médias
- McLuhan associe les farces et attrapes, ainsi que les jeux de mots, à des formes de participation physique et intellectuelle, souvent méprisées par ceux qui valorisent des médias plus structurés comme la littérature. Cela reflète une tension entre engagement direct et abstraction.
- La surchauffe des sens
- Le texte conclut sur une réflexion sur la surstimulation sensorielle. Lorsqu'un sens (comme la vue) est suractivé, il peut conduire à des états d'hallucination ou d'hyper-interprétation, ce qui déséquilibre l'expérience sensorielle globale.
Points clés pour la compréhension
- Les médias comme prolongements des sens : McLuhan perçoit les médias comme des extensions de nos capacités sensorielles, influençant notre manière de percevoir le monde.
- La participation comme critère de distinction : La différence entre médias chauds et froids réside dans la quantité de participation qu'ils exigent du public.
- Tensions entre abstraction et immersion : Les médias chauds offrent une immersion passive, tandis que les médias froids favorisent une réflexion active et une implication personnelle.