Montesquieu, dans De l'esprit des lois, préconise une grande prudence lorsqu’il s'agit de modifier les lois. Selon lui, les lois sont le fondement même de la société et garantissent l'ordre, la stabilité et la justice. Les changer trop fréquemment ou de manière arbitraire risque de déstabiliser la société et de miner le respect des citoyens envers les institutions. En effet, les lois sont le fruit d’une longue histoire et doivent être modifiées avec une compréhension approfondie de leur origine, de leur fonction et de leurs effets. La prudence est, pour Montesquieu, une vertu politique fondamentale, et toute modification législative doit être effectuée avec humilité et réflexion, d’où l’expression « main tremblante ».
Carré de Malberg, dans Contribution à la théorie générale de l'État, introduit la distinction entre le pouvoir constituant et les pouvoirs constitués, qui est au cœur de sa réflexion. Le pouvoir constituant est celui qui est à l’origine de la Constitution et qui est souverain, sans être soumis à des normes préexistantes. Il est créateur et fondateur de l'ordre juridique. En revanche, les pouvoirs constitués, qui découlent de la Constitution, sont soumis à celle-ci et doivent respecter ses prescriptions. Cette distinction met en lumière le rôle prééminent du pouvoir constituant, qui est indépendant et supérieur aux pouvoirs institués.
Cette analyse a une grande importance, car elle fonde la légitimité de l'État et du droit. Le pouvoir constituant, représentant la volonté populaire ou nationale, est la source de tout l'ordre juridique, tandis que les pouvoirs constitués, tels que le gouvernement ou le Parlement, tirent leur validité de la Constitution. Cette hiérarchie des normes explique pourquoi les pouvoirs constitués sont limités dans leur capacité à modifier la Constitution.
Dmitri-Georges Lavroff, dans son analyse de la constitutionnalisation du pouvoir, met en avant l’importance d’une Constitution qui soit brève, générale et non alourdie de dispositions superflues. Selon lui, pour éviter que la Constitution ne devienne un instrument de politique politicienne, elle doit être concise et bien définie. L’exemple de la Constitution américaine de 1787, avec ses sept articles, illustre ce modèle.
Lavroff insiste également sur le fait que la Constitution ne doit pas être un texte constamment modifié pour des raisons politiques immédiates. Elle doit encadrer le pouvoir de manière générale, sans céder aux pressions des médias ou des groupes d’intérêt. Enfin, il souligne la nécessité de préserver la pratique démocratique pour éviter que la Constitution ne soit dévoyée et qu’elle ne serve de prétexte à des manipulations politiques.