Le médecin légiste est souvent appelé en consultation médico-légale dans un service hospitalier pour examiner sur réquisition, une victime blessée par arme blanche.
Chap 15 : Les armes blanches
I. Définition
Définition
La lésion entraînée par un instrument tranchant est une plaie linéaire à bord net avec séparation des berges. Cela va nécessiter un soin de rapprochement par colle biologique, par suture ou par steri-strip. C’est contraire à l’estafilade qui ne comporte pas d’écartement des berges. L’aspect des extrémités de la plaie va dépendre du tranchant de la lame ; par exemple, le couteau de cuisine donne deux extrémités de la plaie asymétrique, l’une qui est effilée (tranchant) et l’autre d’aspect mousse. Si le couteau est à double fil tranchant (ex : dague) alors la plaie aura deux extrémités effilées. Dans les affaires criminelles, on voit plutôt des couteaux qui traversent la peau en profondeur. Plus la plaie est longue sur la peau, plus elle est superficielle mais plus elle est petite, plus elle est grave car le couteau a traversé.
La taille des blessures : quand on voit une plaie sur la peau, la longueur de la plaie va correspondre à la largeur de la lame. Parfois, le trajet d’une lame à l’intérieur d’un corps peut être supérieur à la longueur de la lame car certains endroits du corps sont dépressibles (ex : le ventre et le cou). La lame peut aller au-delà de sa propre longueur. La longueur de la plaie ne donne qu’une information sur la largeur de la lame, pour ce qui est de la longueur du trajet inter-corporel, cela relève de l’autopsie.
II. A l'autopsie
La dissection permet d’estimer la longueur de la lame introduite dans le corps. On utilise une tige libre (= une longue aiguille à tricoter) que le médecin entre dans la plaie et il suit tous les organes traversés par le couteau jusqu'à l’endroit le plus profond. Il va mettre un petit clip sur la tige avant de la sortir et de mesurer la longueur entre le clip et l'extrémité de la tige. Parfois, cette distance est plus longue que la lame elle-même lorsque la zone est dépressible.
III. Aux assises
il y a souvent une question sur la force du coup. La violence du coup est caractérisée en fonction de trois choses :
- l’instrument tranchant : un couteau pointu à lame bien aiguisée va pénétrer plus facilement les tissus et les organes qu’un couteau à pointe et à la lame émoussée
- la nature de la couche de vêtement : une veste en cuir épais offrira une résistance plus grande qu’un simple t-shirt
- la fonction du siège corporel de la blessure : le couteau va pénétrer plus facilement quand elle entrera dans une zone dépourvue d’os dense. Franchir une côte avec un couteau nécessite de vaincre la résistance de l’os et donc d’imprimer une certaine force au couteau et au manche, par contre un tissu mou va offrir moins de résistance.
La durée de survie : aux Assises, au-delà de la force nécessaire, on demande au médecin légiste de se positionner sur la durée de survie. Est-ce qu’en dépit de ses blessures profondes et hémorragiques par arme blanche la victime a pu survivre un certain temps ? Est-ce qu’elle a pu prendre conscience de son état ? Lorsque l’on a une plaie profonde et hémorragique, il y a une perte de sang importante. Ainsi, il y a une perte de globule rouge et d’oxygénation du cerveau. C'est pourquoi la personne peut très rapidement sombrer dans un état d’inconscience avant même l’arrêt cardiaque. Donc, la personne peut ne pas avoir forcément conscience tout le long de son agression de la gravité de ses blessures. Par contre, pour ce qui est de la possibilité de poursuivre une activité physique comme se mouvoir, cette possibilité est fonction de l’organe lésé, le décès est rapide en cas de section d’un gros vaisseau (ex : carotide, aorte, artère fémorale). Un décès peut être retardé en cas de plaie cardiaque du ventricule gauche car, à chaque contraction la plaie se referme et à chaque relâchement du cœur le sang fuite dans cette péricardite. Le cœur est entouré d’un sac appelé le péricarde et au bout d’un moment, il y a un arrêt cardiaque.
Le temps de survie peut aussi être fonction de la quantité de sang perdu et de la rapidité de la perte de sang. S’il y a plusieurs plaies associées, chaque plaie va entraîner une hémorragie et toutes ces hémorragies vont précipiter la mort et réduire le temps de survie. En cas de plaies multiples par arme blanche sur une même victime, il n’est pas possible de fixer avec précision la chronologie des blessures. Dans la plupart des homicides, les plaies sont infligées dans un temps bref. Les plaies les plus hémorragiques vont précéder les plaies peu ou plus hémorragiques. En effet, plus les plaies vont saigner, plus le cœur va s’affaiblir et moins, les plaies vont devenir hémorragiques au fil du temps.
IV. Principe de datation
La datation d’une blessure se fait en fonction de l’infiltration des globules blancs. Ces derniers vont se déplacer sur le lieu de la plaie, ils sont impliqués dans les processus de cicatrisation. Le déplacement de globule blanc sur les lieux de création d’une plaie est appelé “réaction inflammatoire”. La réaction inflammatoire ne se produit que du vivant de la victime. Les ecchymoses changent de coloration qu’à condition que la victime soit vivante. La mort fige tout.
Combien de temps faut-il pour que les globules blancs se déplacent sur les lieux de création de la blessure ? Généralement, cela se fait en trente minutes. Or, dans une affaire d’homicide, le délai de survie est bien inférieur à trente minutes pour la victime
V. Les circonstances de de ces par arme blanche
- les suicides par arme blanche sont peu fréquents, c’est plutôt une tentative de suicide au moyen d’un couteau ou d’une lame de rasoir sur le poignet (= tentative de phlébotomie). Ce geste va précéder la pendaison, le suicide médicamenteux ou la noyade.
- la plaie par égorgement : Dans la plupart des cas, l’agresseur se trouve derrière la victime. Il va tirer la tête de la victime par l’arrière pour exposer la gorge de la victime au couteau. L’incision va démarrer du côté opposé à la main qui tient le couteau soit le côté gauche si le meurtrier est un droitier. Plus précisément, l’incision démarre du côté opposé à la main qui tient l’arme sur le haut de la face latérale du cou en-dessous de l’oreille puis se prolonge sur la face antérieure c'est-à-dire sur le devant du cou où l’arme va sectionner le larynx et la trachée. Le mouvement se termine sur la face latérale opposée du cou avec un terrain de terminaison qui va être plus bas que le point de démarrage. C'est souvent au niveau du démarrage que l’on va trouver la plaie la plus profonde qui va toucher la veine jugulaire et l’artère carotide. La veine jugulaire est en surface donc c'est un organe vasculaire qui est beaucoup plus vulnérable que l’artère carotide qui est plus en profondeur.