📚 Fiche ultra claire – La Cession de Dette
PLAN
- PARTIE 1. Notion et définition de la cession de dette
- PARTIE 2. Obstacles fondamentaux à la cession de dette
- PARTIE 3. Modalités et formes de la reprise / cession de dette
- PARTIE 4. Les situations voisines de la cession de dette
- PARTIE 5. Le droit positif : régime après l'ordonnance de 2016
PARTIE 1. NOTION ET DÉFINITION DE LA CESSION DE DETTE
Définition
Cession de dette :
Opération par laquelle un débiteur transfère sa dette à un tiers, qui devient le nouveau débiteur envers le créancier.
- Ancien débiteur : Celui qui cherche à se décharger de sa dette.
- Nouveau débiteur : Celui qui accepte de supporter la dette.
- Créancier : Celui qui réclame l’exécution (paiement ou prestation).
Exemples simples
- Tu dois 500 € à la banque.
- Tu demandes à ton ami Paul de reprendre ta dette.
- ➔ Si la banque accepte, Paul devra rembourser à ta place !
Pourquoi faire une cession de dette ?
- Pour transférer un poids financier.
- Dans le cadre de ventes d'entreprises, de succession, etc.
PARTIE 2. OBSTACLES FONDAMENTAUX À LA CESSION DE DETTE
Nature particulière de la dette
- Une créance est facilement détachable de son titulaire (elle est une "valeur").
- Une dette, en revanche, est fortement liée à la personne du débiteur ➔ C’est un lien personnel.
Conséquence
➔ La dette n’est pas transférable aussi facilement qu'une créance.
Traditionnellement, il fallait passer par la cession de contrat pour transférer des dettes.
Pourquoi la cession de dette est plus compliquée que la cession de créance ?
- Créance = Peut être "détachée" facilement ➔ elle existe comme une valeur propre.
- Dette = Engage personnellement le débiteur ➔ c’est un lien fort entre deux personnes.
➔ Transférer une dette revient donc à changer la relation personnelle, ce qui est beaucoup plus délicat juridiquement.
Conséquences pratiques
- Avant 2016, la cession de dette n’existait qu’indirectement :
- Soit à travers la cession de contrat (on cédait tout, créances + dettes),
- Soit par délégation ou novation.
PRECISION
Avant l'ordonnance du 10 février 2016, la cession de dette n'était pas directement prévue par le Code civil.
✅ En pratique, on ne pouvait pas transférer une dette seule de manière autonome.
Pourquoi ? Parce que la dette est considérée comme un lien personnel fort entre le débiteur et le créancier (plus difficile à "détacher" qu'une créance).
Donc deux techniques juridiques étaient utilisées à la place :
1) La cession de contrat
Qu'est-ce que c'était ?
- Au lieu de transférer seulement la dette, on transférait tout le contrat.
- C'est-à-dire : tous les droits (créances) et toutes les obligations (dettes) en même temps.
Exemple concret :
- Tu es locataire d'un appartement.
- Tu veux quitter ton bail avant la fin.
- ➔ Tu trouves quelqu'un pour reprendre ton contrat de location entier.
- ➔ Il reprendra tes obligations (payer le loyer) et tes droits (jouir de l’appartement).
Attention :
- Le créancier (propriétaire) devait donner son accord.
- Ce n'était pas un transfert automatique !
Donc : pour changer de débiteur, on passait par la cession de l’ensemble du contrat, pas seulement la dette.
2) La délégation ou la novation
Quand on ne faisait pas une cession de contrat, on utilisait d'autres mécanismes plus complexes :
a) La délégation
Définition simple :
- Le débiteur demande à un tiers de payer le créancier à sa place.
- C'est le tiers qui s'engage envers le créancier.
Exemple concret :
- Tu dois 500 € à ta banque.
- Tu demandes à ton ami Paul de s'engager auprès de ta banque pour payer à ta place.
Attention :
- Il y a toujours un risque ➔ Selon le type de délégation (parfaite ou imparfaite), tu pouvais rester engagé en plusdu nouveau débiteur.
b) La novation par changement de débiteur
Définition simple :
- On éteint l'ancienne dette et on en crée une nouvelle, avec un nouveau débiteur.
Exemple concret :
- Ta dette initiale est annulée.
- Paul signe un nouveau contrat avec ta banque : il s’engage à payer la somme.
Attention :
- Ce n’est pas un transfert pur et simple.
- C'est la naissance d'une nouvelle obligation ➔ D'où la nécessité d’un accord clair de toutes les parties.
PARTIE 3. MODALITÉS ET FORMES DE LA REPRISE / CESSION DE DETTE
1) Reprise interne
- Accord entre l'ancien et le nouveau débiteur uniquement.
- Le créancier n'est pas consulté.
- ➔ Le créancier peut continuer à réclamer à l’ancien débiteur.
Exemple :
Tu demandes à Paul de te remplacer, sans prévenir la banque ➔ Elle pourra continuer à exiger de toi.
2) Reprise cumulative
- Le créancier accepte la reprise.
- Deux débiteurs existent alors (ancien + nouveau).
- Le créancier pourra :
- D'abord agir contre le nouveau débiteur,
- Puis contre l'ancien en cas de défaillance.
Exemple :
Comme une caution, le nouveau débiteur est prioritairement poursuivi, mais l’ancien reste redevable si besoin.
3) Reprise parfaite
- Le créancier libère totalement l'ancien débiteur.
- ➔ Seul le nouveau débiteur est responsable.
Exemple :
La banque accepte que seul Paul soit redevable ➔ Tu es totalement libéré.
PARTIE 4. LES SITUATIONS VOISINES DE LA CESSION DE DETTE
1) Indication de paiement (article 1340 C. civ.)
- Le débiteur informe le créancier qu'un tiers paiera.
- Pas besoin d’accord du créancier ➔ Mais le créancier n'a aucun droit contre ce tiers.
Exemple :
Tu demandes à Emma de payer à ta place ➔ Si elle refuse finalement, la banque n’aura aucun recours contre elle sans accord spécial.
2) Novation par changement de débiteur
- Nouvelle obligation créée entre le créancier et un nouveau débiteur.
- La dette initiale est éteinte ➔ Nouveau lien.
Exemple :
- Ton contrat initial est annulé et remplacé par un nouveau contrat avec Paul.
- Création d'une nouvelle obligation avec un nouveau débiteur.
3) Délégation
- Le débiteur désigne un tiers pour exécuter la dette envers le créancier.
- Peut être délégation parfaite ou imparfaite selon les modalités choisies.
4) Stipulation pour autrui
- Une personne promet au créancier qu’un tiers exécutera une obligation, sans qu'il soit besoin d’un accord tripartite.
- Un tiers devient bénéficiaire automatiquement du droit d’obtenir une prestation.
- ➔ Moins besoin d’accords complexes entre les parties.
PARTIE 5. LE DROIT POSITIF : RÉGIME APRÈS L’ORDONNANCE DE 2016
Introduction
- Ordonnance de 2016 ➔ Création d'un régime spécifique de cession de dette.
- Article 1327 C. civ..
Conditions de validité
- Accord du créancier nécessaire.
- Écrit obligatoire (à peine de nullité).
Effets
- Solidarité possible si pas de libération expresse ➔ Le créancier peut agir contre l’ancien et le nouveau débiteur.
- Notification indispensable pour opposabilité.
Opposabilité des exceptions
- Le nouveau débiteur peut opposer au créancier certaines exceptions issues des rapports initiaux.
- ➔ Cela peut être aménagé par contrat.
Problème des sûretés
- Contrairement à la cession de créance ➔ Les garanties peuvent disparaître lors d’une cession de dette.
- ➔ Danger pour le créancier, sauf stipulation spéciale.
PRECISION
La réforme de 2016 a officiellement reconnu la cession de dette.
1) Conditions de validité
- Accord exprès du créancier obligatoire (article 1327 C. civ.).
- Forme écrite obligatoire, à peine de nullité.
➔ Le consentement du créancier est donc le cœur du mécanisme.
2) Effets entre parties
- Si le créancier libère expressément l'ancien débiteur ➔ Seul le nouveau débiteur est tenu.
- Sinon ➔ Solidarité entre ancien et nouveau débiteurs.
3) Opposabilité et exceptions
- Tant que le créancier n’est pas notifié, il peut agir contre l'ancien débiteur.
- Le nouveau débiteur peut opposer les mêmes exceptions que l'ancien.
Exemples d’exceptions :
- Nullité du contrat initial,
- Inexécution antérieure.
4) Attention : la perte de sûretés
- Contrairement à la cession de créance, les garanties (cautions, hypothèques...) ne suivent pas automatiquement.
- ➔ Sauf si stipulé expressément.
Conséquence :
La cession de dette est moins protectrice pour le créancier, sauf clauses spéciales.