A. Le cas de la condition suspensive
Définition
Condition suspensive
Une condition dont la réalisation rend l’obligation effective. Tant qu’elle n’est pas remplie, l’obligation est en suspens.
Droit conditionnel
Droit pour lequel l’existence ou l’extinction dépend de la réalisation d’un événement futur et incertain.
Tant que la condition est pendante, le droit du créancier n’existe pas car c’est un droit conditionnel. Le créancier ne peut pas réclamer le paiement du débiteur. Si le débiteur paye tout de même, c’est un paiement de l’indu (quasi contrat), et il peut récupérer le paiement en vertu de l'Article 1304-5 alinéa 2 du Code civil.
Dire que le droit du créancier n’existe pas complètement n’est pas tout à fait exact. Il n’existe pas dans la mesure où le créancier ne peut pas réclamer le paiement, mais c’est un droit « en germe » dans le patrimoine du créancier, ce qui signifie que le créancier peut le céder à quelqu’un d’autre, il peut être transmis par succession, ou il peut être saisi par les créanciers du créancier.
1. La condition défaille
La condition défaille lorsqu’elle ne se réalise pas et n’a aucune chance de se réaliser, dans deux cas :
- On est certain que la condition ne pourra jamais se réaliser.
- Si la condition est encadrée d’un délai, ce délai a expiré sans que la condition soit réalisée.
Dans ce cas, la condition est supposée n’avoir jamais existé. L’engagement est alors considéré comme caduque, et la défaillance de la condition rend l’engagement caduque. L’importance est donnée à la caducité, plutôt qu’à la rétroactivité.
Lorsque la condition a été stipulée dans l’intérêt exclusif de l’une des parties (notamment pour le débiteur), cette partie peut toujours y renoncer, tant que la condition n’a pas défaillie ou n’est pas réputée accomplie pour sanction.
2. Si la condition se réalise
Avec les changements par l’ordonnance de 2016, sur la rétroactivité, les effets sont sensibles. Si la condition porte sur une chose, et s’écoule un délai substantiel entre la conclusion du contrat et la réalisation effective de la condition, plusieurs scénarios peuvent se produire : Le débiteur garde les risques et le droit d'administrer la chose jusqu’à la réalisation de la condition. Si la chose est fructifère, le débiteur peut percevoir les fruits pour la période en question.
Avant 2016, quand la condition se réalisait rétroactivement, le débiteur n’encourait pas les risques et devait restituer les fruits au nouveau propriétaire. Dans tous les cas, la défaillance ou la réalisation de la condition doivent intervenir en principe dans les délais prévus par la loi ou par le contrat. Si aucun délai n’est fixé, le juge interprète le contrat pour déterminer un éventuel délai tacite.
L’Article 1305-1, alinéa 2, stipule que le juge fixe les délais selon la nature de l’obligation et la situation des parties, tout en appliquant les mêmes règles que pour les termes.
Pendant la période où la condition est pendante, les biens du débiteur couverts par la condition sont immobilisés. Pour compenser, le créancier peut verser une rémunération au débiteur. C’est commun dans les promesses unilatérales de vente, entraînant une immobilisation considérable là où le bien est indisponible.
3. Empêchement de la réalisation par une partie
Si la réalisation de la condition est empêchée par celui qui aurait quelque intérêt, la condition est réputée accomplie (Article 1304-3, alinéa 1). Cette fiction juridique implique que même si la condition a failli, elle est considérée comme réalisée pour sanctionner le comportement fautif de la partie adverse.
Lorsqu’un débiteur empêche la réalisation par action ou absence d’action nécessaires, la sanction s’applique, sauf si la défaillance n’est due ni à un comportement déloyal ni irréalisable malgré ses actes.
Si c’est le créancier qui empêche intentionnellement la réalisation (par exemple, en trouvant un autre acheteur offrant plus), le débiteur peut, même si sanctionné, réclamer des dommages-intérêts.
B. Le cas de la condition résolutoire
Définition
Condition résolutoire
Une condition dont la réalisation entraîne l’extinction d’une obligation.
Les conditions résolutoires suivent pour l’essentiel les mêmes règles que les conditions suspensives, mais de manière inversée. Par exemple, dans une vente consentie sous condition résolutoire, si la condition se réalise, la réforme de 2016 a conservé la rétroactivité à titre de principe, sauf volonté contraire des parties.
La vente est alors rétroactivement anéantie, avec des tempéraments, tels que l'article 1304-7, qui maintient des actes d’administration pour la sécurité juridique, protégeant les tiers.
De même, la règle qui permet d’être réputée accomplie conditionelle à l'action empêche une partie par une action de se réaliser, est également applicable ici.
Dans la pratique, les ventes sous condition résolutoire sont rares comparées aux ventes sous condition suspensive. Cela est dû à des raisons fiscales : la condition résolutoire peut entraîner le paiement de droits de mutation non récupérables.
Avec une condition suspensive, tant que la condition n'est pas remplie, la vente n'existe pas, évitant ainsi les droits de mutation.
A retenir :
En résumé, les conditions suspensives et résolutoires dictent les impacts juridiques des obligations en suspens et leur application dépend de réalisations futures et incertaines. Elles sont encadrées par des articles du Code civil qui établissent comment traiter leur réalisation ou défaillance, en prévoyant des sanctions dans certains cas de non-réalisation fautive, maintenant ainsi l’équilibre entre les parties.