Fondements, composition, enjeux budgétaires et fiscaux dans un État moderne
Introduction – Des ressources au service de l’action publique et de l’intérêt général
L’État exerce des missions fondamentales : sécurité, justice, éducation, culture, transition écologique, solidarité… Pour les mettre en œuvre, il a besoin de ressources financières stables, diversifiées et légitimes.
Ces ressources forment le budget de l’État, inscrit chaque année dans la loi de finances, et encadré par des principes constitutionnels et européens.
Dans un contexte de contrainte budgétaire durable, de déficit structurel, de défi écologique et de pression sur le consentement à l’impôt, la nature, la gestion et la stratégie de mobilisation des ressources publiques sont des enjeux politiques majeurs, au cœur du pilotage de l’action de l’État.
I. Une typologie classique : des ressources fiscales et non fiscales encadrées par des principes fondamentaux
A. Les ressources fiscales : pilier historique et dominant
1. Définition : les ressources fiscales sont des prélèvements obligatoires sans contrepartie directe, affectés au budget de l’État.
2. Principaux impôts d’État :
• Impôt sur le revenu (IRPP) : progressif, payé par les personnes physiques.
• Impôt sur les sociétés (IS) : payé par les entreprises sur leurs bénéfices.
• Taxe sur la valeur ajoutée (TVA) : principal impôt en volume (plus de 50 % des recettes fiscales nettes).
• Droits d’accises et taxes indirectes (alcool, tabac, carburants).
• Impôt sur la fortune immobilière (IFI).
• Prélèvements affectés à l’UE.
En 2023, les recettes fiscales nettes du budget de l’État s’élèvent à environ 300 milliards d’euros.
3. Encadrement constitutionnel :
• Principe de légalité de l’impôt (art. 34 de la Constitution) : seul le Parlement peut créer, modifier ou supprimer un impôt.
• Principe d’égalité devant l’impôt.
• Principe d’annualité : les ressources doivent être autorisées chaque année.
• Principe de non-affectation (sauf exceptions) : les recettes fiscales alimentent un budget général.
B. Les ressources non fiscales : diversifiées mais plus limitées
1. Recettes domaniales :
• Produits des loyers, ventes ou concessions du domaine public ou privé de l’État (forêts, bâtiments, concessions portuaires ou culturelles…).
2. Dividendes et participations :
• Revenus des entreprises publiques ou des participations de l’État dans des entreprises stratégiques (EDF, SNCF, Aéroports de Paris…).
3. Produits de la vente de biens ou services :
• Billetterie, publications, redevances de concession, vente d’objets dérivés dans les établissements culturels publics.
4. Amendes, sanctions financières, confiscations :
• Recettes judiciaires ou administratives.
Ces recettes sont moins stables, plus conjoncturelles, mais peuvent être stratégiques pour certains opérateurs culturels ou établissements publics.
II. L’élaboration et la gestion des ressources dans le cadre budgétaire de l’État
A. La loi de finances : cadre d’autorisation annuel
• La loi de finances initiale (LFI) fixe chaque année :
• le plafond des recettes fiscales attendues,
• les hypothèses macroéconomiques (croissance, inflation…),
• la répartition des crédits par mission et programme.
• Son adoption suit une procédure encadrée par la LOLF, avec :
• projet du gouvernement, soumis au Conseil d’État puis au Parlement,
• vote du Parlement en deux parties (recettes puis dépenses),
• loi de règlement en fin d’exercice, pour constater les résultats.
B. Les prélèvements obligatoires dans la stratégie publique
• La France présente un taux de prélèvements obligatoires parmi les plus élevés d’Europe (environ 45 % du PIB).
• L’État doit équilibrer :
• les besoins de financement (investissements, services publics, transition),
• le niveau d’acceptabilité sociale et économique de l’impôt.
• Cela suppose :
• une réflexion permanente sur la justice fiscale,
• une lutte contre l’évasion et la fraude fiscale,
• une stratégie d’optimisation de la dépense publique (logique LOLF).
C. Le rôle stratégique des administrations fiscales et budgétaires
• Direction générale des finances publiques (DGFIP) : collecte des recettes, contrôle, recouvrement.
• Direction du budget (ministère de l’Économie) : élabore les scénarios, prépare la LFI, suit les recettes.
• Cour des comptes et Parlement : assurent le contrôle de la régularité et de l’efficacité de la collecte et de l’utilisation des ressources.
D. Mécanismes de relance :
Dans le cas d'une relance budgétaire, il s'agit d'augmenter la demande interne en augmentant les dépenses de l'État (constructions, investissements,…) ou en augmentant les revenus disponibles des agents (baisse des impôts ou hausse des prestations sociales).
III. Enjeux contemporains : déficit, fiscalité verte, acceptabilité, ressources affectées et transparence
A. Un déséquilibre chronique entre ressources et dépenses
• La France connaît un déficit structurel récurrent depuis les années 1970.
• En 2023 : déficit public de près de 5 % du PIB.
• Dette publique autour de 110 % du PIB.
• Cela pose la question :
• de la soutenabilité budgétaire,
• de la qualité de la dépense publique,
• du besoin de réformes fiscales structurelles.
obligations européennes =
L'entrée en vigueur du traité de Maastricht en 1993 a introduit des règles budgétaires (déficit public inférieur à 3 % du PIB, dette publique inférieure à 60 % du PIB), mais aussi économiques, concernant la stabilité des prix, les taux de change et les taux d'intérêt à long terme.
- Ce traité a été renforcé en 1997 par l'adoption du Pacte de stabilité et de croissance, peu avant l'introduction de la monnaie commune, et de 2011 à 2013 par plusieurs textes : le Semestre européen, le Six-Pack, le Two-Pack et le Pacte budgétaire européen.
B. Vers une fiscalité plus écologique et incitative
• Développement d’écotaxes : taxes sur les carburants, les émissions, les déchets.
• Instruments budgétaires incitatifs :
• crédits d’impôt transition énergétique,
• éco-conditions dans les subventions,
• bonus/malus environnementaux.
Dans le champ culturel, cela impacte la gestion du bâti, la production artistique, les mobilités, les subventions soumises à critères écologiques (bilan carbone des festivals, performances énergétiques des équipements…).
C. Acceptabilité fiscale et consentement à l’impôt
• La légitimité de la fiscalité repose sur :
• sa justice perçue (progressivité, équité),
• sa lisibilité (transparence, pédagogie),
• son efficacité (bon usage des fonds collectés).
• La montée des tensions sociales (ex. crise des Gilets jaunes) a montré les limites du consentement si la fiscalité est perçue comme injuste ou opaque.
• L’État cherche à renforcer la transparence sur l’utilisation des ressources :
• campagnes d’information (« À quoi servent mes impôts ? »),
• publications des comptes publics accessibles en ligne,
• contrôle démocratique via les rapports parlementaires.
D. Affectation partielle des ressources : une tendance en expansion
• Si le principe budgétaire est celui de la non-affectation, des exceptions se multiplient :
• Taxes affectées à certains opérateurs publics : CNC, ADEME, HADOPI, etc.
• Contributions spécifiques : taxe sur les billets de cinéma (CNC), sur les spectacles vivants (CNM), sur la copie privée (SACEM).
Cela permet :
• de pérenniser le financement de politiques publiques ciblées (culture, audiovisuel, transition),
• mais aussi de réduire la visibilité d’ensemble des ressources dans le budget général.
Le secteur culturel bénéficie largement de ce mécanisme (ex. : taxe affectée au Centre national du cinéma, part de la redevance copie privée…).
Conclusion – Un enjeu fondamental pour la puissance publique : financer l’action collective avec justice, efficacité et transparence
Les ressources de l’État sont le carburant de l’action publique. Elles doivent être :
• suffisantes pour financer les missions essentielles,
• légitimes et acceptées par la société,
• bien gérées, dans une logique d’efficacité, de sobriété et d’évaluation.
Pour un cadre A, notamment dans le champ culturel, maîtriser les logiques de financement public, comprendre la structure des ressources, leur gestion, leurs limites et leurs perspectives est essentiel pour :
• argumenter une politique de subvention,
• construire un budget prévisionnel solide,
• piloter une structure en tenant compte des ressources disponibles et des contraintes fiscales.