1180 : mort de Louis VII. Son fils Philippe lui succède, il avait été associé au trône et sacré en 1179. C’est Rigord, biographe de Philippe II qui l’a qualifié d’Auguste (du latin augere, augmenter, un terme qui contient aussi des références antiques).
La notion de roi de France s’institutionnalise (même s’il est encore souvent indiqué « roi des Francs » sur les sceaux).
Ceci met l’accent sur un territoire plus que sur des liens d’hommes à hommes. Il y a glissement progressif de la suzeraineté vers la souveraineté. Mais les réalités de la pratique du pouvoir peuvent être différentes des principes.
I – Le règne de Philippe Auguste (1180-1223) : un tournant
1- Les difficultés du début du règne
Si la théorie de la suzeraineté du roi est largement admise, dans la pratique le roi doit faire face à des princes puissants : comtes de Flandre, de Champagne (famille de sa mère Adèle de Champagne), de Toulouse, et bien sûr les Plantagenêts.
Influence importante de la famille de Champagne au début du règne car Philippe Auguste a 14 ans en 1180 : sa mère, Adèle de Champagne et son oncle, Guillaume aux Blanches Mains, archevêque de Reims, exercent une forte influence.
Affrontements dans les années 1180-1185, en particulier contre le comte de Flandre. En 1185, un traité prévoit que Philippe Auguste obtiendra l’Artois, le Vermandois et le comté d’Amiens (la reine, Isabelle de Hainaut est nièce du comte de Flandre – voir généalogie, mère du futur Louis VIII).
C’est ensuite l’opposition avec les Plantagenêts qui prend le relais : en 1187-1189, il y a des chevauchées de part et d’autre de la frontière. Philippe Auguste joue de l’opposition des fils d’Henri II contre leur père. Richard prête hommage à Philippe Auguste pour l’Aquitaine en 1188. Mort d’Henri II 1189. Richard Cœur de Lion lui succède mais part à la croisade en 1190. Pendant son absence, en 1193-1194, son frère Jean sans Terre veut affirmer ses positions. Il prête hommage à Philippe Auguste ce qui lui vaut reconnaissance par ce dernier de son gouvernement sur ses territoires. En échange, il cède à Philippe Auguste des terres à l’est de la Normandie, sur la rive droite de la Seine, secteur où existe un réseau places-fortes majeures. Exemple : Gisors cédé au roi de France.
Retour de Richard Cœur de Lion en 1194 (après un temps de captivité dans l’empire germanique à cause de son conflit avec le duc d’Autriche). C’est le début d’un affrontement avec Philippe Auguste, Richard récupère la grande majorité des territoires cédés par son frère. Il consolide la frontière sur la Seine : fait construire Château-Gaillard, entre 1196 et 1198 : très fort château en pierre qui correspond à l’aboutissement de l’évolution des châteaux du XIIe siècle mais sans véritable innovation concernant la défense.
2 – L’affirmation du roi
La participation du roi à la croisade En 1187, Jérusalem est retombée aux mains des musulmans. Organisation de la 3e croisade à laquelle participent Philippe Auguste et Richard Cœur de Lion. Départ en 1190 mais Philippe Auguste rentre plus tôt.
En 1190, avant son départ en croisade Philippe Auguste édicte une ordonnance dans le but d’organiser l’exercice des pouvoirs en son absence. Le gouvernement est confié à la reine-mère Adèle et à Guillaume, l'archevêque de Reims, mais leur pouvoir est encadré. Rôle important dévolu aux baillis (cf. après) et aux prévôts qui collectent les revenus du domaine. Ils doivent rendre des rapports et verser les revenus du domaine prélevés dans leur circonscription.
Le trésor royal -> Templiers et déposé au Temple à Paris. Ceci donne à voir la structuration accrue de l’administration centrale et de celle du domaine.
Retour assez rapide du roi de France, pendant les opérations en Palestine. À son retour en 1191, en raison de la disparition de princes durant la croisade, il affirme son pouvoir sur de nouveaux territoires.
1195, Richard reprend les territoires qu’avait cédés son frère mais il meurt en 1199. Jean sans Terre lui succède (après compétition avec son neveu Arthur de Bretagne, fils de Geoffroy, leur frère). En 1200, au traité du Goulet (sur la Seine), Philippe Auguste reçoit la partie orientale du comté d’Évreux. La possession du Vexin normand lui est alors confirmée. Et il reconnaît Jean sans Terre comme son vassal qui lui prête hommage.
Après la mort de la reine Isabelle de Hainaut, Philippe Auguste épouse Ingeburge de Danemark en 1195 mais veut rapidement s’en séparer. Il rencontre l’opposition du pape Innocent III. Ce dernier met le royaume sous interdit car Philippe Auguste a épousé la fille du comte de Bavière et il est donc considéré comme bigame. Mais cette dernière meurt et Philippe Auguste accepte de reprendre Ingeburge. Mais il a tenu tête au pape.
3 – L’affrontement contre Jean sans Terre
En 1200 Jean sans Terre enlève puis épouse Isabelle Taillefer, fille du comte d'Angoulême, fiancée auparavant à Hugues de Lusignan, fils du comte de la Marche, vassal de Jean sans Terre. Hugues et d’autres aristocrates – en conflit par ailleurs avec Jean sans Terre – en appellent à leur suzerain : Philippe Auguste. Jean sans Terre est sommé de comparaître devant la cour royale. Il refuse. En 1202, la commise (confiscation) de ses fiefs est prononcée.
En 1203, Philippe Auguste et son armée entrent en Normandie. Arthur de Bretagne, qui espère obtenir une part de la succession de Richard Cœur de Lion, se porte vers le Poitou. Mais il est fait prisonnier par Jean sans Terre qui a la fidélité des aristocrates d’Anjou. Arthur est emprisonné à Rouen et assassiné ensuite sur ordre/par Jean sans Terre : élimination des concurrents.
La politique depuis 1199 (pression fiscale pour s’assurer les revenus nécessaires à la guerre, les événements récents telle la mort d’Arthur) provoquent des défections dans son camp. Certains offrent leurs services à Philippe Auguste.
Fin 1203, Jean sans Terre s’embarque pour Angleterre. Auparavant, à partir de septembre 1203, les forces de Philippe Auguste ont entamé le siège de le la principale forteresse qui tient la Seine, Château-Gaillard. Elle est prise en avril 1204. Reddition des villes normandes progressivement. En juin 1204, la Normandie est conquise.
Philippe Auguste prend des positions en Anjou mais le Poitou reste à Jean sans Terre. =) annexion de la Normandie, Maine et Anjou au domaine royal. CARTE
Jean sans Terre ne renonce pas. Il réussit à constituer une coalition contre Philippe Auguste formée de l’empereur Otton IV et du comte de Flandre en particulier.
- Février 1214, Jean sans Terre débarque à La Rochelle et se porte avec ses hommes vers la Loire. Louis, fils de Philippe Auguste, futur Louis VIII, l’oblige à se replier et repartir en Angleterre.
- Les armées de Philippe Auguste rencontrent celles de la coalition à laquelle Jean sans Terre participe (Otton IV, l’empereur, comtes de Flandre, de Boulogne, milice des villes flamandes, chevaliers…) près de Lille, au gué de Bouvines, le 27 juillet 1214. Victoire de Philippe Auguste : retentissement important, prestige du roi, certains fiefs du nord sont placés sous la garde du roi.
Après Bouvines, Jean sans Terre doit faire face à des oppositions en Angleterre : situation financière difficile, révolte des barons 1215 (Grande Charte). Une assemblée proclame sa déchéance et désigne Louis, le fils de Philippe Auguste, comme roi (marié à la nièce de Jean sans Terre, Blanche de Castille). En mai 1216, Louis débarque en Angleterre. Mais Jean sans Terre meurt en octobre. C’est lui qui cristallisait les oppositions. Son fils Henri (III) est couronné. Finalement défaite de Louis et retour en France.
En 1224, peu après la mort de Philippe Auguste (1223), c’est son fils Louis VIII qui conquiert le Poitou, Aunis et Saintonge et prend la Rochelle. Henri III ne dispose plus que de la Gascogne dans le royaume de France.
4 – Une influence accrue au sud du royaume
Innocent III, entre 1205 et 1207, sollicite Philippe Auguste pour mener des expéditions contre les cathares hérétiques du sud, les « Albigeois ». Le roi refuse d’organiser l’expédition et la « croisade albigeoise » est menée sous l’autorité du pape.
L’armée est toutefois conduite par des aristocrates du domaine royal en particulier Simon de Montfort. Elle s’oppose à une coalition formée notamment par le comte de Toulouse (ce dernier est accusé de ne pas lutter contre les hérétiques) et le roi d’Aragon qui voient d’un mauvais œil l’intervention d’aristocrates du nord et l’extension de l’influence royale qui peut en découler. En septembre 1213 après une victoire, Simon de Montfort, s’implante dans le Midi.
Puis en 1215-1216 le comté de Toulouse est attribué à Simon de Montfort qui prête hommage à Philippe Auguste. Mais très vite Raymond VI et son fils Raymond VII reprennent position à Toulouse (mort de Montfort en 1218).
Philippe Auguste meurt en juillet 1223. Son fils Louis VIII est immédiatement sacré. En 1226, il intervient en Languedoc en dictant ses conditions au pape. L’aristocratie se soumet ou se rallie. Mais il meurt sur le chemin du retour.
Conclusion :
- extension du domaine royal bien plus importante que sous l’ensemble des règnes précédents (voir la carte)
- prestige et puissance du roi : capable de s’opposer à l’empereur, de tenir tête au pape, de lutter contre infidèles et hérétiques.
II – Vers la souveraineté royale
En 1226, Louis IX a 12 ans, sa mère Blanche de Castille exerce la régence.
1 – Un domaine royal consolidé
Gains considérables sous Philippe Auguste. Progression confortée sous Louis VIII et Louis IX. - Louis VIII : vicomtés de Nîmes, Béziers et Carcassonne prises au comte de Toulouse après la croisade albigeoise (traité de Paris, 1229).
- Des territoires, comme l’ouest du Berry, font partie de la dot de Blanche de Castille, femme de Louis VIII et mère de Louis IX.
- Comté de Mâcon acheté en 1239.
- pariages associant le roi et un ses vassaux pour la gestion d’une seigneurie. Étape vers un rattachement total au domaine.
Au traité de Paris en 1258 (ratifié en 1259), le roi d’Angleterre, Henri III, renonce aux fiefs confisqués depuis 1204, il prête hommage au roi de France pour la Guyenne et d’autres territoires qu’il tient toujours dans le sud-ouest (Limousin, Quercy, Périgord sauf Périgueux).
Donc il y a encore une forte extension du domaine royal, sur de riches terres, des vallées de circulation importantes, des villes nombreuses.
En Bretagne, l’influence capétienne s’étend : le duché reste aux mains des membres issus du mariage de Constance de Bretagne et Geoffroi (fils d’Henri II Plantagenêt), il revient à Pierre Mauclerc (mari de la fille de Constance), la Bretagne a tendance à passer d’un camp à l’autre mais finalement à partir Jean Ier le Roux, fils de Pierre Mauclerc (1237-1286), les Bretons se comportent en vassaux fidèles du roi de France.
Création d’apanages (ad panem = pour le pain) : pour la subsistance des princes (dans le sens de fils du roi, les cadets). L’apanage peut-être transmis à l’héritier mais sans démembrement et il revient au domaine lorsqu’il n’y a pas d’héritier masculin. Ceci permet de satisfaire les cadets et de rapprocher la royauté des parties éloignées du domaine, les apanages peuvent être relais du pouvoir royal. Les premiers apanages sont accordés par Louis VIII à ses fils cadets : Artois à Robert, Anjou-Maine à Charles, Poitou et Auvergne à Alphonse. Cf. généalogie.
De plus Alphonse est marié à l’héritière du comté de Toulouse. À sa mort, le Toulousain revient au domaine.
2- Les structures du gouvernement royal au XIIIe siècle
Les principes figurant dans les ordonnances royales, actes législatifs émanant du roi (par exemple dans celle de 1254) sont ceux du bon gouvernement, de l’ordre public voulu par Dieu.
Avec la consolidation de l’autorité du roi, le « gouvernement central » se développe avant tout par transformation de ce qui existe.
- Officiers qui contribuent à la structuration de l’Hôtel du Roi qui se distingue peu à peu de la cour à la fin du XIIIe siècle. Il permet d’assurer les services domestiques du roi (au sens large) : la Chambre (dont la Chapelle pour son service religieux personnel), la Maison (services liés à l’approvisionnement du roi et de son entourage). Essor très important dans la période qui suit (XIVe siècle).
- Essor du conseil du roi : se distingue progressivement de la cour, le roi a de plus en plus recours aux juristes formés dans les universités pour le conseiller. Le roi y fait venir qui il veut.
- Avec le développement des prérogatives judiciaires de la royauté et grâce à la présence de juristes dans l’entourage royal, certaines séances de la cour deviennent régulières au milieu du XIIIe siècle, elles sont consacrées à l’exercice de la justice royale : prend le nom de cour en parlement et plus tard parlement.
- Trésor et comptes : le trésor est conservé au Temple de Paris ; les Templiers en assurent la gestion financière (ordre fondé en Terre Sainte pour organiser sa défense, il a acquis des compétences dans la gestion des sommes d’argent venant d’Occident). Le plus ancien compte conservé date de 1202-1203 : compte des recettes et dépenses de la royauté. À la fin du règne de Louis IX, une commission temporaire au Temple contrôle les comptes des prévôts et baillis : future Chambre des Comptes.
- Renforcement de l’autorité royale et développement de l’administration centrale manifestée par l’apparition des ordonnances = acte législatif. La 1ère date de 1155 et elles se multiplient ensuite. Plus largement, il y a un développement de l’écrit royal et surtout de son enregistrement et de sa conservation. 1900 actes sont aujourd’hui conservés pour le règne de Louis IX. Archives entreposées au palais de la Cité à Paris (Trésor des chartes).
- Paris : devient de plus en plus clairement une capitale
o Forteresse du Louvre et muraille édifiés par Philippe Auguste
o Palais de la Cité développé ; Sainte-Chapelle par Louis IX
Concernant l’administration locale, il y a également des évolutions importantes.
- Existence de prévôts qui sont des agents chargés des domaines royaux.
o Leur nombre croît, preuve de l’extension des droits du roi : une vingtaine en 1137 et 37 en 1180, 63 sous saint Louis.
o ils existent dans les cités (Paris, Bourges, Laon) et petites villes (Compiègne, Étampes, Pontoise…) du domaine royal. Ils ont compétence sur l’ensemble des biens/seigneuries royales d’un secteur. Gèrent avant tout les revenus des domaines. Mais leurs prérogatives peuvent être plus étendues : justice et maintien de l’ordre. Sont assistés de subalternes : par exemple les tonloyers chargés de prélever des taxes sur le commerce (tonlieu). Dans les secteurs où les domaines royaux voisinent avec d’autres seigneuries, des conflits peuvent exister avec leurs seigneurs ou leurs représentants.
o prévôtés souvent affermées (le prévôt avance au roi le montant des sommes qui doivent être récoltées dans la prévôté et prélève ensuite les taxes pour son propre compte) chaque année pour éviter l’enracinement des titulaires.
- apparition d’administrateurs d’un niveau supérieur : les baillis
o ils existent dans le duché de Normandie après 1170, représentants envoyés en tournée ; Philippe Auguste utilise le système dans le domaine royal en particulier pour surveiller les prévôts. Ils font des tournées d’inspection sans circonscriptions fixes, puis à partir des années 1230, elles ont tendance à se fixer (apparition des termes de baillie, bailliage pour désigner le territoire sur lequel s’exerce leur pouvoir) et, dans un 3etemps, les baillis deviennent des agents fixes dans ces bailliages.
o Contrôlent les prévôts, assurent la justice, convoquent l’ost.
o En Languedoc, les sénéchaux ont un rôle équivalent à celui des baillis à l’intérieur de leur sénéchaussée. Terme différent car le système pouvait préexister à la réunion au domaine royal.
o Le bailli, agent royal, doit être incorruptible. Validation et contrôle des comptes de son bailliage qui doivent être rendus à Paris.
o Baillis et sénéchaux dépendent du roi et le représentent, agissent en son nom en matière de justice, finance et militaire. Ils ont un rôle essentiel dans l’affermissement local de son autorité.
o prévôt de Paris ou garde la prévôté de Paris : doté de très larges pouvoirs sur la ville et le territoire autour, la vicomté de Paris. Si l’ensemble du territoire parisien n’est pas dans la seigneurie directe du roi, l’importance prise par Paris comme capitale donne à ce prévôt des responsabilités particulières.
- Développement de l’émission de la monnaie royale et affirmation de sa primauté : dans les ordonnances de 1263 et 1265, il est affirmé que seule cette monnaie a cours dans tout le royaume, dans le domaine aucune autre monnaie ne doit circuler et l’utilisation des monnaies seigneuriales doit être limitée au territoire dans lequel elles sont émises. Deux monnaies royales en argent : deniers tournois (Tours) et deniers parisis (Paris). 4 deniers parisis = 5 deniers tournois. Et frappe d’une monnaie d’or : l’écu.
3 – ministère royal et idéologie royale
- Une fois la notion de suzeraineté affirmée (prééminence du roi dans les relations féodales) s’opère un glissement vers la notion de souveraineté :
Ministère royal : la charge royale dans le sens où elle est confiée par Dieu avec des responsabilités quant au respect des principes d’ordre et de paix.
- Affirmation de la souveraineté liée à/au :
o la territorialisation du pouvoir : les aristocrates ne relèvent pas seulement du roi à titre personnel comme vassaux et donc à travers la hiérarchie féodale. L’ensemble de la population n’est plus seulement liée au roi par la domination que les puissantsexercent sur elle. Tous sont membres d’une communauté territoriale. Les puissants comme les plus faibles sont « sous la main du roi ».
o « ministère royal » conféré par le sacre qui est une charge à laquelle des devoirs sont liés. Lors du sacre, les regalia, insignes de son pouvoir, sont remis au roi et le roi communie sous les 2 espèces comme un prêtre.
o l’affirmation de la justice royale pouvant s’imposer à tous au nom de l’utilité publique : appel au roi et à sa cour en parlement de la justice seigneuriale ; en 1254 et 1258, des ordonnances interdisent ordalie et duel judiciaire (rétabli en 1306 sur pression de l’aristocratie), développement de l’enquête par témoins.
o développement de la loi royale avec tendance à application à tout le royaume (dans le respect des coutumes locales /droit local).
o la notion d’« empire du roi » qui apparaît pour désigner l’étendue du pouvoir royal : « le roi est empereur en son royaume » d’après la formule des légistes de l’entourage royal, donc il n’a pas de supérieur, il ne « tient que de Dieu » et ses prérogatives sont voisines de celles de l’empereur en Germanie.
o l’affaiblissement de l’empire germanique au XIIIe siècle (cf. jusque-là considéré comme le seul héritier de l’empire carolingien) qui sert aussi l’affirmation royale française en Europe.
- Manifestation du développement de la notion de souveraineté :
o Philippe Auguste n’associe pas son fils au trône : son pouvoir est mieux assis et la mère de ce dernier a du sang carolingien : Isabelle de Hainaut descend de Charles de Lorraine. Sous Louis IX, les clercs de l’entourage royal qui restituent la lignée, insistent sur cette filiation.
o Aménagement de la nécropole de Saint-Denis sous le règne de Louis IX : tombeaux des Capétiens placés au centre.
o Diffusion de l’image royale (qui n’atteint qu’une petite minorité de la population) : ? Représentation du roi en majesté : enluminures, sceaux
? sur la monnaie d’or, de nouveau frappée à partir de Louis IX : écu (bouclier) de France aux lys représenté sur la face : monnaie prend le nom d’écu.
Des limites toutefois : ces principes s’imposent progressivement. De plus l’étendue du domaine royal et du royaume rendent difficile leur contrôle (temps de déplacement vers les parties les plus éloignées). Des droits particuliers régionaux existent partout (exemple : coutume de Normandie) qui limitent cette unification. L’administration se structure mais les effectifs sont réduits.
- Ceci va de pair avec la notion de « roi très chrétien » :
o Croisade : Louis IX en 1248 et 1270.
o Sainte-Chapelle que Louis IX fait construire dans le palais de la Cité, lieu de conservation de reliques majeures (la couronne d’épines et autres reliques liées au Christ acquises par le roi). La Sainte-Chapelle participe à la sacralisation de la royauté.
o Charité et piété royales :
? donations aux léproseries : Saint-Lazare à Paris ; aux établissements d’assistance (hôtel-Dieu), fondation de l’hôpital des Quinze-Vingt pour 300 aveugles.
? fondations d’établissements cisterciens : Royaumont par Louis VIII, Maubuisson par Louis IX.
? donations aux couvents de Mendiants en particulier franciscains.
Conclusion
Le règne de Louis IX se situe dans la continuité de celui de Philippe Auguste mais il pousse plus loin ses avantages : extension encore du domaine, structuration de l’administration, développement de la justice royale, participation à 2 croisades, théorisation de la souveraineté royale… C’est le bon roi, celui qui est considéré très vite comme saint après sa mort. Il est reconnu comme saint par le pape en 1297.
Proportionnellement le règne de Philippe le Hardi (1270-1285) est court. Il meurt lors de la retraite d’une expédition menée à l’instigation de la papauté contre l’Aragon car l’Aragon a mis la main sur la Sicile, état vassal du pape12
1180 : mort de Louis VII. Son fils Philippe lui succède, il avait été associé au trône et sacré en 1179. C’est Rigord, biographe de Philippe II qui l’a qualifié d’Auguste (du latin augere, augmenter, un terme qui contient aussi des références antiques).
La notion de roi de France s’institutionnalise (même s’il est encore souvent indiqué « roi des Francs » sur les sceaux).
Ceci met l’accent sur un territoire plus que sur des liens d’hommes à hommes. Il y a glissement progressif de la suzeraineté vers la souveraineté. Mais les réalités de la pratique du pouvoir peuvent être différentes des principes.
I – Le règne de Philippe Auguste (1180-1223) : un tournant
1- Les difficultés du début du règne
Si la théorie de la suzeraineté du roi est largement admise, dans la pratique le roi doit faire face à des princes puissants : comtes de Flandre, de Champagne (famille de sa mère Adèle de Champagne), de Toulouse, et bien sûr les Plantagenêts.
Influence importante de la famille de Champagne au début du règne car Philippe Auguste a 14 ans en 1180 : sa mère, Adèle de Champagne et son oncle, Guillaume aux Blanches Mains, archevêque de Reims, exercent une forte influence.
Affrontements dans les années 1180-1185, en particulier contre le comte de Flandre. En 1185, un traité prévoit que Philippe Auguste obtiendra l’Artois, le Vermandois et le comté d’Amiens (la reine, Isabelle de Hainaut est nièce du comte de Flandre – voir généalogie, mère du futur Louis VIII).
C’est ensuite l’opposition avec les Plantagenêts qui prend le relais : en 1187-1189, il y a des chevauchées de part et d’autre de la frontière. Philippe Auguste joue de l’opposition des fils d’Henri II contre leur père. Richard prête hommage à Philippe Auguste pour l’Aquitaine en 1188. Mort d’Henri II 1189. Richard Cœur de Lion lui succède mais part à la croisade en 1190. Pendant son absence, en 1193-1194, son frère Jean sans Terre veut affirmer ses positions. Il prête hommage à Philippe Auguste ce qui lui vaut reconnaissance par ce dernier de son gouvernement sur ses territoires. En échange, il cède à Philippe Auguste des terres à l’est de la Normandie, sur la rive droite de la Seine, secteur où existe un réseau places-fortes majeures. Exemple : Gisors cédé au roi de France.
Retour de Richard Cœur de Lion en 1194 (après un temps de captivité dans l’empire germanique à cause de son conflit avec le duc d’Autriche). C’est le début d’un affrontement avec Philippe Auguste, Richard récupère la grande majorité des territoires cédés par son frère. Il consolide la frontière sur la Seine : fait construire Château-Gaillard, entre 1196 et 1198 : très fort château en pierre qui correspond à l’aboutissement de l’évolution des châteaux du XIIe siècle mais sans véritable innovation concernant la défense.
2 – L’affirmation du roi
La participation du roi à la croisade En 1187, Jérusalem est retombée aux mains des musulmans. Organisation de la 3e croisade à laquelle participent Philippe Auguste et Richard Cœur de Lion. Départ en 1190 mais Philippe Auguste rentre plus tôt.
En 1190, avant son départ en croisade Philippe Auguste édicte une ordonnance dans le but d’organiser l’exercice des pouvoirs en son absence. Le gouvernement est confié à la reine-mère Adèle et à Guillaume, l'archevêque de Reims, mais leur pouvoir est encadré. Rôle important dévolu aux baillis (cf. après) et aux prévôts qui collectent les revenus du domaine. Ils doivent rendre des rapports et verser les revenus du domaine prélevés dans leur circonscription.
Le trésor royal -> Templiers et déposé au Temple à Paris. Ceci donne à voir la structuration accrue de l’administration centrale et de celle du domaine.
Retour assez rapide du roi de France, pendant les opérations en Palestine. À son retour en 1191, en raison de la disparition de princes durant la croisade, il affirme son pouvoir sur de nouveaux territoires.
1195, Richard reprend les territoires qu’avait cédés son frère mais il meurt en 1199. Jean sans Terre lui succède (après compétition avec son neveu Arthur de Bretagne, fils de Geoffroy, leur frère). En 1200, au traité du Goulet (sur la Seine), Philippe Auguste reçoit la partie orientale du comté d’Évreux. La possession du Vexin normand lui est alors confirmée. Et il reconnaît Jean sans Terre comme son vassal qui lui prête hommage.
Après la mort de la reine Isabelle de Hainaut, Philippe Auguste épouse Ingeburge de Danemark en 1195 mais veut rapidement s’en séparer. Il rencontre l’opposition du pape Innocent III. Ce dernier met le royaume sous interdit car Philippe Auguste a épousé la fille du comte de Bavière et il est donc considéré comme bigame. Mais cette dernière meurt et Philippe Auguste accepte de reprendre Ingeburge. Mais il a tenu tête au pape.
3 – L’affrontement contre Jean sans Terre
En 1200 Jean sans Terre enlève puis épouse Isabelle Taillefer, fille du comte d'Angoulême, fiancée auparavant à Hugues de Lusignan, fils du comte de la Marche, vassal de Jean sans Terre. Hugues et d’autres aristocrates – en conflit par ailleurs avec Jean sans Terre – en appellent à leur suzerain : Philippe Auguste. Jean sans Terre est sommé de comparaître devant la cour royale. Il refuse. En 1202, la commise (confiscation) de ses fiefs est prononcée.
En 1203, Philippe Auguste et son armée entrent en Normandie. Arthur de Bretagne, qui espère obtenir une part de la succession de Richard Cœur de Lion, se porte vers le Poitou. Mais il est fait prisonnier par Jean sans Terre qui a la fidélité des aristocrates d’Anjou. Arthur est emprisonné à Rouen et assassiné ensuite sur ordre/par Jean sans Terre : élimination des concurrents.
La politique depuis 1199 (pression fiscale pour s’assurer les revenus nécessaires à la guerre, les événements récents telle la mort d’Arthur) provoquent des défections dans son camp. Certains offrent leurs services à Philippe Auguste.
Fin 1203, Jean sans Terre s’embarque pour Angleterre. Auparavant, à partir de septembre 1203, les forces de Philippe Auguste ont entamé le siège de le la principale forteresse qui tient la Seine, Château-Gaillard. Elle est prise en avril 1204. Reddition des villes normandes progressivement. En juin 1204, la Normandie est conquise.
Philippe Auguste prend des positions en Anjou mais le Poitou reste à Jean sans Terre. =) annexion de la Normandie, Maine et Anjou au domaine royal. CARTE
Jean sans Terre ne renonce pas. Il réussit à constituer une coalition contre Philippe Auguste formée de l’empereur Otton IV et du comte de Flandre en particulier.
- Février 1214, Jean sans Terre débarque à La Rochelle et se porte avec ses hommes vers la Loire. Louis, fils de Philippe Auguste, futur Louis VIII, l’oblige à se replier et repartir en Angleterre.
- Les armées de Philippe Auguste rencontrent celles de la coalition à laquelle Jean sans Terre participe (Otton IV, l’empereur, comtes de Flandre, de Boulogne, milice des villes flamandes, chevaliers…) près de Lille, au gué de Bouvines, le 27 juillet 1214. Victoire de Philippe Auguste : retentissement important, prestige du roi, certains fiefs du nord sont placés sous la garde du roi.
Après Bouvines, Jean sans Terre doit faire face à des oppositions en Angleterre : situation financière difficile, révolte des barons 1215 (Grande Charte). Une assemblée proclame sa déchéance et désigne Louis, le fils de Philippe Auguste, comme roi (marié à la nièce de Jean sans Terre, Blanche de Castille). En mai 1216, Louis débarque en Angleterre. Mais Jean sans Terre meurt en octobre. C’est lui qui cristallisait les oppositions. Son fils Henri (III) est couronné. Finalement défaite de Louis et retour en France.
En 1224, peu après la mort de Philippe Auguste (1223), c’est son fils Louis VIII qui conquiert le Poitou, Aunis et Saintonge et prend la Rochelle. Henri III ne dispose plus que de la Gascogne dans le royaume de France.
4 – Une influence accrue au sud du royaume
Innocent III, entre 1205 et 1207, sollicite Philippe Auguste pour mener des expéditions contre les cathares hérétiques du sud, les « Albigeois ». Le roi refuse d’organiser l’expédition et la « croisade albigeoise » est menée sous l’autorité du pape.
L’armée est toutefois conduite par des aristocrates du domaine royal en particulier Simon de Montfort. Elle s’oppose à une coalition formée notamment par le comte de Toulouse (ce dernier est accusé de ne pas lutter contre les hérétiques) et le roi d’Aragon qui voient d’un mauvais œil l’intervention d’aristocrates du nord et l’extension de l’influence royale qui peut en découler. En septembre 1213 après une victoire, Simon de Montfort, s’implante dans le Midi.
Puis en 1215-1216 le comté de Toulouse est attribué à Simon de Montfort qui prête hommage à Philippe Auguste. Mais très vite Raymond VI et son fils Raymond VII reprennent position à Toulouse (mort de Montfort en 1218).
Philippe Auguste meurt en juillet 1223. Son fils Louis VIII est immédiatement sacré. En 1226, il intervient en Languedoc en dictant ses conditions au pape. L’aristocratie se soumet ou se rallie. Mais il meurt sur le chemin du retour.
Conclusion :
- extension du domaine royal bien plus importante que sous l’ensemble des règnes précédents (voir la carte)
- prestige et puissance du roi : capable de s’opposer à l’empereur, de tenir tête au pape, de lutter contre infidèles et hérétiques.
II – Vers la souveraineté royale
En 1226, Louis IX a 12 ans, sa mère Blanche de Castille exerce la régence.
1 – Un domaine royal consolidé
Gains considérables sous Philippe Auguste. Progression confortée sous Louis VIII et Louis IX. - Louis VIII : vicomtés de Nîmes, Béziers et Carcassonne prises au comte de Toulouse après la croisade albigeoise (traité de Paris, 1229).
- Des territoires, comme l’ouest du Berry, font partie de la dot de Blanche de Castille, femme de Louis VIII et mère de Louis IX.
- Comté de Mâcon acheté en 1239.
- pariages associant le roi et un ses vassaux pour la gestion d’une seigneurie. Étape vers un rattachement total au domaine.
Au traité de Paris en 1258 (ratifié en 1259), le roi d’Angleterre, Henri III, renonce aux fiefs confisqués depuis 1204, il prête hommage au roi de France pour la Guyenne et d’autres territoires qu’il tient toujours dans le sud-ouest (Limousin, Quercy, Périgord sauf Périgueux).
Donc il y a encore une forte extension du domaine royal, sur de riches terres, des vallées de circulation importantes, des villes nombreuses.
En Bretagne, l’influence capétienne s’étend : le duché reste aux mains des membres issus du mariage de Constance de Bretagne et Geoffroi (fils d’Henri II Plantagenêt), il revient à Pierre Mauclerc (mari de la fille de Constance), la Bretagne a tendance à passer d’un camp à l’autre mais finalement à partir Jean Ier le Roux, fils de Pierre Mauclerc (1237-1286), les Bretons se comportent en vassaux fidèles du roi de France.
Création d’apanages (ad panem = pour le pain) : pour la subsistance des princes (dans le sens de fils du roi, les cadets). L’apanage peut-être transmis à l’héritier mais sans démembrement et il revient au domaine lorsqu’il n’y a pas d’héritier masculin. Ceci permet de satisfaire les cadets et de rapprocher la royauté des parties éloignées du domaine, les apanages peuvent être relais du pouvoir royal. Les premiers apanages sont accordés par Louis VIII à ses fils cadets : Artois à Robert, Anjou-Maine à Charles, Poitou et Auvergne à Alphonse. Cf. généalogie.
De plus Alphonse est marié à l’héritière du comté de Toulouse. À sa mort, le Toulousain revient au domaine.
2- Les structures du gouvernement royal au XIIIe siècle
Les principes figurant dans les ordonnances royales, actes législatifs émanant du roi (par exemple dans celle de 1254) sont ceux du bon gouvernement, de l’ordre public voulu par Dieu.
Avec la consolidation de l’autorité du roi, le « gouvernement central » se développe avant tout par transformation de ce qui existe.
- Officiers qui contribuent à la structuration de l’Hôtel du Roi qui se distingue peu à peu de la cour à la fin du XIIIe siècle. Il permet d’assurer les services domestiques du roi (au sens large) : la Chambre (dont la Chapelle pour son service religieux personnel), la Maison (services liés à l’approvisionnement du roi et de son entourage). Essor très important dans la période qui suit (XIVe siècle).
- Essor du conseil du roi : se distingue progressivement de la cour, le roi a de plus en plus recours aux juristes formés dans les universités pour le conseiller. Le roi y fait venir qui il veut.
- Avec le développement des prérogatives judiciaires de la royauté et grâce à la présence de juristes dans l’entourage royal, certaines séances de la cour deviennent régulières au milieu du XIIIe siècle, elles sont consacrées à l’exercice de la justice royale : prend le nom de cour en parlement et plus tard parlement.
- Trésor et comptes : le trésor est conservé au Temple de Paris ; les Templiers en assurent la gestion financière (ordre fondé en Terre Sainte pour organiser sa défense, il a acquis des compétences dans la gestion des sommes d’argent venant d’Occident). Le plus ancien compte conservé date de 1202-1203 : compte des recettes et dépenses de la royauté. À la fin du règne de Louis IX, une commission temporaire au Temple contrôle les comptes des prévôts et baillis : future Chambre des Comptes.
- Renforcement de l’autorité royale et développement de l’administration centrale manifestée par l’apparition des ordonnances = acte législatif. La 1ère date de 1155 et elles se multiplient ensuite. Plus largement, il y a un développement de l’écrit royal et surtout de son enregistrement et de sa conservation. 1900 actes sont aujourd’hui conservés pour le règne de Louis IX. Archives entreposées au palais de la Cité à Paris (Trésor des chartes).
- Paris : devient de plus en plus clairement une capitale
o Forteresse du Louvre et muraille édifiés par Philippe Auguste
o Palais de la Cité développé ; Sainte-Chapelle par Louis IX
Concernant l’administration locale, il y a également des évolutions importantes.
- Existence de prévôts qui sont des agents chargés des domaines royaux.
o Leur nombre croît, preuve de l’extension des droits du roi : une vingtaine en 1137 et 37 en 1180, 63 sous saint Louis.
o ils existent dans les cités (Paris, Bourges, Laon) et petites villes (Compiègne, Étampes, Pontoise…) du domaine royal. Ils ont compétence sur l’ensemble des biens/seigneuries royales d’un secteur. Gèrent avant tout les revenus des domaines. Mais leurs prérogatives peuvent être plus étendues : justice et maintien de l’ordre. Sont assistés de subalternes : par exemple les tonloyers chargés de prélever des taxes sur le commerce (tonlieu). Dans les secteurs où les domaines royaux voisinent avec d’autres seigneuries, des conflits peuvent exister avec leurs seigneurs ou leurs représentants.
o prévôtés souvent affermées (le prévôt avance au roi le montant des sommes qui doivent être récoltées dans la prévôté et prélève ensuite les taxes pour son propre compte) chaque année pour éviter l’enracinement des titulaires.
- apparition d’administrateurs d’un niveau supérieur : les baillis
o ils existent dans le duché de Normandie après 1170, représentants envoyés en tournée ; Philippe Auguste utilise le système dans le domaine royal en particulier pour surveiller les prévôts. Ils font des tournées d’inspection sans circonscriptions fixes, puis à partir des années 1230, elles ont tendance à se fixer (apparition des termes de baillie, bailliage pour désigner le territoire sur lequel s’exerce leur pouvoir) et, dans un 3etemps, les baillis deviennent des agents fixes dans ces bailliages.
o Contrôlent les prévôts, assurent la justice, convoquent l’ost.
o En Languedoc, les sénéchaux ont un rôle équivalent à celui des baillis à l’intérieur de leur sénéchaussée. Terme différent car le système pouvait préexister à la réunion au domaine royal.
o Le bailli, agent royal, doit être incorruptible. Validation et contrôle des comptes de son bailliage qui doivent être rendus à Paris.
o Baillis et sénéchaux dépendent du roi et le représentent, agissent en son nom en matière de justice, finance et militaire. Ils ont un rôle essentiel dans l’affermissement local de son autorité.
o prévôt de Paris ou garde la prévôté de Paris : doté de très larges pouvoirs sur la ville et le territoire autour, la vicomté de Paris. Si l’ensemble du territoire parisien n’est pas dans la seigneurie directe du roi, l’importance prise par Paris comme capitale donne à ce prévôt des responsabilités particulières.
- Développement de l’émission de la monnaie royale et affirmation de sa primauté : dans les ordonnances de 1263 et 1265, il est affirmé que seule cette monnaie a cours dans tout le royaume, dans le domaine aucune autre monnaie ne doit circuler et l’utilisation des monnaies seigneuriales doit être limitée au territoire dans lequel elles sont émises. Deux monnaies royales en argent : deniers tournois (Tours) et deniers parisis (Paris). 4 deniers parisis = 5 deniers tournois. Et frappe d’une monnaie d’or : l’écu.
3 – ministère royal et idéologie royale
- Une fois la notion de suzeraineté affirmée (prééminence du roi dans les relations féodales) s’opère un glissement vers la notion de souveraineté :
Ministère royal : la charge royale dans le sens où elle est confiée par Dieu avec des responsabilités quant au respect des principes d’ordre et de paix.
- Affirmation de la souveraineté liée à/au :
o la territorialisation du pouvoir : les aristocrates ne relèvent pas seulement du roi à titre personnel comme vassaux et donc à travers la hiérarchie féodale. L’ensemble de la population n’est plus seulement liée au roi par la domination que les puissantsexercent sur elle. Tous sont membres d’une communauté territoriale. Les puissants comme les plus faibles sont « sous la main du roi ».
o « ministère royal » conféré par le sacre qui est une charge à laquelle des devoirs sont liés. Lors du sacre, les regalia, insignes de son pouvoir, sont remis au roi et le roi communie sous les 2 espèces comme un prêtre.
o l’affirmation de la justice royale pouvant s’imposer à tous au nom de l’utilité publique : appel au roi et à sa cour en parlement de la justice seigneuriale ; en 1254 et 1258, des ordonnances interdisent ordalie et duel judiciaire (rétabli en 1306 sur pression de l’aristocratie), développement de l’enquête par témoins.
o développement de la loi royale avec tendance à application à tout le royaume (dans le respect des coutumes locales /droit local).
o la notion d’« empire du roi » qui apparaît pour désigner l’étendue du pouvoir royal : « le roi est empereur en son royaume » d’après la formule des légistes de l’entourage royal, donc il n’a pas de supérieur, il ne « tient que de Dieu » et ses prérogatives sont voisines de celles de l’empereur en Germanie.
o l’affaiblissement de l’empire germanique au XIIIe siècle (cf. jusque-là considéré comme le seul héritier de l’empire carolingien) qui sert aussi l’affirmation royale française en Europe.
- Manifestation du développement de la notion de souveraineté :
o Philippe Auguste n’associe pas son fils au trône : son pouvoir est mieux assis et la mère de ce dernier a du sang carolingien : Isabelle de Hainaut descend de Charles de Lorraine. Sous Louis IX, les clercs de l’entourage royal qui restituent la lignée, insistent sur cette filiation.
o Aménagement de la nécropole de Saint-Denis sous le règne de Louis IX : tombeaux des Capétiens placés au centre.
o Diffusion de l’image royale (qui n’atteint qu’une petite minorité de la population) : ? Représentation du roi en majesté : enluminures, sceaux
? sur la monnaie d’or, de nouveau frappée à partir de Louis IX : écu (bouclier) de France aux lys représenté sur la face : monnaie prend le nom d’écu.
Des limites toutefois : ces principes s’imposent progressivement. De plus l’étendue du domaine royal et du royaume rendent difficile leur contrôle (temps de déplacement vers les parties les plus éloignées). Des droits particuliers régionaux existent partout (exemple : coutume de Normandie) qui limitent cette unification. L’administration se structure mais les effectifs sont réduits.
- Ceci va de pair avec la notion de « roi très chrétien » :
o Croisade : Louis IX en 1248 et 1270.
o Sainte-Chapelle que Louis IX fait construire dans le palais de la Cité, lieu de conservation de reliques majeures (la couronne d’épines et autres reliques liées au Christ acquises par le roi). La Sainte-Chapelle participe à la sacralisation de la royauté.
o Charité et piété royales :
? donations aux léproseries : Saint-Lazare à Paris ; aux établissements d’assistance (hôtel-Dieu), fondation de l’hôpital des Quinze-Vingt pour 300 aveugles.
? fondations d’établissements cisterciens : Royaumont par Louis VIII, Maubuisson par Louis IX.
? donations aux couvents de Mendiants en particulier franciscains.
Conclusion
Le règne de Louis IX se situe dans la continuité de celui de Philippe Auguste mais il pousse plus loin ses avantages : extension encore du domaine, structuration de l’administration, développement de la justice royale, participation à 2 croisades, théorisation de la souveraineté royale… C’est le bon roi, celui qui est considéré très vite comme saint après sa mort. Il est reconnu comme saint par le pape en 1297.
Proportionnellement le règne de Philippe le Hardi (1270-1285) est court. Il meurt lors de la retraite d’une expédition menée à l’instigation de la papauté contre l’Aragon car l’Aragon a mis la main sur la Sicile, état vassal du pape12