Les Cinq énigmes de la représentation politique
Enigme n°1 : Existe-t-il une fatalité de la représentation ?
Devient-elle la condition nécessaire au gouvernement de société nombreuses ?
Aristote ne pense que par la représentation et l'interchangeabilité entre gouvernés et gouvernants ? Rousseau pense que la démocratie n'est pas compatible avec la représentation (le peuple cesse d'être un peuple). Idéal de démocratie directe.
Critique directe aussi à la représentation moderne : Simon Thormey The end of représentatives politics. Déclin de la représentation dans les institutions ou même allergie (Gilets Jaunes qui défendent le RIC - défiance à l'égard des représentants).
Depuis le XVIIIe pourtant, beaucoup de courants définissent la représentation comme indépassable :
Défenseurs de l'épistocratie, gouvernement de ceux qui savent. Jason Brennan Against Democracy.
Cette critique du rôle du peuple en démocratie conteste et ouvre un débat sur plusieurs éléments constitutifs de l’idéal démocratique : l’accès du peuple à la décision, l’accès des membres issus des catégories populaires au personnel politique, et le degré d’autonomie des représentants, professionnels de la politique, par rapport aux représentés. Ces différents points vont être l’enjeu de luttes, être à l’origine de compromis institutionnels, de solutions et de compromis
Enigme n°2 : Pourquoi les gouvernés acceptent-ils de se laisser déposséder de leur pouvoir au profit de représentants ?
Pour Aristote, Rousseau ou Tocqueville, l'apathie du peuple serait la lie vers le despotisme. Ils se laisseraient déposséder de leurs capacités d'agir.
-> Ce problème de l’indifférence civique est vécu comme tel aujourd’hui. La crise de la représentation est souvent analysée comme une crise de la participation. C’est parce que les citoyens se détourneraient des partis politiques et de toutes les formes de l’action politique conventionnelle qu’il y aurait danger pour la démocratie.
Réponse à cette dépossession de La Boétie : il suffirait que les citoyens cessent de croire à la supériorité des gouvernants pour que le pouvoir de ceux-ci s’effondre. Le consentement à l’autorité, la servitude, sont des choses volontaires.
Hobbes, Locke - Théories contractualistes : Ce choix de la soumission aux représentants résulte d’un calcul rationnel. C’est pour pouvoir vivre en sécurité, que les citoyens se dotent de représentants, acceptent de se désarmer mutuellement. C’est donc pour éviter la guerre de tous contre tous, c’est aussi pour se consacrer à leurs occupations privées.
Enigme n°3 : Qui du représentant ou du représenté préexiste à l’autre ?
On peut penser qu'il faut une unité, une communauté préalable pour la création d'un représentant, mais à partir du XVIIe cette idée va évoluer. Pour Hobbes, c’est le représentant qui fait le représenté. Pour lui, avant la représentation, la multitude est dispersée, ce représentant est une personne fictive qui personnalise le peuple, la multitude.
-> « Le mystère du ministère », en 2001 - Bourdieu. On peut parler d’une dimension performative de la représentation. Le représentant produit des images, une définition du groupe, il fait le groupe.
Enigme n°4 : La trahison du représentant est-elle inévitable ?
Différentes réponses sont proposées à cette distance inévitable entre représentants et représentés.
Hobbes : Les citoyens ont abdiqué leur propre pouvoir d‘agir en échange de leur sécurité. Il n’envisage pas de droit de résistance au Léviathan, sauf peut être en cas de danger de mort. Réponse de Locke : Libéralisme, les citoyens ont toujours le droit de revenir sur le contrat passé avec le pouvoir quand celui-ci atteint leurs libertés. Pour Montesquieu, la réponse c’est la séparation des pouvoirs ou balance des pouvoirs.
L’élection réitérée est perçue comme le moyen laissé au peuple pour limiter les capacités d’agir des représentants en menaçant celui qui sort de son mandat à ne pas être réélu.
L’idéal démocratique recouvre 2 idéaux en tension l’un et l’autre :
Question du degré d'autonomie du représentant : 2 opposants
Edmund Burke : Philosophe conservateur, contre-révolutionnaire. Idée que le représentant est libre d’agir contre la volonté explicite des représentés parce que le représentant est beaucoup plus à même de savoir ce qui est de l’intérêt de tous que les représentés. Prééminence morale et intellectuelle. Autonomie maximale - "trusty".
Rousseau : Idée d'un mandat impératif - figure d’un représentant simplement commis au représenté.
C’est la complexité du fonctionnement de la démocratie qui permet de limiter ce risque de trahison. Pierre Rosenvallon : La démocratie est à la fois une sphère et une réalité institutionnelle mais aussi une autre réalité, un espace politique qui est celui de la contre-démocratie, renvoyant à toutes les manières par lesquelles les citoyens contrôlent, interpellent, poursuivent en justice les représentants.
4 réponses données à cette question :
Enigme n°5 : « Comment un régime institutionnel qui exclue la participation des citoyens à l’exercice du pouvoir en est venu à être désigné par un terme dont le sens étymologique aussi bien que l’interprétation classique implique au contraire cette participation ?»
Catherine Colliot-Thélène - Comment en est-on venu à appeler « démocratie » un régime qui ne ressemble en rien à l’idéal originel de la démocratie et qui le trahit par plusieurs aspects ? Étrange opération de substitution.
Les Cinq énigmes de la représentation politique
Enigme n°1 : Existe-t-il une fatalité de la représentation ?
Devient-elle la condition nécessaire au gouvernement de société nombreuses ?
Aristote ne pense que par la représentation et l'interchangeabilité entre gouvernés et gouvernants ? Rousseau pense que la démocratie n'est pas compatible avec la représentation (le peuple cesse d'être un peuple). Idéal de démocratie directe.
Critique directe aussi à la représentation moderne : Simon Thormey The end of représentatives politics. Déclin de la représentation dans les institutions ou même allergie (Gilets Jaunes qui défendent le RIC - défiance à l'égard des représentants).
Depuis le XVIIIe pourtant, beaucoup de courants définissent la représentation comme indépassable :
Défenseurs de l'épistocratie, gouvernement de ceux qui savent. Jason Brennan Against Democracy.
Cette critique du rôle du peuple en démocratie conteste et ouvre un débat sur plusieurs éléments constitutifs de l’idéal démocratique : l’accès du peuple à la décision, l’accès des membres issus des catégories populaires au personnel politique, et le degré d’autonomie des représentants, professionnels de la politique, par rapport aux représentés. Ces différents points vont être l’enjeu de luttes, être à l’origine de compromis institutionnels, de solutions et de compromis
Enigme n°2 : Pourquoi les gouvernés acceptent-ils de se laisser déposséder de leur pouvoir au profit de représentants ?
Pour Aristote, Rousseau ou Tocqueville, l'apathie du peuple serait la lie vers le despotisme. Ils se laisseraient déposséder de leurs capacités d'agir.
-> Ce problème de l’indifférence civique est vécu comme tel aujourd’hui. La crise de la représentation est souvent analysée comme une crise de la participation. C’est parce que les citoyens se détourneraient des partis politiques et de toutes les formes de l’action politique conventionnelle qu’il y aurait danger pour la démocratie.
Réponse à cette dépossession de La Boétie : il suffirait que les citoyens cessent de croire à la supériorité des gouvernants pour que le pouvoir de ceux-ci s’effondre. Le consentement à l’autorité, la servitude, sont des choses volontaires.
Hobbes, Locke - Théories contractualistes : Ce choix de la soumission aux représentants résulte d’un calcul rationnel. C’est pour pouvoir vivre en sécurité, que les citoyens se dotent de représentants, acceptent de se désarmer mutuellement. C’est donc pour éviter la guerre de tous contre tous, c’est aussi pour se consacrer à leurs occupations privées.
Enigme n°3 : Qui du représentant ou du représenté préexiste à l’autre ?
On peut penser qu'il faut une unité, une communauté préalable pour la création d'un représentant, mais à partir du XVIIe cette idée va évoluer. Pour Hobbes, c’est le représentant qui fait le représenté. Pour lui, avant la représentation, la multitude est dispersée, ce représentant est une personne fictive qui personnalise le peuple, la multitude.
-> « Le mystère du ministère », en 2001 - Bourdieu. On peut parler d’une dimension performative de la représentation. Le représentant produit des images, une définition du groupe, il fait le groupe.
Enigme n°4 : La trahison du représentant est-elle inévitable ?
Différentes réponses sont proposées à cette distance inévitable entre représentants et représentés.
Hobbes : Les citoyens ont abdiqué leur propre pouvoir d‘agir en échange de leur sécurité. Il n’envisage pas de droit de résistance au Léviathan, sauf peut être en cas de danger de mort. Réponse de Locke : Libéralisme, les citoyens ont toujours le droit de revenir sur le contrat passé avec le pouvoir quand celui-ci atteint leurs libertés. Pour Montesquieu, la réponse c’est la séparation des pouvoirs ou balance des pouvoirs.
L’élection réitérée est perçue comme le moyen laissé au peuple pour limiter les capacités d’agir des représentants en menaçant celui qui sort de son mandat à ne pas être réélu.
L’idéal démocratique recouvre 2 idéaux en tension l’un et l’autre :
Question du degré d'autonomie du représentant : 2 opposants
Edmund Burke : Philosophe conservateur, contre-révolutionnaire. Idée que le représentant est libre d’agir contre la volonté explicite des représentés parce que le représentant est beaucoup plus à même de savoir ce qui est de l’intérêt de tous que les représentés. Prééminence morale et intellectuelle. Autonomie maximale - "trusty".
Rousseau : Idée d'un mandat impératif - figure d’un représentant simplement commis au représenté.
C’est la complexité du fonctionnement de la démocratie qui permet de limiter ce risque de trahison. Pierre Rosenvallon : La démocratie est à la fois une sphère et une réalité institutionnelle mais aussi une autre réalité, un espace politique qui est celui de la contre-démocratie, renvoyant à toutes les manières par lesquelles les citoyens contrôlent, interpellent, poursuivent en justice les représentants.
4 réponses données à cette question :
Enigme n°5 : « Comment un régime institutionnel qui exclue la participation des citoyens à l’exercice du pouvoir en est venu à être désigné par un terme dont le sens étymologique aussi bien que l’interprétation classique implique au contraire cette participation ?»
Catherine Colliot-Thélène - Comment en est-on venu à appeler « démocratie » un régime qui ne ressemble en rien à l’idéal originel de la démocratie et qui le trahit par plusieurs aspects ? Étrange opération de substitution.