D’après les travaux de P. Bourdieu et J-C Passeron --> Inégalités scolaires = faites par le décalage entre la culture scolaire et certaines cultures familiales = liée à la classe sociale des parents.
- Joue sur les codes langagiers
- Les références culturelles
- Les savoir-faire/ savoir-être comportementaux
Les appréciations scolaires délivrées par les enseignants = inconsciemment basées sur des appréciations sociales :
- 1/ Les qualificatifs les – valorisés = + adressés aux enfants de milieux populaires
- 2/ Les qualificatifs les + prestigieux = tendancielle ment + accordés aux enfants des classes supérieurs
- 3/ Les qualificatifs marquant une “bonne volonté culturelle” et soulignant la dimension laborieuse de la réussite = + adressé aux enfants des classes moyennes.
- 1 des fonctions essentielles du système scolaire = transmutation de la qualification sociale en qualification scolaire --> verdicts des enseignants
Limites de l'analyse Bourdieu/Passeron --> question de l’enracinement social de l’échec/la réussite scolaire sont les points de l’articulation entre :
- 1/ L’action éducatrice des familles
- 2/ Les pratiques pédagogiques des enseignants
- 3/ Le contexte scolaire dans lequel elles prennent place
- = peu traité par les 2 auteurs --> proposent une analyse générale du système scolaire = peu de concret de la relation entre enseignant/élève /familles et de son caractère situé dans l’espace et dans le temps.
- Important de le traiter car rapports à l’école des familles, du profil sociologique des enseignants comme du côté de l’évolution globale du système scolaire = gros changement depuis les années 60
“Avenir de classe et causalité du probable”
- élimination, relégation, rapidité d’évolution -> trois mécanismes de construction des inégalités scolaires dans Les Héritiers
- “élimination” = le + efficace surtout l'auto-élimination où le travail institutionnel de sélection est moindre = phénomène de “la causalité du probable”
- Classes moyennes = taux de fécondité le + bas en général = en limitant le nombre de membres de la famille on augmente ses chances de réussite
Quand l’école devient désirable
- Certaines recherches menées depuis les années 1980 ont contribué à réviser cette analyse
- Rapports à l’école = beaucoup changé entre les années 1950 et 1980
- Semblaient se défier de l’école au début du siècle, les familles des classes populaires et ouvrières = + converties au “souci scolaire”
Pour Jean-Pierre Terrail = changement dans une dynamique historique relativement longue
1/ 1880-1930 (lois ferry-arrivée du FP au pouvoir)
- Rapport ambivalent à l’école
- école “de classe”, instance - légitime d’apprentissage et de socialisation que l’espace de travail VS revendication d’un savoir pour toutes et tous
2/ 1930-1960
- Gratuité de l’enseignement secondaire et l’examen d’entrée en 6e + développement du salariat non-ouvrier
- = stimulation des rêves d’ascension sociale et un investissement accru de l’école
3/ 1960-1975 (unification su système scolaire français)
- Statut “d’instance décisive de la détermination sociale des identités individuelles” et scolarité obligatoire jusqu’à 16 ans
- Nombreux nouveaux emplois nécessitent une qualification scolaire --> visible niveau démographique
4/ 1975 = crise économique cyclique
- Décrochage du rapport entre niveau de diplôme/insertion
- Mais diplôme nécessaire pour un emploi stable = nécessite d’avoir des “stratégies scolaires” efficaces + difficile à mettre en place pour certains parents
- L’école faiblit mais sa croyance accroît = dissonance forte
- Peut questionner l’hypothèse de “l’auto-élimination” comme principale vecteur d’inégalité face à l’institution scolaire car préoccupation de la population française.
- Inégalités = pas faiblit malgré l’investissement des familles de classes populaires
- Décalage entre soucis scolaire et réussites scolaires fortement enracinées socialement --> hausse du temps moyen passé à l’accompagnement scolaire et aux discussions autour de l’école
- Fortes tensions dans familles populaires
Enquête auprès de vingt familles identifiées “stables” des classes populaires
- Parents investis dans le suivi des devoirs = valorisent la norme d’autonomie mais contraint à l’interventionnisme et au cadrage serré du travail de leurs enfants.
- Pointe le fait que certains non-dit de la pédagogie scolaire se basent sur des acquis familiaux --> moment des devoirs = “caisse de résonance” des décalage de socialisation primaire et scolaire et des “ratés” des apprentissages scolaires.
- Familles (mères en général ) = reposent le développement de stratégie pour limiter le décalage
- Leurs pratiques éducatives peuvent contribuer à désorienter l'enfant = “désorientation currilaire”
- Depuis les années 80 : invisibilisation accrue des actes pédagogiques = moins explicite
- Pour l’élève “double peine”: Ecole = travail jugé peu abouti et avoir perdu du temps et du sens.
- Mobilisation des parents à la fois “pour” et “contre” la réussite de ces élèves
Investissement de l’enjeu scolaire par les familles populaires mais peu de maîtrise des règles du jeu --> modes d’investissement peuvent prendre des formes variables:
- 1/ Pas uniforme, varie en intensité: sur-investissement/retrait
- 2/ Périphérique: achat de matérielle, dégager de la place pour un bureau, décharge pendant les examens, mais régulation du travail scolaire reste délégué à l’École
Effets à long terme:
- “décrochage cognitif” = “arriver à un niveau scolaire donné ne garantit pas les possibilités d’y acquérir les savoirs et connaissances scolaires associés
De l’autre côté de l’espace social = observe des changements de rapport à l’école par rapport à l’époque de Bourdieu et Passeron
- Démocratisation = hausse des standards et de la sélectivité --> risque d’échec - important pour les familles les mieux dotées
- “Parents stratèges” = choisir la bonne filière, le bon établissement --> connaissance du “jeu scolaire” car inflation de la valeur du diplôme
2 types de parents:
- 1/ Les technocrates (ingénieurs, cadres d’entreprise...)
- 2/ Les intellectuels (chercheurs, journalistes, artistes, cadres de la fonction publique...)
- 3/ Les médiateurs (travailleurs sociaux, éducateurs...)
- Profils différents en fonction de la structure de leur capital (+/- culturel/économique)
2 principes à l’origine de l’orientation des choix scolaires
- 1/ “élargir l’horizon culturel des adolescents” (intellectuels +)
- 2/ “retour sur investissement” (technocrates +)
- 3/ “favoriser le bien être et l’épanouissement” (médiateurs +)
3 types de stratégies -->
- 1/ Changer de domicile
- 2/ Investir des réseaux parallèles
- 3/ Coloniser l’école + tiraillement moraux car personnes + privilégiées que d'autres
Lien entre prolongement de la scolarité obligatoire et émergence de la catégorie d’« anormaux » jugés arriérés: lien entre (échec de la) scolarisation et médicalisation
- De + en + de pathologies scolaires prises en charge
- Témoignent de l’imposition progressive des préceptes médico-psychologiques comme registres interprétatifs légitimes des difficultés scolaires, au détriment des explications sociologiques ou pédagogiques
- Diagnostic médical comme « contre-pouvoir » au système scolaire et à ses verdicts stigmatisant
Désajustement accru des rapports à l’école des familles et des chances objectives de réussite
- Familles populaires, classes moyennes et supérieures = jamais partagé la même “inquiétude scolaire”
- Pourtant les chances de réussites restent fortement corrélées à l’origine sociale
- P. Bourdieu revient sur cette situation de tension vécus par les jeunes - dotées en capitaux culturels
- Parle des “exclus de l’intérieur” = élèves qui accèdent et se maintiennent jusqu’à un âge avancé dans le système scolaire sans pouvoir en tirer tous les bénéfices.
- De l’élimination à la relégation comme principal mécanisme de la reproduction sociale.
- P. Bourdieu -> pensée dynamique et relationnelle
Reproduction sociale : quand culture scolaire = culture familiale
- Enseignants = pas que exécutants --> individus sociaux --> analyser leurs modalités de sélection, leur recrutement social
- Permet de mieux comprendre la production / reproduction des inégalités scolaires à l’école.
L’enracinement social du “malaise enseignant”
- Le “prof”, figure commune de la vie des gens = beaucoup d’imaginaire
- Figure sociale très idéalisée - voir idéologisée dans les soc. démocratiques
- Surtout en France car l’imaginaire méritocratique est fort
- Masque une extrême diversité des conditions de travail, de recrutement de parcours
Médias = “malaise enseignant” --> Pourquoi sociologiquement
- 1/ Eloignement des journalistes de certains magazines et de leur lectorat de l’enseignement public = même phénomène avec l’Université et ses premiers cycles, que très peu de journalistes fréquentent en France plutôt formés dans les CPGE et les IEP.
- 2/ “Malaise” = reflet des importantes métamorphoses qu’a connu l’espace professionnel des enseignants
2 périodes depuis la fin de la 2e guerre mondiale :
- 1945-1980 = expansion scolaire, dynamique économique, développement de l’État social
- 1980-2010 = tassement des effectifs, décrochage formation/emploi, gestion de la diversité des publics.
Les 2 périodes n’ont rien de comparable
- Enseignants du secondaire -> groupe professionnel élitiste qui se “dilue” et se différencie au fur et à mesure que les réformes d’ouverture du secondaire entre 1950 et les années 1990
- Professeurs agrégés, figure standard de l’enseignement en lycée jusque dans les années 1940-50 se retrouvent mis en minorité
- "Groupes de statut" --> Max Weber: groupes sociaux qui occupent une position dominante non pas par leur détentions de capitaux économiques et/ou de biens matériels mais par leur style de vie, leurs atouts symboliques = changement de statut des professeurs
- Sentiment partagé quoique non uniforme = + fort chez les jeunes générations que celles entrées en fonction avant les années 1980
Recrutement + uniforme
- Au niveau scolaire = importants changements --> formation de + en + longue et universitarisées + les différences entre les deux extrêmes (agrégé·e·s/instituteur·rice.s) ont fortement diminué de ce côté
- Alignement du temps des formations des enseignants du primaire sur celle du secondaire sans que les hiérarchies symboliques ne soient forcément renversées
- Niveau de formation global des enseignants du secondaire comme du primaire se rapproche aujourd’hui du niveau moyen au sein de la population active dans son ensemble
- Figure sociale de l’enseignant est de - en - celle de l’intellectuel diplômé
- Contexte d’inflation scolaire -> pouvoir distinctif du diplôme diminue
- La masterisation des formations des enseignants primaires est le reflet de cette tension -> le seul concours ne suffisait plus à assurer un statut aux enseignants dans cette nouvelle configuration
- Autre indicateur du “statut”, la profession du conjoint et la dynamique conjugale -> renseigne sur l’attractivité des métiers, les ressources et les pratiques quotidiennes
- Avant cela, un point sur une métamorphose majeure des métiers de l’enseignement primaire et secondaire: leur féminisation
Enseignants vivent en couple moins homogames
- C’est l’inverse chez les enseignantes, surtout dans le secondaire -> changement de la figure sociale pour les femmes diplômées
- Tendance à constituer des “couples d’enseignants” diminue pour les enseignants mais tendance stagne ou s’inverse pour la dernière génération -> synonyme d’un repli sur soi et du sentiment d’appartenir à un groupe moins prestigieux ?
+“d’héritiers” et de “déclassés”: Une mutation du recrutement social
- Ces changement vont avoir des conséquences sur le recrutement social des enseignants
- En général l’allongement de la période des études pour accéder à tel ou tel poste s’accompagne d’un abandon plus marqué des jeunes et étudiants issus de milieux populaires
Auto-recrutement en hausse = bonne connaissance du “jeu scolaire”
- Devenir enseignant -> - 1 étape importante dans un parcours d’ascension sociale que reproduction d’une position héritée par les parents
- 2 mouvements convergents: “moyenisation” de la profession enseignante -> enseignant du secondaire devient à partir des années 1980 “un métier de classes moyennes”
- Enseignement secondaire attire - les enfants des classes supérieurs
- Perte de prestige relative entre les 2 générations = risque de sentiment de “déclassement” + important, surtout pour ceux issus des familles de classes moyennes et supérieures
Récapitulatif
- Niveau de diplôme moins distinctif, convergence primaire/secondaire
- Sentiment de reconnaissance sociale moindre
- Moindre exceptionnalité dans la les caractéristiques des conjoints
- Convergence des recrutements sociaux
Chiasme
- + de recrutement social; prestige social en baisse relative => ingrédients pour un sentiment de déclassement de la par des enseignants
- NB: professions enseignantes -> perspectives de progression assez faible + peu de reconversions
- Féminisation -> sentiment de débordement = double charge
Constats de la sous partie précédente = depuis 1980
- 1/ Diversification des publics scolaires et une intensification de la concurrence pour accéder aux meilleurs diplômes
- 2/ Une relative homogénéisation sociale du corps enseignant, dans le secondaire et le primaire, à la fois peu attractif pour les enfants des classes supérieures et - accessible pour les enfants des classes populaires
- Dans la configuration historique particulière des Héritiers = renforcement des systèmes de valeurs familiaux et scolaires.
- Dans la nouvelle situation que nous venons de décrire rapidement = modification des équilibres et complexification du schéma de la reproduction