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Sans titre

Introduction générale : qu’est-ce que la responsabilité civil


La notion d'obligation


La notion première en droit des obligations est celle d'obligation, définie comme le lien juridique par lequel une

ou plusieurs personnes, appelées « débiteurs », sont tenues d'une prestation envers une ou plusieurs autres

personnes, appelées « créanciers ».

Un droit de créance correspond au droit personnel d'exiger une prestation exécutée par une autre personne. Ce

droit personnel s'oppose au droit réel, qui met en relation une personne avec une chose.


Les sources des obligations


L'art 1110 CC énonce les trois sources des obligations : « Les obligations naissent d’actes juridiques, de faits

juridiques ou d’autorités de la loi. »

Ces sources peuvent être détaillées comme suit :

- L’autorité de la loi. - Les actes juridiques : il s'agit notamment du droit commun des contrats. - Les faits juridiques : - Licites : comprenant les quasi-contrats. - Illicites : donnant lieu à l'application de la responsabilité extracontractuelle.


Le quasi-contrat


Le quasi-contrat est une situation dans laquelle un fait volontaire entraîne l’enrichissement d’une personne au

détriment d’une autre, sans justification. L'article 1300 du Code civil le définit comme suit : « Un fait purement

volontaire dont il résulte un engagement de celui qui en profite sans y avoir droit et parfois un engagement de

leur auteur envers autrui. »

Les trois formes de quasi-contrats sont :

- La gestion d’affaire. - La répétition de l’indu. - L'enrichissement sans cause.


Section 1 : La nature de la responsabilité civile extracontr


La responsabilité est l'obligation de répondre d’un dommage devant la justice et d’en assumer les conséquences

civiles, pénales ou disciplinaires, soit envers la victime, soit envers la société.

La responsabilité civile est plus spécifiquement l’obligation de répondre civilement du dommage causé à autrui.

La réparation peut prendre deux formes :

- En nature (restauration directe de la situation initiale) - Par équivalent (versement d’une indemnisation)


§I : La distinction entre responsabilité civile et responsabilité

A) Les domaines distincts des responsabilités civile et péna


La distinction entre ces deux types de responsabilités a été formalisée avec la création du CC en 1804 par

Napoléon.


1) Le domaine de la responsabilité civile


Elle couvre tout fait quelconque, incluant l’imprudence, la négligence, et parfois des faits parfaitement

normaux.

Il existe aujourd’hui des régimes de responsabilité civile sans faute.

Le CC de 1804 distingue : - Le délit civil : fait volontaire ayant causé un dommage. - Le quasi-délit civil : fait d’imprudence ou de négligence ayant causé un dommage.

Les fonctions de la responsabilité civile

La responsabilité civile remplit une fonction principale et deux fonctions accessoires :

➜ La fonction principale : fonction indemnitaire

La responsabilité civile a pour but de réparer le dommage subi par la victime, ce qui en fait une fonction

réparatrice. Ex : Si la maison d’une personne est détruite par un incendie causé par un voisin, la responsabilité

civile permettra d’obtenir réparation

Le dommage est une condition essentielle de la mise en œuvre de la responsabilité civile.


➜ Première fonction accessoire : fonction punitive

Cette fonction est activée lorsque la responsabilité du défendeur est engagée pour un fait fautif qu’il a

commis.

Bien que l'objectif principal soit indemnitaire, l’indemnisation peut parfois être perçue comme une

sanction(notamment en cas de réparation élevée).

La responsabilité civile peut ainsi comporter un aspect punitif.

➜ Deuxième fonction accessoire : fonction préventive

Également appelée fonction prophylactique, elle vise à dissuader les individus de commettre des actes

dommageables.

La victime doit engager une action civile, ayant pour seul objet la réparation du préjudice subi.

En l’absence d’infraction pénale, mais en cas de quasi-délit ou de délit civil, l’action est intentée devant une

juridiction civile.

La sanction est toujours proportionnée à la gravité du préjudice, et non à la gravité de la faute.


2) Le domaine de la responsabilité pénale


Le domaine de la responsabilité pénale est plus restreint que celui de la responsabilité civile. Il se limite aux

seules infractions pénales définies par la loi : - Crimes - Délits - Contraventions

Une infraction pénale se compose de comportements considérés comme dangereux pour la société, prévus

et réprimés par la loi. Les principes fondamentaux incluent :

- Nullum crimen, nulla poena sine lege : il n’y a pas d’infraction sans texte. - Interprétation stricte de la loi pénale : le juge ne peut s’éloigner des incriminations définies par la loi.

Les fonctions de la responsabilité pénale diffèrent de celles de la responsabilité civile. Sa fonction principale est


la fonction répressive, qui vise à sanctionner les comportements dangereux. Cette fonction inclut trois sous-

fonctions :


- Punitive : Punir le coupable en raison de la faute pénale qu’il a commise. - Éliminatoire : Retirer le coupable de la société en raison de sa dangerosité, protégeant ainsi les autres

individus - Réadaptative : Réinsérer l’auteur de l’infraction pénale dans la société en le remettant sur le droit chemin.

Cette fonction est particulièrement valorisée dans les réformes récentes.

Les sanctions pénales ont pour objectif principal de protéger la société, ce qui les distingue des sanctions

civiles.

Peine d’emprisonnement : Elle reste l’exemple emblématique de sanction pénale.

Sanctions complémentaires : - Confiscation des biens ayant servi à commettre l’infraction (par exemple, en cas de trafic d’armes ou de

stupéfiants). - Interdictions professionnelles empêchant l’exercice de certaines activités.

Amende pénale (quid) : - L’amende pénale a une fonction différente de celle de l’amende civile. Elle vise à réparer l’atteinte causée à

la société. - Contrairement à une indemnisation civile, elle est versée au Trésor public et non à la victime. - Elle remplit également une fonction dissuasive.

La responsabilité pénale est déclenchée dans le cadre de l’action publique, menée par le ministère public

devant les juridictions répressives.


B) Les rapports entre responsabilité civile et responsabilité péna


Lorsqu’un dommage résulte d’un fait susceptible d’être pénalement réprimé, la victime dispose d’une option

pour exercer son action civile :

- Soit devant le juge civil. - Soit devant le juge pénal.

Le principe de l’autorité de la chose jugée au criminel sur le civil s’impose. Ainsi, les décisions pénales lient

le juge civil en ce qui concerne la qualification des faits.


1) L’exercice de l’action civil


L’exercice de l’action civile est prévu par l’art 3 CPP, tandis que l’art 2 du CPP en précise les bénéficiaires :

« L’action est reconnue à tous ceux qui ont personnellement souffert du dommage directement causé par

l’infraction. »


Comment s’exerce l’action civile devant le juge pénal ?


Deux voies sont possibles pour la victime :

- 1) Plainte avec constitution de partie civile : La victime initie directement une action pénale tout en demandant

réparation des préjudices subis. - 2) Intervention par voie d’action publique : La victime intervient après le déclenchement de l’action publique

par le ministère public.

Dans ce cas, le juge pénal suit un ordre précis : - Statuer d’abord sur l’action publique. - Ensuite, se prononcer sur l’action civile pour la réparation des dommages.

L’art 2 du CPP limite la compétence du juge pénal aux intérêts civils résultant directement des faits pénalement

sanctionnés. Le juge applique uniquement les règles de responsabilité pour faute, car l’infraction pénale

constitue déjà une faute civile. Il ne peut statuer sur d’autres régimes de responsabilité (ex. : responsabilité sans

faute). La reconnaissance de la culpabilité pénale est une condition préalable à l’indemnisation de la victime.

Exceptions au principe

Certaines situations permettent une indemnisation sans condamnation pénale :

- Art 372 du CPP (Cour d’assises) : Cour d’assises peut allouer des dommages-intérêts à la victime en cas

d’acquittement, mais uniquement sur le fondement de la responsabilité pour faute. - Art 470-1 du CPP (tribunal correctionnel) : En cas de relaxe dans une infraction non intentionnelle, la victime

peut être indemnisée selon les règles du droit civil.


Divergences historiques entre juge civil et pénal


Un préjudice par ricochet survient lorsqu’une personne subit un préjudice en raison du dommage direct infligé

à une autre personne.

- La chambre civile refusait d’accorder réparation au concubin(e) en cas de décès de leur partenaire. - La chambre criminelle, au contraire, reconnaissait ce droit au concubin(e).

Cette divergence a été tranchée par l’arrêt Ch. Mixte, 27 février 1970, Dangereux, qui consacre la position de

la chambre criminelle : le préjudice par ricochet des concubins peut être réparé.

Aujourd’hui, il n’y a plus de divergences majeures entre les chambres civile et criminelle devant la CCass.

Pourquoi la victime choisirait plutôt d’agir devant le juge pénal et non le juge civil ? Avantages pour la victime

d’agir devant le juge pénal :

- Contrainte pour le ministère public : En cas de plainte avec constitution de partie civile, le ministère public est

obligé de diligenter une enquête. Toutefois, il reste libre de poursuivre ou non. - Régime de la preuve : Procédure mixte devant le juge pénal : - Inquisitoire au stade de l’enquête : la charge de la preuve repose sur le ministère public. - Accusatoire au stade du jugement : la victime doit apporter les éléments de preuve nécessaires


2) L’autorité de la chose jugée au criminel sur le civ


L'autorité de la chose jugée au criminel sur le civil impose au juge civil de sursis à statuer, cad qu’il doit attendre

la décision définitive du juge pénal sur l’action publique avant de se prononcer. Ce principe est énoncé à l’art 4

CPP : « Le criminel tient le civil en l’état. »

Le juge civil est tenu de respecter ce principe lorsqu’il reprend une affaire déjà traitée par le juge pénal. Cela

signifie que ce qui a été jugé par le juge pénal s’impose au juge civil. Cette autorité est absolue et s’impose à

tous : justiciables comme juges.

Conséquences sur l’appréciation des fautes

- Identité des fautes pénales et civiles : Si le juge pénal conclut à une faute pénale, les mêmes faits

constituent également une faute civile. - Limites de cette identité : - Ce principe ne s’applique qu’en cas de condamnation pénale. - Le juge civil, bien que lié par la qualification de faute reconnue par le juge pénal, conserve sa liberté

d’apprécier le lien de causalité entre la faute et le préjudice. Ainsi, une reconnaissance de culpabilité pénale

n’impose pas nécessairement la reconnaissance d’une responsabilité civile.


Quid décision de relaxe ou acquittement


En l’absence de faute pénale intentionnelle

Lorsque le juge pénal ne retient pas de faute pénale intentionnelle, le juge civil n’est pas lié par cette décision. Il

peut alors retenir :

- Une faute civile d’imprudence ou de négligence. - Un régime de responsabilité sans faute, sans contredire la décision pénale.

Cela permet au juge civil de statuer en utilisant des régimes qui ne nécessitent pas l’intention coupable.

En cas de relaxe pour un délit non intentionnel

Le juge civil peut toujours retenir une faute civile d’imprudence ou de négligence, conformément à l’art 4-1 du

CPP, introduit par la loi dite « Fauchon ». Cette disposition lui reconnaît explicitement ce pouvoir.


C) Les rapprochements entre les responsabilités civile et péna


Depuis quelques années, les responsabilités pénales et civiles présentent des points de convergence. Le principal

élément de rapprochement réside dans la fonction de plus en plus punitive de la responsabilité civile. Doctrine et

législateur cherchent à renforcer cet objectif punitif.


Les dommages-intérêts punitifs : une notion discutée


Un débat important porte sur l’introduction des dommages-intérêts punitifs en droit français, concept déjà en

vigueur dans les pays de common law.

Définition : sont une somme d’argent versée à titre d’indemnisation, supérieure au montant du préjudice subi

par la victime.

But dans les pays de common law : ces sommes, parfois astronomiques, visent à punir les auteurs de fautes

lucratives, souvent commises par des entreprises à des fins d’enrichissement.

Bien que non intégrés au droit français, deux projets ont tenté de les introduire :

L’avant-projet « Catala » (2005) : - Intégration des dommages-intérêts punitifs pour les fautes lucratives. - Distinction avec les pays de common law : une partie des sommes serait reversée au Trésor public.

Le projet de réforme de la responsabilité civile (13 mars 2017) : Proposition d’introduire une amende civile,

intégralement versée au Trésor public.

Ces initiatives ont été abandonnées sous l’influence des lobbys.


La fonction réparatrice dans le cadre pénal


La réparation du dommage devient une préoccupation croissante, même en droit pénal. Deux exemples illustrent

cette tendance :

- Sanctions pénales à vocation réparatrice : Ex : En droit de l’environnement, certaines infractions sont

sanctionnées par la remise en état des lieux. - Réparation pénale pour les mineurs : au lieu d’une peine classique, il est possible d’imposer un module de

réparation, soit envers la victime, soit dans l’intérêt de la collectivité.

Malgré ces rapprochements, une fusion entre responsabilité civile et pénale semble impossible :

- Certaines situations nécessitent une réponse pénale que la justice civile ne peut satisfaire (ex : réprimer les

comportements dangereux comme les trafics d’armes ou d’êtres humains). - D’autres cas relèvent uniquement du domaine civil, sans justifier l’intervention du pénal (ex : atteinte à la vie

privée par une photographie volée)

La responsabilité civile concerne les rapports entre personnes privées. Si une personne publique est

impliquée, cela relève alors de la responsabilité administrative.

§2 : La distinction entre responsabilité contractuelle et responsabilité ex


A) Des domaines distinc


Responsabilité contractuelle Responsabilité extracontractuelle


Vise à sanctionner les manquements d'une partie à ses

obligations contractuelles. Elle s'applique spécifiquement

aux dommages survenus lors de l'exécution d’un contrat


Vise à réparer les dommages subis par une victime en

dehors de toute relation contractuelle. Ainsi, le dommage

doit être causé par un tiers extérieur au contrat.


L’adjectif « délictuel » désigne l’ancienne appellation de la responsabilité extracontractuelle. Pendant

longtemps, la faute était le seul fondement de la responsabilité civile, appelée alors « délit civil ». Par la suite, la

notion de quasi-délit a été introduite, admettant que la faute civile pouvait également être une imprudence ou

une négligence.

Pourquoi distinguer les deux responsabilités ? Bien que les règles applicables soient similaires dans les deux

cas, avec des sanctions identiques (DI), certaines différences notables justifient la distinction :


B) Le principe de non-cumul


Le principe de non-cumul interdit à la victime d’un dommage de choisir librement entre les deux régimes

de responsabilité. Ce principe signifie : - Le créancier contractuel doit se fonder sur la responsabilité contractuelle. - La victime d’un dommage causé par un tiers doit se fonder sur la responsabilité extracontractuelle.

Ce principe a été consacré par l’arrêt Civ. 11 janvier 1922 et réitéré régulièrement, comme dans l’arrêt Civ. 2e,

21 décembre 2023 dommages sur le parking d’un supermarché : - Si le conducteur a contracté avec le supermarché, la responsabilité contractuelle est retenue. - Si le conducteur est un tiers, la responsabilité extracontractuelle s’applique. - Si deux personnes sont dans le véhicule, l’une ayant contracté et l’autre non, la responsabilité contractuelle

s’applique à la première, et la responsabilité extracontractuelle à la seconde.

Frontières du principe de non-cumul


Période concernée : Les fautes pré-contractuelles (ex. dol, rupture abusive des pourparlers) et post-

contractuelles relèvent de la responsabilité extracontractuelle.


Personnes concernées : Principe de l’effet relatif des contrats : la responsabilité contractuelle ne s’applique

qu’entre les parties contractantes.

Ex 1 : Un créancier peut agir contre un tiers en responsabilité extracontractuelle si ce dernier a causé la

défaillance de son débiteur.

Ex 2 : Un passant blessé par l’effondrement d’un immeuble peut agir contre l’architecte en responsabilité

extracontractuelle, faute de contrat entre eux.

Ce principe garantit le respect des prévisions contractuelles entre les parties, en s’appuyant sur le principe de la

relativité contractuelle


C) Le principe de la relativité de la faute contr


Le principe de relativité de la faute contractuelle établit que seule une partie au contrat peut invoquer la

responsabilité contractuelle d’un cocontractant. La victime d’un dommage causé par un tiers ne peut se

prévaloir des règles de la responsabilité contractuelle, ni invoquer un recours fondé sur un manquement

contractuel à la place d’une faute civile.

Cependant, ce principe a été remis en cause par l’assemblée plénière de la CCass dans l’arrêt Bootshop Ass.

Plén., 6 octobre 2006 la Cour y affirme : « Le tiers à un contrat peut invoquer, sur le fondement de la

responsabilité délictuelle, un manquement contractuel, dès lors que ce manquement lui a causé un dommage. »

Ainsi, le tiers n’a plus à prouver l’existence d’une faute civile ; il peut directement se fonder sur le

manquement contractuel pour obtenir réparation. Cependant, des arrêts postérieurs, tels que ceux des 15

décembre 2011 et 18 mai 2017, semblaient exiger du tiers la preuve d’une faute civile, remettant en cause la

portée de l’arrêt Bootshop.

Compétence territoriale des juridictions Clauses limitatives de responsabilité

Matière contractuelle : la victime peut choisir entre la

juridiction du domicile du défendeur ou celle du lieu

d'exécution de l'obligation.


Matière contractuelle : ces clauses sont admises, sous

réserve de leur validité.


Matière extracontractuelle : la victime peut choisir entre le

domicile du défendeur ou celui du lieu de réalisation de

l’infraction (art 46 CPC)


Matière extracontractuelle : elles sont interdites Arrêt du 17

février 1955 : une clause limitative de responsabilité conclue

entre des participants à une compétition sportive a été

déclarée nulle


Finalement, s’agit-il de la remise en cause de l’arrêt Bootshop ou de l'ajout de critères nécessaires en

plus ?

CCass a clarifié sa position avec l’arrêt Bois Rouge Ass. Plén., 13 janvier 2020, confirmant la solution

Bootshop. Cet arrêt facilite l’indemnisation des tiers ayant subi un dommage en raison de la mauvaise

exécution d’un contrat

Critiques de la solution Bootshop :

- Atteinte au principe de l’effet relatif des contrats

Doctrine : « Le contrat ne produit des effets qu’à l’égard des parties ».

Réponse de la Cour : Le contrat reste opposable au tiers (art. 1200 CC), donc aucun manquement au principe.

- Injustice envers les contractants :

Les tiers ne sont pas soumis aux clauses contractuelles (ex. : clause limitative de responsabilité).

Cette asymétrie crée un déséquilibre au détriment des contractants.

En juillet 2024, la chambre commerciale de la Cour de cassation a introduit un ajustement à la solution

Bootshop (Com., 3 juillet 2024, Clamageran). Elle énonce : « Le tiers d’un contrat qui invoque, sur le

fondement de la responsabilité contractuelle, un manquement contractuel qui lui a causé un dommage peut se

voir opposer les conditions et limites de la responsabilité applicables entre les contractants. » Cette nouvelle règle

vise à :

- Ne pas déjouer les prévisions des parties. - Ne pas conférer aux tiers une position plus avantageuse que celle des parties contractantes.

Cependant, cette solution crée une incertitude quant à son application future, car elle émane uniquement de la

chambre commerciale et non des chambres civiles.

Les projets de réforme de la responsabilité civile envisagent une remise en cause de la jurisprudence

Bootshop en introduisant un art 1234 en deux alinéas : - Rappel du principe classique : Le tiers à un contrat doit se fonder sur la responsabilité extracontractuelle et

prouver une faute civile. - Exception pour les intérêts légitimes :

Un tiers ayant un intérêt légitime dans la bonne exécution du contrat pourrait se fonder sur la responsabilité

contractuelle.

Les clauses limitatives de responsabilité lui seraient alors opposables.

Cette réforme chercherait à concilier sécurité juridique et prévisions contractuelles, tout en clarifiant les

frontières entre responsabilité contractuelle et extracontractuelle.

D) La remise en cause de la distinc

1) Par le législate


Le législateur a instauré des régimes de responsabilité qui transcendent la distinction entre responsabilité

contractuelle et extracontractuelle. Ces régimes s’appliquent indépendamment de la nature de la relation entre

l’auteur et la victime du dommage.

Exemples : - Loi Badinter (1985) : régime d’indemnisation des accidents de la circulation. - Responsabilité du fait des produits défectueux (1998) : mise en place de règles spécifiques pour les

produits dangereux. - Responsabilité en matière de professionnels de santé : régulation spécifique aux dommages causés dans

ce domaine.


2) Par le juge


Le juge, principalement pénal, a également contribué à cette remise en cause. Depuis l’arrêt Crim., 15 juin 1923,

lorsqu’il statue sur une action civile, même en présence d’un contrat, il applique uniquement les règles de la

responsabilité extracontractuelle.

Quid de la distinction dans les projets de réforme ?

Les projets de réforme maintiennent la distinction entre responsabilité contractuelle et extracontractuelle tout en

introduisant des modifications.

Modifications formelles : - Création de dispositions communes. - Organisation distincte des règles spécifiques à la responsabilité contractuelle et extracontractuelle.

Modifications de fond :


Atténuation du principe de non-option : E : la proposition de loi sénatoriale du 29 juillet 2020 permettrait à

une victime de se fonder sur la responsabilité extracontractuelle en cas de dommage corporel, même si elle est

partie au contrat.

Pourquoi ? Permettre à la victime d’échapper à une clause limitative de responsabilité insérée dans le contrat.

Ces ajustements visent à répondre aux critiques de rigidité des régimes actuels tout en préservant une structure

cohérente entre les deux types de responsabilité.


Section 2 : L’évolution de la responsabilité civile extracon

§1 : La construction de la responsabilité civile dans et hors du Code ci


A) Avant le Code civil de 1804


La responsabilité civile trouve ses origines dans l’ancien droit. Pendant longtemps, elle était confondue avec la

responsabilité pénale. Principe de vengeance privée :

- Ce principe régnait lors des invasions barbares (du Ve siècle av. J.-C. au début du XIIe siècle ap. J.-C.). - La sanction de l’auteur était confondue avec la réparation due à la victime. - La responsabilité était collective : elle incombait au clan auquel appartenait l’individu responsable. - La victime était également représentée par son clan. - La réparation se faisait entre clans, et non entre individus.

À partir des XIIIe et XIVe, les mécanismes de réparation évoluent : - Système volontaire : Les clans déterminaient ensemble la somme d’argent que l’auteur devait à la victime. - Système forcé : La loi imposait une somme en fonction de la faute commise (ex : la loi salique prévoyait le

versement d’une somme d’argent à la victime, évaluée selon la gravité de la faute)

Évolution au Moyen Âge (Ve- XIe)

Séparation progressive de la responsabilité civile et pénale

Cette séparation est le fruit d’influences multiples :

➜ Droit romain

Bien que son influence soit limitée, le droit romain a laissé des traces dans la construction de la responsabilité

civile. Le terme de « responsabilité » n’existait pas, mais des notions comme respondere (obligation de se porter

garant) dérivaient de sponsio ou sponsor (débiteur).

La réparation des dommages reposait non sur la faute, mais sur la recherche d’un équilibre entre les biens des

différentes familles. Si cet équilibre était rompu, il fallait le rétablir par un mécanisme de réparation.

➜ Christianisme et canonistes

L’influence judéo-chrétienne, majeure, a donné à la responsabilité civile une forte coloration morale. La faute de

l’auteur est devenue la cause justifiant l’engagement de la responsabilité. Deux évolutions importantes en

découlent :

- La responsabilité devient subjective, fondée sur la faute (un fait subjectif). - La responsabilité devient individuelle : seule la personne ayant commis la faute doit réparer le dommage

causé à la victime.

Les bases de la responsabilité civile ont été théorisées par Domat, qui s’inspirait des travaux de Grotius. Ces

théories ont influencé les rédacteurs du Code civil, qui en ont repris les principes pour structurer le droit de la

responsabilité civile.


B) Dans le Code Civil de 1804

La philosophie du Code civil de 1804 repose sur un triptyque :


Universalisme Moralisme Individualisme

Le Code introduit un principe général

de responsabilité, sans délits spéciaux.

Contrairement au droit romain, qui

distinguait délit et quasi-délit de

manière très spécifique.


La faute joue un rôle central dans

l’engagement de la responsabilité.


La responsabilité est engagée au niveau

de l’individu et non d’entités collectives

comme la famille, le clan ou l’État


La responsabilité définie en 1804 repose sur la faute personnelle, avec une mise en avant des articles suivants :


Ces articles, devenus articles 1240 et 1241 aujourd’hui, conservent la même formulation. La faute, qu’elle soit

légère, d’imprudence ou de négligence, reste le fondement de la responsabilité.

Les textes reflètent une vision humaniste selon laquelle :

- L’homme est libre et doué de raison. - Cette raison lui permet d’éviter les fautes. - Lorsqu’une faute est commise, l’individu doit en assumer les conséquences en réparant le dommage causé.

Cette philosophie imprègne également l’ancien article 1384 (aujourd’hui article 1242), qui étend la

responsabilité aux dommages causés par : - les personnes sous sa garde (ex : les parents sont responsables des dommages causés par leurs enfants

mineurs, en raison d’un défaut de surveillance ou d’éducation) - Les préposés et commettants : L’employeur est responsable des fautes commises par ses employés dans

l’exercice de leurs fonctions.

En 1804, la responsabilité civile s’inscrit dans une société qui accepte les aléas de la vie : - Certains dommages ne résultent pas d’une faute humaine. - Ces dommages ne doivent pas être réparés : la victime les supporte seule.

Au cours de la période contemporaine, cette conception a évolué pour mieux prendre en compte les situations

où les victimes ne sont pas responsables, mais supportent néanmoins les conséquences des dommages subis.


C) Après le Code civil de 1804


La révolution industrielle, qui débute à la fin du XIXe siècle, entraîne l'apparition de risques nouveaux liés au

développement du machinisme.

Exemples de risques : - Accidents industriels causés par des défaillances de machines. - Accidents de la circulation.

Problème :

- La responsabilité fondée sur la faute, telle qu’établie en 1804, s’avère inadaptée à ces nouveaux risques. - Les victimes, comme les ouvriers ou les piétons, ne parviennent souvent pas à prouver la faute du propriétaire

de la machine ou du véhicule.

Contexte social : La société tolère de moins en moins les dommages fortuits.

Face à l'inaction du législateur, la jurisprudence joue un rôle crucial en réinterprétant les textes du Code civil pour

s’adapter à ces évolutions.


1) La place de la jurisprudence


Philippe Brun affirme que « le XXe siècle est le siècle des grands arrêts de la jurisprudence de la responsabilité

civile »


a) L’objectivation de la responsabilité civ


À l’époque, les victimes, incapables de prouver une faute, ne pouvaient pas obtenir réparation. La jurisprudence a

donc développé des régimes de responsabilité sans faute, également appelés responsabilité objective ou

responsabilité de plein droit.

Arrêt Teffaine 16 juin 1896, chambre civile, CCass : - Faits : Explosion d’une machine à vapeur sur un bateau, causant le décès d’un ouvrier. La famille ne parvient

pas à prouver la faute de l’armateur (propriétaire). - Décision : Création d’un cas de responsabilité du fait des choses sans faute, fondé sur l’art 1384 al 1er CC - Principe : Le gardien d’une chose est responsable des dommages causés, même en l’absence de faute.

Transformation des régimes de responsabilité du fait d’autrui en responsabilité sans faute

Ancien article 1382 Ancien article 1383


« Tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un

dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé, à le

réparer. »


« Chacun est responsable du dommage qu'il a causé non

seulement par son fait, mais encore par sa négligence ou par

son imprudence. »


Responsabilité des pères et mères :

Avant 1984, ils pouvaient s’exonérer en prouvant qu’ils n’avaient commis ni faute d’éducation ni faute de

surveillance.

Depuis 1984 : Les parents sont systématiquement responsables des dommages causés par leur enfant mineur,

sans possibilité d’exonération.

Responsabilité des commettants : Sujette à la même évolution.


b) Le développement des chefs de préjudice réparables


Une lacune du Code civil de 1804 réside dans l’absence de définition du dommage. Cette omission a permis à la

jurisprudence de déterminer au cas par cas les préjudices indemnisables. Exemples d’admission progressive de

nouveaux chefs de préjudice :

- Arrêt Dangereux (1970) : Reconnaissance du préjudice par ricochet pour une concubine. - Affaire du Cheval Lunus (1962) : Réparation du préjudice d’affection lié à la perte d’un animal.

- Arrêt du 22 février 1995, 2e chambre civile : Admission du préjudice moral d’une personne dans le coma,

marquant un revirement de jurisprudence.

- Arrêt du 11 février 2021, 2e chambre civile : Reconnaissance du préjudice d’affection d’un enfant à naître

pour la perte d’un grand-parent décédé avant sa naissance.

Préjudice d’angoisse de mort imminente : Préjudice moral ressenti par une victime consciente de sa mort

imminente, notamment dans des cas d’attentats.

La nomenclature Dintilhac propose une liste des préjudices patrimoniaux et extrapatrimoniaux liés à des

dommages corporels. Caractéristiques :

- Non normative et non exhaustive. - Outil pratique utilisé par les juges du fond. - Permet l’indemnisation de préjudices spécifiques, comme le préjudice d’anxiété (stress lié à une exposition à

un produit dangereux, avec un risque accru de maladie future).

2) Les interventions législa

Introduction de cas de responsabilité sans faute par le législateur

➜ Régime d’indemnisation des accidents du travail

Loi du 9 avril 1898 : - Instauration d’une responsabilité automatique de l’employeur en cas d’accident du travail, même pour les

accidents fortuits (non liés à une faute de l’employeur). - En contrepartie de cette responsabilité automatique, le salarié ne bénéficie pas d’une indemnisation intégrale,

mais d’une compensation forfaitaire de ses préjudices.

➜ Régime d’indemnisation des accidents de circulation

Loi Badinter du 5 juillet 1985 : - Instauration d’un régime de responsabilité sans faute. - Le conducteur est responsable des dommages causés par l’accident, même si aucune faute ne peut lui être

reprochée.

➜ Régime de responsabilité du fait des produits défectueux

Loi du 19 mai 1998 : Le producteur d’un produit défectueux est tenu responsable, même en l’absence de faute de

sa part.

➜ Création de fonds de garantie : Mise en place de multiples fonds d’indemnisation pour couvrir des dommages

lorsqu’il est impossible d’identifier l’auteur du préjudice.

➜ Inscription du préjudice écologique dans le Code civil

Loi du 8 août 2016 : Reconnaissance spécifique du préjudice écologique, permettant sa réparation.


3) La collectivisation de la responsabilité c


La collectivisation désigne le transfert de la charge de l’indemnisation d’un individu à la collectivité.

Origine de ce mouvement

Alourdissement de la charge de responsabilité :

- Augmentation des cas où la responsabilité est recherchée. - Montée significative des montants des dommages et intérêts.

Conséquence : Les individus ne peuvent plus supporter seuls les charges liées à l’indemnisation des victimes.

Rôle de l’assurance de responsabilité

- Moyennant une prime, une personne voit sa responsabilité civile couverte par un assureur.


- Le patrimoine personnel de l’assuré n’est pas engagé ; c’est l’assureur qui prend en charge la dette de

responsabilité. - L’assureur finance ces indemnisations grâce aux primes collectées auprès de l’ensemble de ses assurés.


La « crise de croissance » de la responsabilité civile


L’évolution des mécanismes d’indemnisation est favorable aux victimes, permettant une réparation quasi-

systématique des dommages. Toutefois, une partie de la doctrine critique cette croissance rapide.


La critique doctrinale

- Philippe Brun : Parle d’une « crise de croissance » de la responsabilité civile, résultant d’une expansion

exponentielle des régimes de responsabilité. - Lambert-Faivre : - Relie cette expansion à la collectivisation de la responsabilité, qui incite les juges à multiplier les préjudices

indemnisables. - Évoque un « passage d’une dette de responsabilité à une créance d’indemnisation ».

Changement d’objectif de la responsabilité civile


Objectif initial : Sanctionner l’auteur d’un fait fautif, en se focalisant sur les causes du dommage.

Objectif contemporain : - Réparer les dommages en mettant l’accent sur les conséquences et la finalité. - La fonction indemnitaire est désormais prioritaire.

Points de vue doctrinaux

- M. Mekki : Affirme que, dans le cadre de la responsabilité civile, c’est la finalité qui justifie les moyens. - L. Cadiet : Développe des analyses complémentaires sur la transformation des fonctions et des enjeux de la

responsabilité civile.


§2 : Les fondements de la responsabilité civile vus par la doct


La question des fondements de la responsabilité civile est théorique, mais essentielle : pourquoi déplacer la

charge du dommage de la victime à un tiers ?

Les fondements permettent de comprendre pourquoi un régime de responsabilité existe et ce qui justifie que ce

soit un tiers, et non la victime, qui assure la réparation.

Le fait générateur est central : il peut s’agir d’une faute, mais aussi d’autres faits, comme le fait d’un enfant.

Selon Philippe Brun, le fait générateur est défini comme « un fait ou un acte révélant un caractère d’anormalité

ou de défectuosité, constitutif d’un trouble social ». Ce fait justifie l’engagement de la responsabilité civile et

donc l’indemnisation. Sans fait générateur, c’est la victime qui supporte seule son dommage.


A) La responsabilité fondée sur la


C’est la théorie la plus ancienne, consacrée par le Code civil de 1804, qui fonde la responsabilité uniquement sur

la faute.

- Si un tiers supporte l’indemnisation, c’est uniquement en raison de sa faute. - En l’absence de faute, il n’est pas responsable.

Caractéristiques :

Conception subjective de la responsabilité civile : Défendue par des auteurs du XXe comme Planiol, qui

considère que la recherche de la faute doit être un réflexe pour le juge. Ripert estime que la victime d’un

dommage fortuit doit en supporter seule les conséquences.

Bien que cette théorie soit encore défendue, l’apparition de régimes de responsabilité sans faute a conduit à

chercher d’autres fondements à la responsabilité civile.

B) La théorie du ri


Développée par Saleilles et Josserand à la fin du XIXe, cette théorie s’appuie sur l’essor du machinisme et des

difficultés à prouver la faute.

Principe : les auteurs estiment qu’il n’est pas acceptable que les dommages causés par des accidents industriels et

de circulation restent à la charge des victimes. Ils prônent une obligation d’assumer la charge des risques

engendrés par une activité humaine, si celle-ci est source de profit.

Théorie du risque-profit : - Le propriétaire d’une chose doit être responsable des dommages causés par celle-ci, car il est à l’origine du

risque créé au détriment d’autrui. - Ce propriétaire est désigné comme le gardien de la chose.


La théorie est guidée par l’équité : celui qui s’enrichit grâce à une activité doit en assumer les risques.

Adoption avant l’arrêt Teffaine : Dans cet arrêt, la responsabilité de l’armateur est retenue en raison du risque

lié à son activité, l’obligeant à supporter les dommages subis par son ouvrier.

Critiques : - Frein au développement : peur des conséquences des innovations, pouvant décourager la recherche et

l’innovation. - Privation de la fonction préventive de la responsabilité civile : pour certains, cette fonction n’existe qu’en

présence d’une faute.

Malgré les critiques, cette théorie a joué un rôle majeur dans l’évolution de la responsabilité civile.


C) La théorie de la ga


Développée par Boris Starck (1947), contrairement aux autres théories, celle-ci se concentre sur la victime et

non sur l’auteur du dommage.

Fondements :

- Chaque personne a droit au respect de sa vie, de son intégrité corporelle et de ses biens. - L’atteinte à ce droit implique réparation. - La responsabilité civile repose sur le droit à la sécurité matérielle et morale.

Distinction selon l’atteinte subie :

- Atteinte à l’intégrité corporelle ou matérielle (responsabilité objective) : Réparation possible sans faute. (Ex :

destruction du vélo d’un cycliste victime) - Atteinte aux intérêts moraux ou économiques (responsabilité subjective) : Réparation fondée sur la faute. (Ex :

perte de salaire liée à une hospitalisation)

Critiques : - Théorie imprécise, n’expliquant pas pourquoi certains préjudices sont plus dignes d’indemnisation. - Ne correspond pas au droit positif français, qui ne hiérarchise pas les intérêts protégés. - Risque d’immobilisme et indifférence au pouvoir du responsable d’empêcher le dommage.


D) La responsabilité fondée sur l’a


Développée par : Noël Dejean de la Bâtie

Adhérents : Philippe Brun

Idée principale : Lorsqu’une personne exerce une autorité sur une autre personne ou une chose, et que cette

personne ou chose cause un dommage de manière anormale, celui qui détient l’autorité doit en répondre sans

qu’il soit nécessaire de prouver une faute.

Expression-clé : La responsabilité civile est la « rançon de l’autorité ».

Critiques : La théorie est discutée, notamment en raison de son application limitée.


Bilan


Aucune théorie doctrinale ne permet à elle seule d’expliquer l’ensemble des mécanismes de la responsabilité

civile. Chaque théorie éclaire un aspect particulier :

- Théorie de la faute : responsabilité pour faute. - Théorie du risque-profit : responsabilité des commettants. - Théorie de l’autorité : responsabilité des parents.

Aujourd’hui : La responsabilité civile repose sur plusieurs fondements combinés, répondant aux divers cas de

dommages et préjudices.


§3 : L’avenir de la responsabilité civi

A) Les enjeux de demain


Renouveler les fonctions de la responsabilité civile : La place de la fonction préventive

Renforcer le rôle préventif de la responsabilité civile : Viser à prévenir des comportements fautifs et anticiper les

dommages à venir (Ex : pandémie, amiante, réchauffement climatique)


Principe de précaution :

- Inspiré de l’art 5 de la Charte de l’environnement et l’art L.200-1 du Code rural. - Principe émergent en droit français : le créateur d’un risque pourrait être condamné pour ne pas avoir pris les

mesures nécessaires, indépendamment de la réalisation effective du risque.

Limites : - Actuellement restreint à la matière environnementale. - S’impose uniquement au pouvoir public.

Piste de réflexion : Étendre ce principe à d’autres domaines.

Vers des préjudices objectifs ? Idée d’intégrer le principe dans le droit de la responsabilité civile pour que les

entreprises assument les risques de leurs activités.

Difficulté : repenser certaines conditions fondamentales, notamment la condition du préjudice.

Réorganiser le droit de l’indemnisation : La place de la responsabilité civile

Multiplication des régimes spéciaux et des fonds d’indemnisation :

Existence de fonds qui ne suivent pas le même schéma que la responsabilité civile.

Question : La responsabilité civile est-elle amoindrie par ces fonds ou faut-il lui redonner son importance ?

Mouvement vers une socialisation des risques.

Intégrer de nouveaux risques : Les préjudices environnementaux et ceux liés à l’IA

Préjudices environnementaux :

- Loi du 8 août 2016 : inscription du préjudice écologique dans le Code civil (articles 1246 et suivants). - Définition (art 1247) : atteinte non négligeable aux éléments ou fonctions des écosystèmes, ou aux bénéfices

collectifs tirés par l’homme de l’environnement.

Risques liés à l’IA :

- Identification de la personne responsable (ex. : véhicules autonomes). - Notion de “garde d’une chose dotée d’IA”. - Rôle de l’Union européenne : adoption future de deux directives pour encadrer ces enjeux.


B) Les projets de réfor

Du côté interne


Du côté européen


Interventions ciblées :

- Responsabilité civile intervenant dans le cadre de la libre circulation des biens et personnes. - Directive européenne 2024/2853 du 23 octobre 2024 : responsabilité du fait des produits défectueux

(révision de la directive de 1985). - Proposition de directive pour adapter les règles de responsabilité civile extracontractuelle au domaine de l’IA.


Sans titre

Introduction générale : qu’est-ce que la responsabilité civil


La notion d'obligation


La notion première en droit des obligations est celle d'obligation, définie comme le lien juridique par lequel une

ou plusieurs personnes, appelées « débiteurs », sont tenues d'une prestation envers une ou plusieurs autres

personnes, appelées « créanciers ».

Un droit de créance correspond au droit personnel d'exiger une prestation exécutée par une autre personne. Ce

droit personnel s'oppose au droit réel, qui met en relation une personne avec une chose.


Les sources des obligations


L'art 1110 CC énonce les trois sources des obligations : « Les obligations naissent d’actes juridiques, de faits

juridiques ou d’autorités de la loi. »

Ces sources peuvent être détaillées comme suit :

- L’autorité de la loi. - Les actes juridiques : il s'agit notamment du droit commun des contrats. - Les faits juridiques : - Licites : comprenant les quasi-contrats. - Illicites : donnant lieu à l'application de la responsabilité extracontractuelle.


Le quasi-contrat


Le quasi-contrat est une situation dans laquelle un fait volontaire entraîne l’enrichissement d’une personne au

détriment d’une autre, sans justification. L'article 1300 du Code civil le définit comme suit : « Un fait purement

volontaire dont il résulte un engagement de celui qui en profite sans y avoir droit et parfois un engagement de

leur auteur envers autrui. »

Les trois formes de quasi-contrats sont :

- La gestion d’affaire. - La répétition de l’indu. - L'enrichissement sans cause.


Section 1 : La nature de la responsabilité civile extracontr


La responsabilité est l'obligation de répondre d’un dommage devant la justice et d’en assumer les conséquences

civiles, pénales ou disciplinaires, soit envers la victime, soit envers la société.

La responsabilité civile est plus spécifiquement l’obligation de répondre civilement du dommage causé à autrui.

La réparation peut prendre deux formes :

- En nature (restauration directe de la situation initiale) - Par équivalent (versement d’une indemnisation)


§I : La distinction entre responsabilité civile et responsabilité

A) Les domaines distincts des responsabilités civile et péna


La distinction entre ces deux types de responsabilités a été formalisée avec la création du CC en 1804 par

Napoléon.


1) Le domaine de la responsabilité civile


Elle couvre tout fait quelconque, incluant l’imprudence, la négligence, et parfois des faits parfaitement

normaux.

Il existe aujourd’hui des régimes de responsabilité civile sans faute.

Le CC de 1804 distingue : - Le délit civil : fait volontaire ayant causé un dommage. - Le quasi-délit civil : fait d’imprudence ou de négligence ayant causé un dommage.

Les fonctions de la responsabilité civile

La responsabilité civile remplit une fonction principale et deux fonctions accessoires :

➜ La fonction principale : fonction indemnitaire

La responsabilité civile a pour but de réparer le dommage subi par la victime, ce qui en fait une fonction

réparatrice. Ex : Si la maison d’une personne est détruite par un incendie causé par un voisin, la responsabilité

civile permettra d’obtenir réparation

Le dommage est une condition essentielle de la mise en œuvre de la responsabilité civile.


➜ Première fonction accessoire : fonction punitive

Cette fonction est activée lorsque la responsabilité du défendeur est engagée pour un fait fautif qu’il a

commis.

Bien que l'objectif principal soit indemnitaire, l’indemnisation peut parfois être perçue comme une

sanction(notamment en cas de réparation élevée).

La responsabilité civile peut ainsi comporter un aspect punitif.

➜ Deuxième fonction accessoire : fonction préventive

Également appelée fonction prophylactique, elle vise à dissuader les individus de commettre des actes

dommageables.

La victime doit engager une action civile, ayant pour seul objet la réparation du préjudice subi.

En l’absence d’infraction pénale, mais en cas de quasi-délit ou de délit civil, l’action est intentée devant une

juridiction civile.

La sanction est toujours proportionnée à la gravité du préjudice, et non à la gravité de la faute.


2) Le domaine de la responsabilité pénale


Le domaine de la responsabilité pénale est plus restreint que celui de la responsabilité civile. Il se limite aux

seules infractions pénales définies par la loi : - Crimes - Délits - Contraventions

Une infraction pénale se compose de comportements considérés comme dangereux pour la société, prévus

et réprimés par la loi. Les principes fondamentaux incluent :

- Nullum crimen, nulla poena sine lege : il n’y a pas d’infraction sans texte. - Interprétation stricte de la loi pénale : le juge ne peut s’éloigner des incriminations définies par la loi.

Les fonctions de la responsabilité pénale diffèrent de celles de la responsabilité civile. Sa fonction principale est


la fonction répressive, qui vise à sanctionner les comportements dangereux. Cette fonction inclut trois sous-

fonctions :


- Punitive : Punir le coupable en raison de la faute pénale qu’il a commise. - Éliminatoire : Retirer le coupable de la société en raison de sa dangerosité, protégeant ainsi les autres

individus - Réadaptative : Réinsérer l’auteur de l’infraction pénale dans la société en le remettant sur le droit chemin.

Cette fonction est particulièrement valorisée dans les réformes récentes.

Les sanctions pénales ont pour objectif principal de protéger la société, ce qui les distingue des sanctions

civiles.

Peine d’emprisonnement : Elle reste l’exemple emblématique de sanction pénale.

Sanctions complémentaires : - Confiscation des biens ayant servi à commettre l’infraction (par exemple, en cas de trafic d’armes ou de

stupéfiants). - Interdictions professionnelles empêchant l’exercice de certaines activités.

Amende pénale (quid) : - L’amende pénale a une fonction différente de celle de l’amende civile. Elle vise à réparer l’atteinte causée à

la société. - Contrairement à une indemnisation civile, elle est versée au Trésor public et non à la victime. - Elle remplit également une fonction dissuasive.

La responsabilité pénale est déclenchée dans le cadre de l’action publique, menée par le ministère public

devant les juridictions répressives.


B) Les rapports entre responsabilité civile et responsabilité péna


Lorsqu’un dommage résulte d’un fait susceptible d’être pénalement réprimé, la victime dispose d’une option

pour exercer son action civile :

- Soit devant le juge civil. - Soit devant le juge pénal.

Le principe de l’autorité de la chose jugée au criminel sur le civil s’impose. Ainsi, les décisions pénales lient

le juge civil en ce qui concerne la qualification des faits.


1) L’exercice de l’action civil


L’exercice de l’action civile est prévu par l’art 3 CPP, tandis que l’art 2 du CPP en précise les bénéficiaires :

« L’action est reconnue à tous ceux qui ont personnellement souffert du dommage directement causé par

l’infraction. »


Comment s’exerce l’action civile devant le juge pénal ?


Deux voies sont possibles pour la victime :

- 1) Plainte avec constitution de partie civile : La victime initie directement une action pénale tout en demandant

réparation des préjudices subis. - 2) Intervention par voie d’action publique : La victime intervient après le déclenchement de l’action publique

par le ministère public.

Dans ce cas, le juge pénal suit un ordre précis : - Statuer d’abord sur l’action publique. - Ensuite, se prononcer sur l’action civile pour la réparation des dommages.

L’art 2 du CPP limite la compétence du juge pénal aux intérêts civils résultant directement des faits pénalement

sanctionnés. Le juge applique uniquement les règles de responsabilité pour faute, car l’infraction pénale

constitue déjà une faute civile. Il ne peut statuer sur d’autres régimes de responsabilité (ex. : responsabilité sans

faute). La reconnaissance de la culpabilité pénale est une condition préalable à l’indemnisation de la victime.

Exceptions au principe

Certaines situations permettent une indemnisation sans condamnation pénale :

- Art 372 du CPP (Cour d’assises) : Cour d’assises peut allouer des dommages-intérêts à la victime en cas

d’acquittement, mais uniquement sur le fondement de la responsabilité pour faute. - Art 470-1 du CPP (tribunal correctionnel) : En cas de relaxe dans une infraction non intentionnelle, la victime

peut être indemnisée selon les règles du droit civil.


Divergences historiques entre juge civil et pénal


Un préjudice par ricochet survient lorsqu’une personne subit un préjudice en raison du dommage direct infligé

à une autre personne.

- La chambre civile refusait d’accorder réparation au concubin(e) en cas de décès de leur partenaire. - La chambre criminelle, au contraire, reconnaissait ce droit au concubin(e).

Cette divergence a été tranchée par l’arrêt Ch. Mixte, 27 février 1970, Dangereux, qui consacre la position de

la chambre criminelle : le préjudice par ricochet des concubins peut être réparé.

Aujourd’hui, il n’y a plus de divergences majeures entre les chambres civile et criminelle devant la CCass.

Pourquoi la victime choisirait plutôt d’agir devant le juge pénal et non le juge civil ? Avantages pour la victime

d’agir devant le juge pénal :

- Contrainte pour le ministère public : En cas de plainte avec constitution de partie civile, le ministère public est

obligé de diligenter une enquête. Toutefois, il reste libre de poursuivre ou non. - Régime de la preuve : Procédure mixte devant le juge pénal : - Inquisitoire au stade de l’enquête : la charge de la preuve repose sur le ministère public. - Accusatoire au stade du jugement : la victime doit apporter les éléments de preuve nécessaires


2) L’autorité de la chose jugée au criminel sur le civ


L'autorité de la chose jugée au criminel sur le civil impose au juge civil de sursis à statuer, cad qu’il doit attendre

la décision définitive du juge pénal sur l’action publique avant de se prononcer. Ce principe est énoncé à l’art 4

CPP : « Le criminel tient le civil en l’état. »

Le juge civil est tenu de respecter ce principe lorsqu’il reprend une affaire déjà traitée par le juge pénal. Cela

signifie que ce qui a été jugé par le juge pénal s’impose au juge civil. Cette autorité est absolue et s’impose à

tous : justiciables comme juges.

Conséquences sur l’appréciation des fautes

- Identité des fautes pénales et civiles : Si le juge pénal conclut à une faute pénale, les mêmes faits

constituent également une faute civile. - Limites de cette identité : - Ce principe ne s’applique qu’en cas de condamnation pénale. - Le juge civil, bien que lié par la qualification de faute reconnue par le juge pénal, conserve sa liberté

d’apprécier le lien de causalité entre la faute et le préjudice. Ainsi, une reconnaissance de culpabilité pénale

n’impose pas nécessairement la reconnaissance d’une responsabilité civile.


Quid décision de relaxe ou acquittement


En l’absence de faute pénale intentionnelle

Lorsque le juge pénal ne retient pas de faute pénale intentionnelle, le juge civil n’est pas lié par cette décision. Il

peut alors retenir :

- Une faute civile d’imprudence ou de négligence. - Un régime de responsabilité sans faute, sans contredire la décision pénale.

Cela permet au juge civil de statuer en utilisant des régimes qui ne nécessitent pas l’intention coupable.

En cas de relaxe pour un délit non intentionnel

Le juge civil peut toujours retenir une faute civile d’imprudence ou de négligence, conformément à l’art 4-1 du

CPP, introduit par la loi dite « Fauchon ». Cette disposition lui reconnaît explicitement ce pouvoir.


C) Les rapprochements entre les responsabilités civile et péna


Depuis quelques années, les responsabilités pénales et civiles présentent des points de convergence. Le principal

élément de rapprochement réside dans la fonction de plus en plus punitive de la responsabilité civile. Doctrine et

législateur cherchent à renforcer cet objectif punitif.


Les dommages-intérêts punitifs : une notion discutée


Un débat important porte sur l’introduction des dommages-intérêts punitifs en droit français, concept déjà en

vigueur dans les pays de common law.

Définition : sont une somme d’argent versée à titre d’indemnisation, supérieure au montant du préjudice subi

par la victime.

But dans les pays de common law : ces sommes, parfois astronomiques, visent à punir les auteurs de fautes

lucratives, souvent commises par des entreprises à des fins d’enrichissement.

Bien que non intégrés au droit français, deux projets ont tenté de les introduire :

L’avant-projet « Catala » (2005) : - Intégration des dommages-intérêts punitifs pour les fautes lucratives. - Distinction avec les pays de common law : une partie des sommes serait reversée au Trésor public.

Le projet de réforme de la responsabilité civile (13 mars 2017) : Proposition d’introduire une amende civile,

intégralement versée au Trésor public.

Ces initiatives ont été abandonnées sous l’influence des lobbys.


La fonction réparatrice dans le cadre pénal


La réparation du dommage devient une préoccupation croissante, même en droit pénal. Deux exemples illustrent

cette tendance :

- Sanctions pénales à vocation réparatrice : Ex : En droit de l’environnement, certaines infractions sont

sanctionnées par la remise en état des lieux. - Réparation pénale pour les mineurs : au lieu d’une peine classique, il est possible d’imposer un module de

réparation, soit envers la victime, soit dans l’intérêt de la collectivité.

Malgré ces rapprochements, une fusion entre responsabilité civile et pénale semble impossible :

- Certaines situations nécessitent une réponse pénale que la justice civile ne peut satisfaire (ex : réprimer les

comportements dangereux comme les trafics d’armes ou d’êtres humains). - D’autres cas relèvent uniquement du domaine civil, sans justifier l’intervention du pénal (ex : atteinte à la vie

privée par une photographie volée)

La responsabilité civile concerne les rapports entre personnes privées. Si une personne publique est

impliquée, cela relève alors de la responsabilité administrative.

§2 : La distinction entre responsabilité contractuelle et responsabilité ex


A) Des domaines distinc


Responsabilité contractuelle Responsabilité extracontractuelle


Vise à sanctionner les manquements d'une partie à ses

obligations contractuelles. Elle s'applique spécifiquement

aux dommages survenus lors de l'exécution d’un contrat


Vise à réparer les dommages subis par une victime en

dehors de toute relation contractuelle. Ainsi, le dommage

doit être causé par un tiers extérieur au contrat.


L’adjectif « délictuel » désigne l’ancienne appellation de la responsabilité extracontractuelle. Pendant

longtemps, la faute était le seul fondement de la responsabilité civile, appelée alors « délit civil ». Par la suite, la

notion de quasi-délit a été introduite, admettant que la faute civile pouvait également être une imprudence ou

une négligence.

Pourquoi distinguer les deux responsabilités ? Bien que les règles applicables soient similaires dans les deux

cas, avec des sanctions identiques (DI), certaines différences notables justifient la distinction :


B) Le principe de non-cumul


Le principe de non-cumul interdit à la victime d’un dommage de choisir librement entre les deux régimes

de responsabilité. Ce principe signifie : - Le créancier contractuel doit se fonder sur la responsabilité contractuelle. - La victime d’un dommage causé par un tiers doit se fonder sur la responsabilité extracontractuelle.

Ce principe a été consacré par l’arrêt Civ. 11 janvier 1922 et réitéré régulièrement, comme dans l’arrêt Civ. 2e,

21 décembre 2023 dommages sur le parking d’un supermarché : - Si le conducteur a contracté avec le supermarché, la responsabilité contractuelle est retenue. - Si le conducteur est un tiers, la responsabilité extracontractuelle s’applique. - Si deux personnes sont dans le véhicule, l’une ayant contracté et l’autre non, la responsabilité contractuelle

s’applique à la première, et la responsabilité extracontractuelle à la seconde.

Frontières du principe de non-cumul


Période concernée : Les fautes pré-contractuelles (ex. dol, rupture abusive des pourparlers) et post-

contractuelles relèvent de la responsabilité extracontractuelle.


Personnes concernées : Principe de l’effet relatif des contrats : la responsabilité contractuelle ne s’applique

qu’entre les parties contractantes.

Ex 1 : Un créancier peut agir contre un tiers en responsabilité extracontractuelle si ce dernier a causé la

défaillance de son débiteur.

Ex 2 : Un passant blessé par l’effondrement d’un immeuble peut agir contre l’architecte en responsabilité

extracontractuelle, faute de contrat entre eux.

Ce principe garantit le respect des prévisions contractuelles entre les parties, en s’appuyant sur le principe de la

relativité contractuelle


C) Le principe de la relativité de la faute contr


Le principe de relativité de la faute contractuelle établit que seule une partie au contrat peut invoquer la

responsabilité contractuelle d’un cocontractant. La victime d’un dommage causé par un tiers ne peut se

prévaloir des règles de la responsabilité contractuelle, ni invoquer un recours fondé sur un manquement

contractuel à la place d’une faute civile.

Cependant, ce principe a été remis en cause par l’assemblée plénière de la CCass dans l’arrêt Bootshop Ass.

Plén., 6 octobre 2006 la Cour y affirme : « Le tiers à un contrat peut invoquer, sur le fondement de la

responsabilité délictuelle, un manquement contractuel, dès lors que ce manquement lui a causé un dommage. »

Ainsi, le tiers n’a plus à prouver l’existence d’une faute civile ; il peut directement se fonder sur le

manquement contractuel pour obtenir réparation. Cependant, des arrêts postérieurs, tels que ceux des 15

décembre 2011 et 18 mai 2017, semblaient exiger du tiers la preuve d’une faute civile, remettant en cause la

portée de l’arrêt Bootshop.

Compétence territoriale des juridictions Clauses limitatives de responsabilité

Matière contractuelle : la victime peut choisir entre la

juridiction du domicile du défendeur ou celle du lieu

d'exécution de l'obligation.


Matière contractuelle : ces clauses sont admises, sous

réserve de leur validité.


Matière extracontractuelle : la victime peut choisir entre le

domicile du défendeur ou celui du lieu de réalisation de

l’infraction (art 46 CPC)


Matière extracontractuelle : elles sont interdites Arrêt du 17

février 1955 : une clause limitative de responsabilité conclue

entre des participants à une compétition sportive a été

déclarée nulle


Finalement, s’agit-il de la remise en cause de l’arrêt Bootshop ou de l'ajout de critères nécessaires en

plus ?

CCass a clarifié sa position avec l’arrêt Bois Rouge Ass. Plén., 13 janvier 2020, confirmant la solution

Bootshop. Cet arrêt facilite l’indemnisation des tiers ayant subi un dommage en raison de la mauvaise

exécution d’un contrat

Critiques de la solution Bootshop :

- Atteinte au principe de l’effet relatif des contrats

Doctrine : « Le contrat ne produit des effets qu’à l’égard des parties ».

Réponse de la Cour : Le contrat reste opposable au tiers (art. 1200 CC), donc aucun manquement au principe.

- Injustice envers les contractants :

Les tiers ne sont pas soumis aux clauses contractuelles (ex. : clause limitative de responsabilité).

Cette asymétrie crée un déséquilibre au détriment des contractants.

En juillet 2024, la chambre commerciale de la Cour de cassation a introduit un ajustement à la solution

Bootshop (Com., 3 juillet 2024, Clamageran). Elle énonce : « Le tiers d’un contrat qui invoque, sur le

fondement de la responsabilité contractuelle, un manquement contractuel qui lui a causé un dommage peut se

voir opposer les conditions et limites de la responsabilité applicables entre les contractants. » Cette nouvelle règle

vise à :

- Ne pas déjouer les prévisions des parties. - Ne pas conférer aux tiers une position plus avantageuse que celle des parties contractantes.

Cependant, cette solution crée une incertitude quant à son application future, car elle émane uniquement de la

chambre commerciale et non des chambres civiles.

Les projets de réforme de la responsabilité civile envisagent une remise en cause de la jurisprudence

Bootshop en introduisant un art 1234 en deux alinéas : - Rappel du principe classique : Le tiers à un contrat doit se fonder sur la responsabilité extracontractuelle et

prouver une faute civile. - Exception pour les intérêts légitimes :

Un tiers ayant un intérêt légitime dans la bonne exécution du contrat pourrait se fonder sur la responsabilité

contractuelle.

Les clauses limitatives de responsabilité lui seraient alors opposables.

Cette réforme chercherait à concilier sécurité juridique et prévisions contractuelles, tout en clarifiant les

frontières entre responsabilité contractuelle et extracontractuelle.

D) La remise en cause de la distinc

1) Par le législate


Le législateur a instauré des régimes de responsabilité qui transcendent la distinction entre responsabilité

contractuelle et extracontractuelle. Ces régimes s’appliquent indépendamment de la nature de la relation entre

l’auteur et la victime du dommage.

Exemples : - Loi Badinter (1985) : régime d’indemnisation des accidents de la circulation. - Responsabilité du fait des produits défectueux (1998) : mise en place de règles spécifiques pour les

produits dangereux. - Responsabilité en matière de professionnels de santé : régulation spécifique aux dommages causés dans

ce domaine.


2) Par le juge


Le juge, principalement pénal, a également contribué à cette remise en cause. Depuis l’arrêt Crim., 15 juin 1923,

lorsqu’il statue sur une action civile, même en présence d’un contrat, il applique uniquement les règles de la

responsabilité extracontractuelle.

Quid de la distinction dans les projets de réforme ?

Les projets de réforme maintiennent la distinction entre responsabilité contractuelle et extracontractuelle tout en

introduisant des modifications.

Modifications formelles : - Création de dispositions communes. - Organisation distincte des règles spécifiques à la responsabilité contractuelle et extracontractuelle.

Modifications de fond :


Atténuation du principe de non-option : E : la proposition de loi sénatoriale du 29 juillet 2020 permettrait à

une victime de se fonder sur la responsabilité extracontractuelle en cas de dommage corporel, même si elle est

partie au contrat.

Pourquoi ? Permettre à la victime d’échapper à une clause limitative de responsabilité insérée dans le contrat.

Ces ajustements visent à répondre aux critiques de rigidité des régimes actuels tout en préservant une structure

cohérente entre les deux types de responsabilité.


Section 2 : L’évolution de la responsabilité civile extracon

§1 : La construction de la responsabilité civile dans et hors du Code ci


A) Avant le Code civil de 1804


La responsabilité civile trouve ses origines dans l’ancien droit. Pendant longtemps, elle était confondue avec la

responsabilité pénale. Principe de vengeance privée :

- Ce principe régnait lors des invasions barbares (du Ve siècle av. J.-C. au début du XIIe siècle ap. J.-C.). - La sanction de l’auteur était confondue avec la réparation due à la victime. - La responsabilité était collective : elle incombait au clan auquel appartenait l’individu responsable. - La victime était également représentée par son clan. - La réparation se faisait entre clans, et non entre individus.

À partir des XIIIe et XIVe, les mécanismes de réparation évoluent : - Système volontaire : Les clans déterminaient ensemble la somme d’argent que l’auteur devait à la victime. - Système forcé : La loi imposait une somme en fonction de la faute commise (ex : la loi salique prévoyait le

versement d’une somme d’argent à la victime, évaluée selon la gravité de la faute)

Évolution au Moyen Âge (Ve- XIe)

Séparation progressive de la responsabilité civile et pénale

Cette séparation est le fruit d’influences multiples :

➜ Droit romain

Bien que son influence soit limitée, le droit romain a laissé des traces dans la construction de la responsabilité

civile. Le terme de « responsabilité » n’existait pas, mais des notions comme respondere (obligation de se porter

garant) dérivaient de sponsio ou sponsor (débiteur).

La réparation des dommages reposait non sur la faute, mais sur la recherche d’un équilibre entre les biens des

différentes familles. Si cet équilibre était rompu, il fallait le rétablir par un mécanisme de réparation.

➜ Christianisme et canonistes

L’influence judéo-chrétienne, majeure, a donné à la responsabilité civile une forte coloration morale. La faute de

l’auteur est devenue la cause justifiant l’engagement de la responsabilité. Deux évolutions importantes en

découlent :

- La responsabilité devient subjective, fondée sur la faute (un fait subjectif). - La responsabilité devient individuelle : seule la personne ayant commis la faute doit réparer le dommage

causé à la victime.

Les bases de la responsabilité civile ont été théorisées par Domat, qui s’inspirait des travaux de Grotius. Ces

théories ont influencé les rédacteurs du Code civil, qui en ont repris les principes pour structurer le droit de la

responsabilité civile.


B) Dans le Code Civil de 1804

La philosophie du Code civil de 1804 repose sur un triptyque :


Universalisme Moralisme Individualisme

Le Code introduit un principe général

de responsabilité, sans délits spéciaux.

Contrairement au droit romain, qui

distinguait délit et quasi-délit de

manière très spécifique.


La faute joue un rôle central dans

l’engagement de la responsabilité.


La responsabilité est engagée au niveau

de l’individu et non d’entités collectives

comme la famille, le clan ou l’État


La responsabilité définie en 1804 repose sur la faute personnelle, avec une mise en avant des articles suivants :


Ces articles, devenus articles 1240 et 1241 aujourd’hui, conservent la même formulation. La faute, qu’elle soit

légère, d’imprudence ou de négligence, reste le fondement de la responsabilité.

Les textes reflètent une vision humaniste selon laquelle :

- L’homme est libre et doué de raison. - Cette raison lui permet d’éviter les fautes. - Lorsqu’une faute est commise, l’individu doit en assumer les conséquences en réparant le dommage causé.

Cette philosophie imprègne également l’ancien article 1384 (aujourd’hui article 1242), qui étend la

responsabilité aux dommages causés par : - les personnes sous sa garde (ex : les parents sont responsables des dommages causés par leurs enfants

mineurs, en raison d’un défaut de surveillance ou d’éducation) - Les préposés et commettants : L’employeur est responsable des fautes commises par ses employés dans

l’exercice de leurs fonctions.

En 1804, la responsabilité civile s’inscrit dans une société qui accepte les aléas de la vie : - Certains dommages ne résultent pas d’une faute humaine. - Ces dommages ne doivent pas être réparés : la victime les supporte seule.

Au cours de la période contemporaine, cette conception a évolué pour mieux prendre en compte les situations

où les victimes ne sont pas responsables, mais supportent néanmoins les conséquences des dommages subis.


C) Après le Code civil de 1804


La révolution industrielle, qui débute à la fin du XIXe siècle, entraîne l'apparition de risques nouveaux liés au

développement du machinisme.

Exemples de risques : - Accidents industriels causés par des défaillances de machines. - Accidents de la circulation.

Problème :

- La responsabilité fondée sur la faute, telle qu’établie en 1804, s’avère inadaptée à ces nouveaux risques. - Les victimes, comme les ouvriers ou les piétons, ne parviennent souvent pas à prouver la faute du propriétaire

de la machine ou du véhicule.

Contexte social : La société tolère de moins en moins les dommages fortuits.

Face à l'inaction du législateur, la jurisprudence joue un rôle crucial en réinterprétant les textes du Code civil pour

s’adapter à ces évolutions.


1) La place de la jurisprudence


Philippe Brun affirme que « le XXe siècle est le siècle des grands arrêts de la jurisprudence de la responsabilité

civile »


a) L’objectivation de la responsabilité civ


À l’époque, les victimes, incapables de prouver une faute, ne pouvaient pas obtenir réparation. La jurisprudence a

donc développé des régimes de responsabilité sans faute, également appelés responsabilité objective ou

responsabilité de plein droit.

Arrêt Teffaine 16 juin 1896, chambre civile, CCass : - Faits : Explosion d’une machine à vapeur sur un bateau, causant le décès d’un ouvrier. La famille ne parvient

pas à prouver la faute de l’armateur (propriétaire). - Décision : Création d’un cas de responsabilité du fait des choses sans faute, fondé sur l’art 1384 al 1er CC - Principe : Le gardien d’une chose est responsable des dommages causés, même en l’absence de faute.

Transformation des régimes de responsabilité du fait d’autrui en responsabilité sans faute

Ancien article 1382 Ancien article 1383


« Tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un

dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé, à le

réparer. »


« Chacun est responsable du dommage qu'il a causé non

seulement par son fait, mais encore par sa négligence ou par

son imprudence. »


Responsabilité des pères et mères :

Avant 1984, ils pouvaient s’exonérer en prouvant qu’ils n’avaient commis ni faute d’éducation ni faute de

surveillance.

Depuis 1984 : Les parents sont systématiquement responsables des dommages causés par leur enfant mineur,

sans possibilité d’exonération.

Responsabilité des commettants : Sujette à la même évolution.


b) Le développement des chefs de préjudice réparables


Une lacune du Code civil de 1804 réside dans l’absence de définition du dommage. Cette omission a permis à la

jurisprudence de déterminer au cas par cas les préjudices indemnisables. Exemples d’admission progressive de

nouveaux chefs de préjudice :

- Arrêt Dangereux (1970) : Reconnaissance du préjudice par ricochet pour une concubine. - Affaire du Cheval Lunus (1962) : Réparation du préjudice d’affection lié à la perte d’un animal.

- Arrêt du 22 février 1995, 2e chambre civile : Admission du préjudice moral d’une personne dans le coma,

marquant un revirement de jurisprudence.

- Arrêt du 11 février 2021, 2e chambre civile : Reconnaissance du préjudice d’affection d’un enfant à naître

pour la perte d’un grand-parent décédé avant sa naissance.

Préjudice d’angoisse de mort imminente : Préjudice moral ressenti par une victime consciente de sa mort

imminente, notamment dans des cas d’attentats.

La nomenclature Dintilhac propose une liste des préjudices patrimoniaux et extrapatrimoniaux liés à des

dommages corporels. Caractéristiques :

- Non normative et non exhaustive. - Outil pratique utilisé par les juges du fond. - Permet l’indemnisation de préjudices spécifiques, comme le préjudice d’anxiété (stress lié à une exposition à

un produit dangereux, avec un risque accru de maladie future).

2) Les interventions législa

Introduction de cas de responsabilité sans faute par le législateur

➜ Régime d’indemnisation des accidents du travail

Loi du 9 avril 1898 : - Instauration d’une responsabilité automatique de l’employeur en cas d’accident du travail, même pour les

accidents fortuits (non liés à une faute de l’employeur). - En contrepartie de cette responsabilité automatique, le salarié ne bénéficie pas d’une indemnisation intégrale,

mais d’une compensation forfaitaire de ses préjudices.

➜ Régime d’indemnisation des accidents de circulation

Loi Badinter du 5 juillet 1985 : - Instauration d’un régime de responsabilité sans faute. - Le conducteur est responsable des dommages causés par l’accident, même si aucune faute ne peut lui être

reprochée.

➜ Régime de responsabilité du fait des produits défectueux

Loi du 19 mai 1998 : Le producteur d’un produit défectueux est tenu responsable, même en l’absence de faute de

sa part.

➜ Création de fonds de garantie : Mise en place de multiples fonds d’indemnisation pour couvrir des dommages

lorsqu’il est impossible d’identifier l’auteur du préjudice.

➜ Inscription du préjudice écologique dans le Code civil

Loi du 8 août 2016 : Reconnaissance spécifique du préjudice écologique, permettant sa réparation.


3) La collectivisation de la responsabilité c


La collectivisation désigne le transfert de la charge de l’indemnisation d’un individu à la collectivité.

Origine de ce mouvement

Alourdissement de la charge de responsabilité :

- Augmentation des cas où la responsabilité est recherchée. - Montée significative des montants des dommages et intérêts.

Conséquence : Les individus ne peuvent plus supporter seuls les charges liées à l’indemnisation des victimes.

Rôle de l’assurance de responsabilité

- Moyennant une prime, une personne voit sa responsabilité civile couverte par un assureur.


- Le patrimoine personnel de l’assuré n’est pas engagé ; c’est l’assureur qui prend en charge la dette de

responsabilité. - L’assureur finance ces indemnisations grâce aux primes collectées auprès de l’ensemble de ses assurés.


La « crise de croissance » de la responsabilité civile


L’évolution des mécanismes d’indemnisation est favorable aux victimes, permettant une réparation quasi-

systématique des dommages. Toutefois, une partie de la doctrine critique cette croissance rapide.


La critique doctrinale

- Philippe Brun : Parle d’une « crise de croissance » de la responsabilité civile, résultant d’une expansion

exponentielle des régimes de responsabilité. - Lambert-Faivre : - Relie cette expansion à la collectivisation de la responsabilité, qui incite les juges à multiplier les préjudices

indemnisables. - Évoque un « passage d’une dette de responsabilité à une créance d’indemnisation ».

Changement d’objectif de la responsabilité civile


Objectif initial : Sanctionner l’auteur d’un fait fautif, en se focalisant sur les causes du dommage.

Objectif contemporain : - Réparer les dommages en mettant l’accent sur les conséquences et la finalité. - La fonction indemnitaire est désormais prioritaire.

Points de vue doctrinaux

- M. Mekki : Affirme que, dans le cadre de la responsabilité civile, c’est la finalité qui justifie les moyens. - L. Cadiet : Développe des analyses complémentaires sur la transformation des fonctions et des enjeux de la

responsabilité civile.


§2 : Les fondements de la responsabilité civile vus par la doct


La question des fondements de la responsabilité civile est théorique, mais essentielle : pourquoi déplacer la

charge du dommage de la victime à un tiers ?

Les fondements permettent de comprendre pourquoi un régime de responsabilité existe et ce qui justifie que ce

soit un tiers, et non la victime, qui assure la réparation.

Le fait générateur est central : il peut s’agir d’une faute, mais aussi d’autres faits, comme le fait d’un enfant.

Selon Philippe Brun, le fait générateur est défini comme « un fait ou un acte révélant un caractère d’anormalité

ou de défectuosité, constitutif d’un trouble social ». Ce fait justifie l’engagement de la responsabilité civile et

donc l’indemnisation. Sans fait générateur, c’est la victime qui supporte seule son dommage.


A) La responsabilité fondée sur la


C’est la théorie la plus ancienne, consacrée par le Code civil de 1804, qui fonde la responsabilité uniquement sur

la faute.

- Si un tiers supporte l’indemnisation, c’est uniquement en raison de sa faute. - En l’absence de faute, il n’est pas responsable.

Caractéristiques :

Conception subjective de la responsabilité civile : Défendue par des auteurs du XXe comme Planiol, qui

considère que la recherche de la faute doit être un réflexe pour le juge. Ripert estime que la victime d’un

dommage fortuit doit en supporter seule les conséquences.

Bien que cette théorie soit encore défendue, l’apparition de régimes de responsabilité sans faute a conduit à

chercher d’autres fondements à la responsabilité civile.

B) La théorie du ri


Développée par Saleilles et Josserand à la fin du XIXe, cette théorie s’appuie sur l’essor du machinisme et des

difficultés à prouver la faute.

Principe : les auteurs estiment qu’il n’est pas acceptable que les dommages causés par des accidents industriels et

de circulation restent à la charge des victimes. Ils prônent une obligation d’assumer la charge des risques

engendrés par une activité humaine, si celle-ci est source de profit.

Théorie du risque-profit : - Le propriétaire d’une chose doit être responsable des dommages causés par celle-ci, car il est à l’origine du

risque créé au détriment d’autrui. - Ce propriétaire est désigné comme le gardien de la chose.


La théorie est guidée par l’équité : celui qui s’enrichit grâce à une activité doit en assumer les risques.

Adoption avant l’arrêt Teffaine : Dans cet arrêt, la responsabilité de l’armateur est retenue en raison du risque

lié à son activité, l’obligeant à supporter les dommages subis par son ouvrier.

Critiques : - Frein au développement : peur des conséquences des innovations, pouvant décourager la recherche et

l’innovation. - Privation de la fonction préventive de la responsabilité civile : pour certains, cette fonction n’existe qu’en

présence d’une faute.

Malgré les critiques, cette théorie a joué un rôle majeur dans l’évolution de la responsabilité civile.


C) La théorie de la ga


Développée par Boris Starck (1947), contrairement aux autres théories, celle-ci se concentre sur la victime et

non sur l’auteur du dommage.

Fondements :

- Chaque personne a droit au respect de sa vie, de son intégrité corporelle et de ses biens. - L’atteinte à ce droit implique réparation. - La responsabilité civile repose sur le droit à la sécurité matérielle et morale.

Distinction selon l’atteinte subie :

- Atteinte à l’intégrité corporelle ou matérielle (responsabilité objective) : Réparation possible sans faute. (Ex :

destruction du vélo d’un cycliste victime) - Atteinte aux intérêts moraux ou économiques (responsabilité subjective) : Réparation fondée sur la faute. (Ex :

perte de salaire liée à une hospitalisation)

Critiques : - Théorie imprécise, n’expliquant pas pourquoi certains préjudices sont plus dignes d’indemnisation. - Ne correspond pas au droit positif français, qui ne hiérarchise pas les intérêts protégés. - Risque d’immobilisme et indifférence au pouvoir du responsable d’empêcher le dommage.


D) La responsabilité fondée sur l’a


Développée par : Noël Dejean de la Bâtie

Adhérents : Philippe Brun

Idée principale : Lorsqu’une personne exerce une autorité sur une autre personne ou une chose, et que cette

personne ou chose cause un dommage de manière anormale, celui qui détient l’autorité doit en répondre sans

qu’il soit nécessaire de prouver une faute.

Expression-clé : La responsabilité civile est la « rançon de l’autorité ».

Critiques : La théorie est discutée, notamment en raison de son application limitée.


Bilan


Aucune théorie doctrinale ne permet à elle seule d’expliquer l’ensemble des mécanismes de la responsabilité

civile. Chaque théorie éclaire un aspect particulier :

- Théorie de la faute : responsabilité pour faute. - Théorie du risque-profit : responsabilité des commettants. - Théorie de l’autorité : responsabilité des parents.

Aujourd’hui : La responsabilité civile repose sur plusieurs fondements combinés, répondant aux divers cas de

dommages et préjudices.


§3 : L’avenir de la responsabilité civi

A) Les enjeux de demain


Renouveler les fonctions de la responsabilité civile : La place de la fonction préventive

Renforcer le rôle préventif de la responsabilité civile : Viser à prévenir des comportements fautifs et anticiper les

dommages à venir (Ex : pandémie, amiante, réchauffement climatique)


Principe de précaution :

- Inspiré de l’art 5 de la Charte de l’environnement et l’art L.200-1 du Code rural. - Principe émergent en droit français : le créateur d’un risque pourrait être condamné pour ne pas avoir pris les

mesures nécessaires, indépendamment de la réalisation effective du risque.

Limites : - Actuellement restreint à la matière environnementale. - S’impose uniquement au pouvoir public.

Piste de réflexion : Étendre ce principe à d’autres domaines.

Vers des préjudices objectifs ? Idée d’intégrer le principe dans le droit de la responsabilité civile pour que les

entreprises assument les risques de leurs activités.

Difficulté : repenser certaines conditions fondamentales, notamment la condition du préjudice.

Réorganiser le droit de l’indemnisation : La place de la responsabilité civile

Multiplication des régimes spéciaux et des fonds d’indemnisation :

Existence de fonds qui ne suivent pas le même schéma que la responsabilité civile.

Question : La responsabilité civile est-elle amoindrie par ces fonds ou faut-il lui redonner son importance ?

Mouvement vers une socialisation des risques.

Intégrer de nouveaux risques : Les préjudices environnementaux et ceux liés à l’IA

Préjudices environnementaux :

- Loi du 8 août 2016 : inscription du préjudice écologique dans le Code civil (articles 1246 et suivants). - Définition (art 1247) : atteinte non négligeable aux éléments ou fonctions des écosystèmes, ou aux bénéfices

collectifs tirés par l’homme de l’environnement.

Risques liés à l’IA :

- Identification de la personne responsable (ex. : véhicules autonomes). - Notion de “garde d’une chose dotée d’IA”. - Rôle de l’Union européenne : adoption future de deux directives pour encadrer ces enjeux.


B) Les projets de réfor

Du côté interne


Du côté européen


Interventions ciblées :

- Responsabilité civile intervenant dans le cadre de la libre circulation des biens et personnes. - Directive européenne 2024/2853 du 23 octobre 2024 : responsabilité du fait des produits défectueux

(révision de la directive de 1985). - Proposition de directive pour adapter les règles de responsabilité civile extracontractuelle au domaine de l’IA.

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