Cas d'une vente assortie de conditions
Ventes conditionnelles
Condition suspensive
Vente sous condition => vente formée , mais son exécution est suspendue jusqu’à la réalisation d’un événement futur et incertain (condition suspensive). Tant que la condition ne se réalise pas, ni la propriété ni le prix ne sont transférés.
Distinction condition/terme:
- Condition = événement futur et incertain(ex: droit de préemption => la faculté accordée par la loi ou un contrat à une personne publique ou privée d’acquérir un bien en priorité sur tout autre acheteur lorsque son propriétaire décide de le vendre.
- Terme = événement futur et certain (ex: paiement à une date fixée).
Effets juridiques :
- Une condition potestative (dépendant de la seule volonté d’une partie) est nulle (art. 1304-2 CC).
- Une condition suspensive valide rend l’obligation exigible dès sa réalisation, sauf si les parties prévoient un effet rétroactif (art. 1304-6 CC).
- Si la condition défaille, l’obligation est réputée n’avoir jamais existé, entraînant la caducité du contrat (art. 1304-6 al.3 CC).
Idée clé : La condition suspend l’exécution, mais la vente est juridiquement formée dès l’accord des parties.
Condition résolutoire
Selon l’article 1304 al. 2 CC , la condition résolutoire entraîne l’anéantissement rétroactif de l’obligation si l’événement prévu se réalise.
Effets (art. 1304-7 CC) :
- L’obligation s’éteint avec effet rétroactif , mais les actes conservatoires restent valables.
- Les parties doivent restituer ce qu'elles ont reçu (ex: restitution du bien et du prix en cas de vente annulée).
Exemple : Une vente sous condition résolutoire d’une interdiction de circulation à Paris → si l’interdiction survient, la vente est annulée, et le véhicule doit être restitué.
Vente avec le droit de repentir
Le repentir peut bénéficier au vendeur ou à l’acheteur ou au deux. C’est un droit de se rétracter, c’est la même chose en termes d’effet que la condition résolutoire.
Repentir du vendeur
Art. 1659 CC => Vente permettant au vendeur de reprendre son bien en restituant le prix à l’acheteur. Elle fonctionne comme une vente sous condition résolutoire potestative, à la seule initiative du vendeur (Cass. 4 oct. 1950, Cass. 20 nov. 2007).
Deux issues possibles :
- Le vendeur rachète → Il redevient rétroactivement propriétaire, mais doit indemniser l’acquéreur pour d’éventuels travaux.
- Le vendeur ne rachète pas → L’acheteur devient propriétaire définitif (art. 1162 CC).
Limites légales:
- Délai maximal de rachat : 5 ans (art. 1660 CC).
- Aucune prorogation judiciaire possible (art. 1661 CC*).
Si revente avant 5 ans , le droit de rachat est bloqué → nécessité d’une clause d’interdiction de revente.
Repentir conjoint
Vente avec arrhes => article 1590 du Code civil
- La vente assortie d’arrhes est un contrat qui permet aux parties de se rétracter en perdant ou en restituant les arrhes. Ce régime est supplétif de volonté, ce qui signifie que les parties peuvent y déroger en prévoyant une clause contraire.
Si l’acheteur renonce à la vente, il perd les arrhes qu’il a versées. Si c’est le vendeur qui renonce, il doit restituer le double des arrhes reçues. La rupture du contrat dans ce cas n’engage pas la responsabilité contractuelle des parties, seule la perte ou la restitution des arrhes s’applique. Cette règle a été reprise par l’avant-projet dans son article 1592.
Clause de dédit:
- La clause de dédit diffère des arrhes car elle ne permet qu’à une seule partie de se rétracter, moyennant une indemnisation. Elle ne concerne donc pas les deux contractants de manière réciproque.
La clause de dédit n’a pas de fondement textuel dans le Code civil actuel, mais la jurisprudence l’a admise, notamment dans un arrêt du 17 novembre 1993 de la première chambre civile de la Cour de cassation. Elle a également été validée par la chambre commerciale le 30 octobre 2000, qui a précisé qu’une clause de dédit peut être consentie même à titre gratuit.
L’avant-projet de réforme du droit des contrats prévoit d’encadrer cette clause dans son article 1593, mais en limitant son bénéfice au seul acheteur dans une vente.
Différences entre arrhes, acompte et clause de dédit:
- Les arrhes permettent à chacune des parties. de se rétracter librement en assumant une pénalité financière. L’acompte, en revanche, correspond à une avance sur le prix de vente et engage définitivement les parties à exécuter le contrat. Si l’acheteur se rétracte après avoir versé un acompte, il peut être contraint de verser des dommages-intérêts pour inexécution contractuelle.
La clause de dédit, quant à elle, confère à une seule partie le droit de se dégager du contrat en payant une indemnité convenue à l’avance. Contrairement aux arrhes, elle ne permet pas une rétractation réciproque.
Qualification en pratique:
Si le contrat ne précise pas la nature de la somme versée, la jurisprudence analyse la volonté des parties pour la qualifier. Toutefois, l’avant-projet de réforme, dans son article 1594, pose une présomption d’acompte, sauf preuve contraire.
Dans le cadre du droit de la consommation, l’article L.241-1 du Code de la consommation prévoit que toute somme versée par un consommateur est présumée être des arrhes, sauf stipulation contraire du contrat.
Synthèse des effets:
- Les arrhes offrent une faculté de rétractation réciproque entre les parties. La clause de dédit confère ce droit à une seule partie. L’acompte engage définitivement les parties à exécuter le contrat, sauf inexécution fautive.
En pratique, il est essentiel de préciser clairement si la somme versée correspond à des arrhes ou un acompte, afin d’éviter toute ambiguïté juridique.
Vente avec expérimentation
Le Code civil distingue la vente à l’agréage et la vente à l’essai (article 1587 CC).
- Vente à l’agréage : La vente n’est pas formée tant que l’acheteur n’a pas agréé le bien (ex : vin, huile). La jurisprudence assimile cette vente à une promesse unilatérale de vente avec un droit d’option pour l’acheteur.
- Vente à l’essai : La vente est conclue mais sous condition résolutoire de l’essai. Si l’essai n’est pas concluant, la vente est annulée.
L’avant-projet d’article 1584 prévoit d’unifier ces régimes en considérant qu’il n’y a pas vente tant que l’acheteur n’a pas accepté la chose après l’avoir goûtée ou essayée.
Concernant le dépôt-vente, deux cas existent :
- Mandat : Le vendeur laisse le bien en dépôt pour qu’il soit vendu.
- Vente sous condition résolutoire: Le bien est vendu à un professionnel qui doit le revendre. S’il ne le fait pas, la vente est annulée, illustrant ainsi l’usage de la condition résolutoire .