Quelques définitions
Définition
Responsabilité du fait des choses
La responsabilité du fait des choses désigne le principe selon lequel une personne peut être tenue responsable des dommages causés par des choses qu’elle a sous sa garde, et ce, sans faute de sa part.
Théorie du risque
La théorie du risque est une doctrine selon laquelle la personne qui bénéficie d'un avantage ou d'une activité doit en supporter les risques, même en l'absence de faute de sa part.
Évolution historique
En 1804, le Code civil ne prévoyait la responsabilité du fait des choses que dans deux cas précis : le fait des animaux, désormais couvert par l'article 1243, et le fait des bâtiments en ruine, à l'article 1244. Ces deux situations n'étaient pas des régimes de responsabilité sans faute. Le développement économique et industriel du XIXe siècle mit en lumière l'insuffisance de ce cadre pour indemniser les dommages croissants de la machinisation, poussant deux juristes, Saleilles et Josserand, à proposer une responsabilité générale du fait des choses fondée sur le risque.
Arrêt Teffaine de 1896
L'arrêt Teffaine de 1896 posa les bases de la responsabilité pour fait des choses sans faute. En l'espèce, même en l'absence de faute du propriétaire d'une machine à vapeur ayant explosé, la Cour d'appel retient sa responsabilité en se basant indûment sur le régime des bâtiments en ruine, un pas vers la protection des victimes. La Cour de cassation, tout en rejetant ce raisonnement, consacre l'application de l'article 1242, alinéa 1.
Jurisprudence postérieure et développement
L'évolution vers un régime sans faute fut progressive. En 1908, la présomption de faute devint la norme. Les exigences sur la preuve de l'absence de responsabilité s'accentuèrent en 1919. La décision fondamentale vint en 1930 avec l'arrêt Jand’heur qui officialisa la responsabilité sans faute pour fait des choses : les juges déclarèrent que la responsabilité pouvait être engagée sur la simple constatation de la garde et de l'intervention d'une cause étrangère.
Consécration d'un principe général
L'arrêt Jand’heur en 1930 fut déterminant. En déclarant la responsabilité du gardien sur le fondement de l'article 1242 sans besoin de faute, il ouvrit la voie à une responsabilité objective plus large, brisant la doctrine traditionnelle centrée sur la faute. Cela impulsait le législateur et les juges à amorcer la création de nouveaux régimes de responsabilité.
A retenir :
La responsabilité du fait des choses s’est développée du fait de lacunes face aux nouvelles réalités sociales et économiques issues de la révolution industrielle. À travers des évolutions jurisprudentielles marquantes, telles que les arrêts Teffaine et Jand’heur, elle s’est imposée comme un régime de droit civil majeur, passant d'une conception initiale de transition à un principe général de responsabilité sans faute pour tout gardien d'une chose.