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Post-Bac
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Histoire de la Philosophie - Le désir de Platon à Epicure

La Question du Plaisir : Le Plaisir est-il un Bien ou le Bien Suprême ?

  • Contexte et enjeu philosophique : Dans la philosophie antique, la question du plaisir est essentielle pour définir le mode de vie idéal et comprendre la nature du bonheur. Les Grecs s’interrogent sur le rôle du plaisir dans l’éthique : le plaisir doit-il être recherché pour lui-même, ou est-il un simple complément dans la quête du bien suprême ?


  • Formulations principales : Platon (dans Le Gorgias, Protagoras, et Philèbe), Aristote (Éthique à Nicomaque) et Épicure examinent le plaisir sous des angles variés, cherchant à déterminer s’il constitue un bien (quelque chose de désirable en soi) ou s’il doit être subordonné à d’autres finalités plus élevées, comme la vertu.


  • Positions divergentes :


  • Hédonisme épicurien : Épicure soutient que le plaisir est le bien suprême, mais recommande un plaisir mesuré et durable. L’objectif de l’hédonisme épicurien est d’atteindre l’ataraxie (tranquillité de l’âme) et la réduction des désirs superflus. Pour Épicure, le plaisir ne doit pas être recherché sans discernement : certains plaisirs (ceux qui entraînent des douleurs futures) sont à éviter.
  • Hédonisme radical des Cyrénaïques : Les Cyrénaïques, autre école hédoniste, prônent une recherche immédiate et intense des plaisirs, sans calcul sur leurs conséquences. Contrairement à Épicure, ils ne considèrent pas la stabilité du plaisir comme essentielle et valorisent l’intensité.
  • Anti-hédonisme stoïcien : Les Stoïciens rejettent l’idée que le plaisir soit un bien à poursuivre. Pour eux, la vertu est le bien suprême et le seul bien véritable ; le plaisir est une conséquence accessoire, mais il ne peut jamais constituer un but moral.
  • Positions intermédiaires : Certains philosophes (ex. Aristote) admettent que le plaisir peut être un bien lorsqu’il est associé à une activité vertueuse. Pour Aristote, le plaisir accompagne l’accomplissement des actions vertueuses, mais il n’est pas en lui-même l’objectif ultime.


Différence entre Éthique Antique et Morale Moderne

  • Éthique antique : Dans la pensée grecque, l’éthique est orientée vers le calcul rationnel des conséquences en vue du bonheur. Plutôt que de se plier à des règles absolues, les Grecs conçoivent l’éthique comme une démarche conditionnelle où chaque choix est guidé par un raisonnement menant à une finalité personnelle (souvent le bonheur).


  • Impératif hypothétique : Les normes éthiques antiques prennent la forme de conditions : "Si tu veux être heureux, alors vis de telle manière." L’action est donc orientée par un objectif (tel que l’eudaimonia, le bonheur) plutôt que par une obligation morale universelle.


  • Morale moderne : Contrairement à l’éthique grecque, la morale moderne repose souvent sur des principes universels et inconditionnels (ex. « tu ne tueras point »). L’action morale découle de l’obéissance à des lois impératives qui ne nécessitent pas de justification par un calcul ou une fin personnelle.


  • Différences clés :


  • La finalité : En éthique grecque, le but est l’accomplissement de soi (souvent par la recherche du bonheur et de la vertu). En morale moderne, le but est l’obéissance à une règle, même si elle ne garantit pas directement le bonheur.


  • Application : La morale moderne impose des interdits ou des impératifs sans nécessairement s’adapter aux circonstances individuelles, tandis que l’éthique antique propose une flexibilité fondée sur un raisonnement pratique et une adaptation aux situations.


Le Bonheur et la Vie Bonne : L’Eudémonisme Grec

  • Objectif de la philosophie grecque : La philosophie antique cherche à définir la « vie bonne » qui permettrait à chacun de trouver le bonheur (eudaimonia). Le bonheur est perçu comme l’accomplissement de la nature humaine et la réalisation de la vertu.


La notion de vertu (aretè) :

  • Définition : La vertu, ou aretè, représente l’excellence et l’accomplissement de la nature propre de chaque individu. Elle ne se limite pas à des actions moralement bonnes ; elle inclut la réalisation personnelle dans son ensemble (exemple : le courage pour le guerrier, la sagesse pour le philosophe).


  • Distinction avec la morale religieuse : Contrairement à la vertu chrétienne, qui peut impliquer le sacrifice de soi, la vertu grecque consiste en une expression de soi et une élévation personnelle sans nécessairement impliquer de renoncement.


Trois formes de vie selon les philosophes grecs :



  • Vie contemplative : Idéalisée par Platon et Aristote, elle met en avant la recherche de la vérité, de la sagesse, et de la compréhension des réalités métaphysiques. Elle est souvent vue comme la forme de vie la plus élevée.


  • Vie de plaisir : Surtout valorisée par les hédonistes, cette vie place le plaisir au centre des motivations, mais elle est critiquée par d’autres philosophes pour ses excès potentiels (intempérance).


  • Vie active : Cette forme de vie inclut l’engagement pratique dans la société et la participation politique. Les Grecs la valorisent pour sa contribution à la cité et son alignement avec l’idéal du citoyen vertueux.


Le Calcul du Plaisir : Une Condition de la Vie Morale



  • Principe du calcul des plaisirs :


  • Hédonisme rationnel : Selon Épicure et d’autres, le plaisir doit être évalué en fonction de sa durée, de son intensité et de ses conséquences. Un plaisir qui mène à des douleurs futures (par exemple l’excès de nourriture qui conduit à la maladie) doit être évité, tandis qu’un plaisir modéré et stable est recherché.


  • Maîtrise de soi (enkrateia) : Dans la pensée grecque, la maîtrise de soi est essentielle pour ne pas être dominé par ses désirs. Être esclave de ses plaisirs (intempérance) est perçu comme une forme de dépendance qui empêche l’individu de s’accomplir pleinement.


Critique de l’intempérance : Platon et d’autres considèrent que la poursuite excessive des plaisirs mène à l’instabilité et au dérèglement de l’âme. Le calcul des plaisirs, en revanche, permet de maintenir un équilibre et d’éviter la perte de contrôle.

Figures et Textes Importants de la Philosophie Antique

  • Socrate et Platon :


  • Le Gorgias : Dans ce dialogue, Socrate confronte Calliclès, qui défend une vie de plaisir sans retenue. Socrate argue pour une vie où le plaisir est régulé par la raison, montrant que le bonheur ne peut être atteint que dans l’harmonie intérieure.


  • Le Protagoras : Dialogue dans lequel Socrate défend la théorie de la vertu-science, affirmant que bien agir découle du savoir. Cette perspective sous-entend que le mal est une erreur d’ignorance, et que connaître le bien suffit pour le poursuivre.


  • Théorie de la vertu-science : Dans le Protagoras, Socrate affirme que la vertu est fondamentalement liée à la connaissance ; un acte mauvais résulte d’une erreur de jugement, et non d’une mauvaise volonté. Cette théorie, radicale, soutient que « nul n’est méchant volontairement ».


  • Épicure :


  • Idéal d’ataraxie : Épicure prône une forme d’hédonisme fondée sur la modération. En réduisant ses désirs, on parvient à une paix intérieure durable (ataraxie) et on évite les plaisirs fugaces qui mènent à des douleurs.


  • Distinction des plaisirs : Épicure classe les plaisirs en nécessaires (qui sont essentiels à la survie et la tranquillité) et non nécessaires (qui entraînent souvent des désirs excessifs et des troubles).


  • Stoïciens :


  • Primauté de la vertu : Les Stoïciens soutiennent que la vertu est le seul véritable bien et que le plaisir est sans valeur en tant que fin. Leur idéal est l’auto-suffisance et la maîtrise de soi, indépendamment des plaisirs ou des douleurs.


Application Pratique et Synthèse : Vers une Vie Éthique


  • Plaisir et Bien : Une complémentarité sous conditions :


  • Le plaisir comme bien subordonné : Les philosophes antiques, notamment Platon, considèrent que le plaisir doit être encadré par la raison et ne peut être une fin en soi. Seuls les plaisirs qui contribuent au développement de l’âme et de la vertu sont dignes d’être recherchés.


  • Les plaisirs intellectuels comme supérieurs : Platon met en avant les plaisirs intellectuels, qui sont perçus comme plus durables et moins dangereux que les plaisirs corporels.


Maîtrise de soi et éthique de l’accomplissement :



  • L’idéal de maîtrise de soi (enkrateia) : Pour être éthique, il est essentiel de contrôler ses désirs et d’éviter l’esclavage aux plaisirs immédiats. La maîtrise de soi est vue comme une condition de la liberté et de la réalisation personnelle.


  • L’éthique comme voie vers l’accomplissement : Contrairement à la morale moderne qui impose souvent des règles rigides, l’éthique antique propose un cadre où l’individu est encouragé à développer ses qualités propres et à s’harmoniser avec la nature, notamment le cosmos, pour atteindre le bonheur et la vertu.


A retenir :

  1. Plaisir (ἡδονή - hédoné)
  • Définition : Expérience de satisfaction ou de bien-être. Dans la philosophie grecque, le plaisir est souvent analysé pour déterminer s'il peut être un bien en soi ou s’il doit être subordonné à la raison.
  • Positions : Les hédonistes, comme Épicure, considèrent le plaisir comme un bien suprême, tandis que les Stoïciens le voient comme un facteur secondaire, dépendant de la vertu.
  1. Vertu (ἀρετή - arétè)
  • Définition : Excellence ou accomplissement de la nature propre d’un individu, que ce soit sur le plan moral, intellectuel ou physique. La vertu est la capacité d’atteindre le meilleur de soi-même, non seulement en termes de moralité mais aussi de compétences et d’aptitudes.
  • Exemples : Courage (andreia), sagesse (sophia), tempérance (sophrosynè), justice (dikaiosynè).
  1. Bonheur (εὐδαιμονία - eudaimonia)
  • Définition : État de bien-être complet, souvent traduit par « bonheur » ou « épanouissement ». Dans la philosophie grecque, l’eudaimonia est le but ultime de la vie humaine, atteinte par la vertu et une vie conforme à la raison.
  • Conception : Selon Aristote, le bonheur résulte de la vie vertueuse et de l’actualisation des potentialités d’un individu.
  1. Bien (ἀγαθόν - agathon)
  • Définition : Ce qui est désirable, souvent associé à ce qui est moralement bon ou utile pour atteindre la fin ultime. Pour les Grecs, le bien peut être absolu (comme la vertu chez les Stoïciens) ou relatif (comme le plaisir calculé chez Épicure).
  • Souverain Bien (τὸ ἀγαθὸν - to agathon) : Concept du bien suprême, la fin ultime que l’on recherche dans la vie (ex. : le bonheur, la vertu).
  1. Ataraxie (ἀταραξία - ataraxia)
  • Définition : Tranquillité de l’âme, absence de trouble et d’agitation intérieure. C’est un état d’équilibre recherché par Épicure et les Stoïciens, où l’individu reste impassible face aux plaisirs et aux douleurs.
  • Contexte : Épicure prône l’ataraxie comme condition du bonheur véritable, obtenue par la réduction des désirs inutiles.
  1. Maîtrise de soi (ἐγκράτεια - enkrateia)
  • Définition : Capacité à contrôler ses désirs et ses impulsions en fonction de la raison. La maîtrise de soi est considérée comme une vertu essentielle pour vivre une vie éthique et éviter l’intempérance.
  • Contexte philosophique : Enkrateia est valorisée par les Stoïciens et Socrate comme la clé pour ne pas être esclave de ses passions.
  1. Intempérance (ἀκολασία - akolasia)
  • Définition : Manque de maîtrise de soi, indulgence excessive envers les désirs corporels et plaisirs immédiats. Pour les Grecs, l’intempérance est vue comme un obstacle à l’épanouissement personnel et au bonheur.
  • Contexte : Socrate et Platon considèrent l’intempérance comme un signe de dépendance qui empêche l’harmonie intérieure et le développement moral.
  1. Raison (νοῦς - nous)
  • Définition : Faculté intellectuelle supérieure qui permet de comprendre et de juger. La raison est centrale dans la philosophie grecque, car elle est le guide de l’action éthique et de la vie vertueuse.
  • Fonction : Le nous est ce qui permet de distinguer le bien du mal, de calculer les plaisirs, et de maîtriser les désirs, conformément aux exigences de la vie philosophique.
  1. Tripartition de l'âme (τριμερής ψυχή - trimérès psychè)
  • Définition : Division de l’âme en trois parties : la raison (νοῦς - nous), les émotions/volonté (θυμός - thymos), et les désirs (ἐπιθυμία - epithymia).
  • Contexte : Platon développe cette tripartition dans La République, suggérant que chaque partie de l’âme doit être équilibrée pour une vie juste et harmonieuse.
  1. Vie bonne (ζῆν καλῶς - zèn kalôs)
  • Définition : Mode de vie idéal, où l’individu agit conformément à la vertu et recherche l’harmonie intérieure. La vie bonne est l’objectif éthique central pour de nombreux philosophes grecs, visant l’accomplissement personnel.
  • Exemples : Vie contemplative (bios theōrētikos) pour ceux qui recherchent la sagesse, vie active (bios praktikos) pour ceux engagés dans l’action et la politique, et vie hédoniste pour ceux recherchant les plaisirs.
  1. Dialectique (διαλεκτική - dialektikè)
  • Définition : Méthode de raisonnement et de dialogue visant à atteindre la vérité par la confrontation d’opinions différentes. Dans la philosophie grecque, la dialectique est utilisée pour examiner les concepts fondamentaux (bien, justice, vertu).
  • Contexte : Platon utilise la dialectique dans ses dialogues pour clarifier des idées et pour permettre l’ascension vers la connaissance du bien.
  1. Hypothèse des Formes (ἰδέαι - ideai)
  • Définition : Théorie platonicienne selon laquelle il existe des réalités idéales et immuables (les Formes ou Idées) qui transcendent le monde physique et sont la source de toute connaissance véritable.
  • Exemple : La Forme du Beau, du Bien, ou de la Justice, qui sont des modèles éternels des qualités que nous percevons dans le monde.
  1. Akrasia (ἀκρασία - akrasia)
  • Définition : Concept de l’incontinence morale, ou faiblesse de la volonté, dans laquelle une personne agit contre son meilleur jugement en étant dominée par ses passions.
  • Contexte : Socrate rejette l’idée de l’akrasia, affirmant que le mal est fait par ignorance, tandis qu’Aristote l’explore comme un véritable conflit entre raison et désir.
  1. Loi (νόμος - nomos)
  • Définition : Règle ou convention sociale, par opposition à la nature (physis). Le nomos est souvent perçu comme un ensemble de normes créées par les hommes, sujettes à changement et influencées par la société.
  • Contexte philosophique : Les sophistes comme Calliclès opposent nomos à physis pour justifier que certaines lois morales sont imposées pour contenir les plus forts.
  1. Physis (φύσις - physis)
  • Définition : Nature ou essence intrinsèque d’un être ou d’une chose. Dans la philosophie grecque, la physis représente ce qui est inné, immuable et indépendant des conventions humaines.
  • Contexte : La physis est souvent opposée au nomos, surtout dans les débats sophistiques, pour défendre une morale naturelle et une hiérarchie entre les individus.


Post-Bac
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Histoire de la Philosophie - Le désir de Platon à Epicure

La Question du Plaisir : Le Plaisir est-il un Bien ou le Bien Suprême ?

  • Contexte et enjeu philosophique : Dans la philosophie antique, la question du plaisir est essentielle pour définir le mode de vie idéal et comprendre la nature du bonheur. Les Grecs s’interrogent sur le rôle du plaisir dans l’éthique : le plaisir doit-il être recherché pour lui-même, ou est-il un simple complément dans la quête du bien suprême ?


  • Formulations principales : Platon (dans Le Gorgias, Protagoras, et Philèbe), Aristote (Éthique à Nicomaque) et Épicure examinent le plaisir sous des angles variés, cherchant à déterminer s’il constitue un bien (quelque chose de désirable en soi) ou s’il doit être subordonné à d’autres finalités plus élevées, comme la vertu.


  • Positions divergentes :


  • Hédonisme épicurien : Épicure soutient que le plaisir est le bien suprême, mais recommande un plaisir mesuré et durable. L’objectif de l’hédonisme épicurien est d’atteindre l’ataraxie (tranquillité de l’âme) et la réduction des désirs superflus. Pour Épicure, le plaisir ne doit pas être recherché sans discernement : certains plaisirs (ceux qui entraînent des douleurs futures) sont à éviter.
  • Hédonisme radical des Cyrénaïques : Les Cyrénaïques, autre école hédoniste, prônent une recherche immédiate et intense des plaisirs, sans calcul sur leurs conséquences. Contrairement à Épicure, ils ne considèrent pas la stabilité du plaisir comme essentielle et valorisent l’intensité.
  • Anti-hédonisme stoïcien : Les Stoïciens rejettent l’idée que le plaisir soit un bien à poursuivre. Pour eux, la vertu est le bien suprême et le seul bien véritable ; le plaisir est une conséquence accessoire, mais il ne peut jamais constituer un but moral.
  • Positions intermédiaires : Certains philosophes (ex. Aristote) admettent que le plaisir peut être un bien lorsqu’il est associé à une activité vertueuse. Pour Aristote, le plaisir accompagne l’accomplissement des actions vertueuses, mais il n’est pas en lui-même l’objectif ultime.


Différence entre Éthique Antique et Morale Moderne

  • Éthique antique : Dans la pensée grecque, l’éthique est orientée vers le calcul rationnel des conséquences en vue du bonheur. Plutôt que de se plier à des règles absolues, les Grecs conçoivent l’éthique comme une démarche conditionnelle où chaque choix est guidé par un raisonnement menant à une finalité personnelle (souvent le bonheur).


  • Impératif hypothétique : Les normes éthiques antiques prennent la forme de conditions : "Si tu veux être heureux, alors vis de telle manière." L’action est donc orientée par un objectif (tel que l’eudaimonia, le bonheur) plutôt que par une obligation morale universelle.


  • Morale moderne : Contrairement à l’éthique grecque, la morale moderne repose souvent sur des principes universels et inconditionnels (ex. « tu ne tueras point »). L’action morale découle de l’obéissance à des lois impératives qui ne nécessitent pas de justification par un calcul ou une fin personnelle.


  • Différences clés :


  • La finalité : En éthique grecque, le but est l’accomplissement de soi (souvent par la recherche du bonheur et de la vertu). En morale moderne, le but est l’obéissance à une règle, même si elle ne garantit pas directement le bonheur.


  • Application : La morale moderne impose des interdits ou des impératifs sans nécessairement s’adapter aux circonstances individuelles, tandis que l’éthique antique propose une flexibilité fondée sur un raisonnement pratique et une adaptation aux situations.


Le Bonheur et la Vie Bonne : L’Eudémonisme Grec

  • Objectif de la philosophie grecque : La philosophie antique cherche à définir la « vie bonne » qui permettrait à chacun de trouver le bonheur (eudaimonia). Le bonheur est perçu comme l’accomplissement de la nature humaine et la réalisation de la vertu.


La notion de vertu (aretè) :

  • Définition : La vertu, ou aretè, représente l’excellence et l’accomplissement de la nature propre de chaque individu. Elle ne se limite pas à des actions moralement bonnes ; elle inclut la réalisation personnelle dans son ensemble (exemple : le courage pour le guerrier, la sagesse pour le philosophe).


  • Distinction avec la morale religieuse : Contrairement à la vertu chrétienne, qui peut impliquer le sacrifice de soi, la vertu grecque consiste en une expression de soi et une élévation personnelle sans nécessairement impliquer de renoncement.


Trois formes de vie selon les philosophes grecs :



  • Vie contemplative : Idéalisée par Platon et Aristote, elle met en avant la recherche de la vérité, de la sagesse, et de la compréhension des réalités métaphysiques. Elle est souvent vue comme la forme de vie la plus élevée.


  • Vie de plaisir : Surtout valorisée par les hédonistes, cette vie place le plaisir au centre des motivations, mais elle est critiquée par d’autres philosophes pour ses excès potentiels (intempérance).


  • Vie active : Cette forme de vie inclut l’engagement pratique dans la société et la participation politique. Les Grecs la valorisent pour sa contribution à la cité et son alignement avec l’idéal du citoyen vertueux.


Le Calcul du Plaisir : Une Condition de la Vie Morale



  • Principe du calcul des plaisirs :


  • Hédonisme rationnel : Selon Épicure et d’autres, le plaisir doit être évalué en fonction de sa durée, de son intensité et de ses conséquences. Un plaisir qui mène à des douleurs futures (par exemple l’excès de nourriture qui conduit à la maladie) doit être évité, tandis qu’un plaisir modéré et stable est recherché.


  • Maîtrise de soi (enkrateia) : Dans la pensée grecque, la maîtrise de soi est essentielle pour ne pas être dominé par ses désirs. Être esclave de ses plaisirs (intempérance) est perçu comme une forme de dépendance qui empêche l’individu de s’accomplir pleinement.


Critique de l’intempérance : Platon et d’autres considèrent que la poursuite excessive des plaisirs mène à l’instabilité et au dérèglement de l’âme. Le calcul des plaisirs, en revanche, permet de maintenir un équilibre et d’éviter la perte de contrôle.

Figures et Textes Importants de la Philosophie Antique

  • Socrate et Platon :


  • Le Gorgias : Dans ce dialogue, Socrate confronte Calliclès, qui défend une vie de plaisir sans retenue. Socrate argue pour une vie où le plaisir est régulé par la raison, montrant que le bonheur ne peut être atteint que dans l’harmonie intérieure.


  • Le Protagoras : Dialogue dans lequel Socrate défend la théorie de la vertu-science, affirmant que bien agir découle du savoir. Cette perspective sous-entend que le mal est une erreur d’ignorance, et que connaître le bien suffit pour le poursuivre.


  • Théorie de la vertu-science : Dans le Protagoras, Socrate affirme que la vertu est fondamentalement liée à la connaissance ; un acte mauvais résulte d’une erreur de jugement, et non d’une mauvaise volonté. Cette théorie, radicale, soutient que « nul n’est méchant volontairement ».


  • Épicure :


  • Idéal d’ataraxie : Épicure prône une forme d’hédonisme fondée sur la modération. En réduisant ses désirs, on parvient à une paix intérieure durable (ataraxie) et on évite les plaisirs fugaces qui mènent à des douleurs.


  • Distinction des plaisirs : Épicure classe les plaisirs en nécessaires (qui sont essentiels à la survie et la tranquillité) et non nécessaires (qui entraînent souvent des désirs excessifs et des troubles).


  • Stoïciens :


  • Primauté de la vertu : Les Stoïciens soutiennent que la vertu est le seul véritable bien et que le plaisir est sans valeur en tant que fin. Leur idéal est l’auto-suffisance et la maîtrise de soi, indépendamment des plaisirs ou des douleurs.


Application Pratique et Synthèse : Vers une Vie Éthique


  • Plaisir et Bien : Une complémentarité sous conditions :


  • Le plaisir comme bien subordonné : Les philosophes antiques, notamment Platon, considèrent que le plaisir doit être encadré par la raison et ne peut être une fin en soi. Seuls les plaisirs qui contribuent au développement de l’âme et de la vertu sont dignes d’être recherchés.


  • Les plaisirs intellectuels comme supérieurs : Platon met en avant les plaisirs intellectuels, qui sont perçus comme plus durables et moins dangereux que les plaisirs corporels.


Maîtrise de soi et éthique de l’accomplissement :



  • L’idéal de maîtrise de soi (enkrateia) : Pour être éthique, il est essentiel de contrôler ses désirs et d’éviter l’esclavage aux plaisirs immédiats. La maîtrise de soi est vue comme une condition de la liberté et de la réalisation personnelle.


  • L’éthique comme voie vers l’accomplissement : Contrairement à la morale moderne qui impose souvent des règles rigides, l’éthique antique propose un cadre où l’individu est encouragé à développer ses qualités propres et à s’harmoniser avec la nature, notamment le cosmos, pour atteindre le bonheur et la vertu.


A retenir :

  1. Plaisir (ἡδονή - hédoné)
  • Définition : Expérience de satisfaction ou de bien-être. Dans la philosophie grecque, le plaisir est souvent analysé pour déterminer s'il peut être un bien en soi ou s’il doit être subordonné à la raison.
  • Positions : Les hédonistes, comme Épicure, considèrent le plaisir comme un bien suprême, tandis que les Stoïciens le voient comme un facteur secondaire, dépendant de la vertu.
  1. Vertu (ἀρετή - arétè)
  • Définition : Excellence ou accomplissement de la nature propre d’un individu, que ce soit sur le plan moral, intellectuel ou physique. La vertu est la capacité d’atteindre le meilleur de soi-même, non seulement en termes de moralité mais aussi de compétences et d’aptitudes.
  • Exemples : Courage (andreia), sagesse (sophia), tempérance (sophrosynè), justice (dikaiosynè).
  1. Bonheur (εὐδαιμονία - eudaimonia)
  • Définition : État de bien-être complet, souvent traduit par « bonheur » ou « épanouissement ». Dans la philosophie grecque, l’eudaimonia est le but ultime de la vie humaine, atteinte par la vertu et une vie conforme à la raison.
  • Conception : Selon Aristote, le bonheur résulte de la vie vertueuse et de l’actualisation des potentialités d’un individu.
  1. Bien (ἀγαθόν - agathon)
  • Définition : Ce qui est désirable, souvent associé à ce qui est moralement bon ou utile pour atteindre la fin ultime. Pour les Grecs, le bien peut être absolu (comme la vertu chez les Stoïciens) ou relatif (comme le plaisir calculé chez Épicure).
  • Souverain Bien (τὸ ἀγαθὸν - to agathon) : Concept du bien suprême, la fin ultime que l’on recherche dans la vie (ex. : le bonheur, la vertu).
  1. Ataraxie (ἀταραξία - ataraxia)
  • Définition : Tranquillité de l’âme, absence de trouble et d’agitation intérieure. C’est un état d’équilibre recherché par Épicure et les Stoïciens, où l’individu reste impassible face aux plaisirs et aux douleurs.
  • Contexte : Épicure prône l’ataraxie comme condition du bonheur véritable, obtenue par la réduction des désirs inutiles.
  1. Maîtrise de soi (ἐγκράτεια - enkrateia)
  • Définition : Capacité à contrôler ses désirs et ses impulsions en fonction de la raison. La maîtrise de soi est considérée comme une vertu essentielle pour vivre une vie éthique et éviter l’intempérance.
  • Contexte philosophique : Enkrateia est valorisée par les Stoïciens et Socrate comme la clé pour ne pas être esclave de ses passions.
  1. Intempérance (ἀκολασία - akolasia)
  • Définition : Manque de maîtrise de soi, indulgence excessive envers les désirs corporels et plaisirs immédiats. Pour les Grecs, l’intempérance est vue comme un obstacle à l’épanouissement personnel et au bonheur.
  • Contexte : Socrate et Platon considèrent l’intempérance comme un signe de dépendance qui empêche l’harmonie intérieure et le développement moral.
  1. Raison (νοῦς - nous)
  • Définition : Faculté intellectuelle supérieure qui permet de comprendre et de juger. La raison est centrale dans la philosophie grecque, car elle est le guide de l’action éthique et de la vie vertueuse.
  • Fonction : Le nous est ce qui permet de distinguer le bien du mal, de calculer les plaisirs, et de maîtriser les désirs, conformément aux exigences de la vie philosophique.
  1. Tripartition de l'âme (τριμερής ψυχή - trimérès psychè)
  • Définition : Division de l’âme en trois parties : la raison (νοῦς - nous), les émotions/volonté (θυμός - thymos), et les désirs (ἐπιθυμία - epithymia).
  • Contexte : Platon développe cette tripartition dans La République, suggérant que chaque partie de l’âme doit être équilibrée pour une vie juste et harmonieuse.
  1. Vie bonne (ζῆν καλῶς - zèn kalôs)
  • Définition : Mode de vie idéal, où l’individu agit conformément à la vertu et recherche l’harmonie intérieure. La vie bonne est l’objectif éthique central pour de nombreux philosophes grecs, visant l’accomplissement personnel.
  • Exemples : Vie contemplative (bios theōrētikos) pour ceux qui recherchent la sagesse, vie active (bios praktikos) pour ceux engagés dans l’action et la politique, et vie hédoniste pour ceux recherchant les plaisirs.
  1. Dialectique (διαλεκτική - dialektikè)
  • Définition : Méthode de raisonnement et de dialogue visant à atteindre la vérité par la confrontation d’opinions différentes. Dans la philosophie grecque, la dialectique est utilisée pour examiner les concepts fondamentaux (bien, justice, vertu).
  • Contexte : Platon utilise la dialectique dans ses dialogues pour clarifier des idées et pour permettre l’ascension vers la connaissance du bien.
  1. Hypothèse des Formes (ἰδέαι - ideai)
  • Définition : Théorie platonicienne selon laquelle il existe des réalités idéales et immuables (les Formes ou Idées) qui transcendent le monde physique et sont la source de toute connaissance véritable.
  • Exemple : La Forme du Beau, du Bien, ou de la Justice, qui sont des modèles éternels des qualités que nous percevons dans le monde.
  1. Akrasia (ἀκρασία - akrasia)
  • Définition : Concept de l’incontinence morale, ou faiblesse de la volonté, dans laquelle une personne agit contre son meilleur jugement en étant dominée par ses passions.
  • Contexte : Socrate rejette l’idée de l’akrasia, affirmant que le mal est fait par ignorance, tandis qu’Aristote l’explore comme un véritable conflit entre raison et désir.
  1. Loi (νόμος - nomos)
  • Définition : Règle ou convention sociale, par opposition à la nature (physis). Le nomos est souvent perçu comme un ensemble de normes créées par les hommes, sujettes à changement et influencées par la société.
  • Contexte philosophique : Les sophistes comme Calliclès opposent nomos à physis pour justifier que certaines lois morales sont imposées pour contenir les plus forts.
  1. Physis (φύσις - physis)
  • Définition : Nature ou essence intrinsèque d’un être ou d’une chose. Dans la philosophie grecque, la physis représente ce qui est inné, immuable et indépendant des conventions humaines.
  • Contexte : La physis est souvent opposée au nomos, surtout dans les débats sophistiques, pour défendre une morale naturelle et une hiérarchie entre les individus.


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