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Post-Bac

Histoire de la justice

CH 3 : Réformer la justice du Moyen Âge aux Temps modernes


I. La Réformation médiévale de la justice : une politique de la monarchie


L’idée de réformation et le bien commun :

  • Origine : Inspirée des écrits d’Aristote et développée par Thomas d’Aquin, l’idée de bien commun devient une notion clé du bon gouvernement.
  • Thomas d’Aquin : Associe le bien commun à l’idée de "Caritas" (charité) et "ordo caritatis" (ordre de charité), prônant une monarchie au service de la communauté. Le roi incarne la mission de garantir le bien commun, opposée à la tyrannie, où le prince agit dans son intérêt personnel.
  • Éducation des princes : Cette réflexion influence les manuels pour les princes, établissant le bien commun comme critère d’un bon gouvernement et base de la légitimité.


Les enquêtes de réparation sous Saint Louis (13e siècle) :

  • Objectif : Saint Louis initie des enquêtes de réparation pour surveiller les officiers royaux et répondre aux plaintes des sujets, redressant ainsi les abus et favorisant le dialogue avec le peuple.
  • Processus : Les enquêtes incluent trois acteurs : déposants (justiciables), officiers royaux, et enquêteurs (qui prononcent une sentence).
  • Impact : Saint Louis renforce l'autorité royale, affirmant l’attention du roi pour ses sujets et promouvant le bien commun.


Utilisation politique de la réformation au 14e siècle :

  • Ordonnance de 1254 : Première ordonnance réformatrice de Saint Louis, visant à une amélioration générale du royaume plutôt qu’une simple réparation individuelle.
  • Influence : Cette ordonnance sert de modèle pour ses successeurs, instaurant une vision globale de la réformation pour tout le royaume.


La réformation comme réponse aux critiques de l’Église (Philippe le Bel et Boniface VIII, début 14e) :

  • Conflit : Le pape accuse Philippe le Bel de mauvaise gouvernance ; en réponse, le roi s'engage à la réformation du royaume.
  • Ordonnance de 1303 : Philippe le Bel édicte cette ordonnance pour réformer le royaume en prenant exemple sur Saint Louis, marquant un tournant vers une réformation plus structurelle et politique.


II. Les ordonnances modernes de réformation (16e-17e siècles)


Le véhicule législatif et continuité médiévale :

  • Ordonnances variées : Les ordonnances de réformation se diversifient et couvrent différents domaines sans systématisation, répondant aux doléances des États généraux ou locaux.
  • Exemples marquants :
  • Ordonnance de Villers-Cotterêts (1539) : Officialise le français dans les actes juridiques, limite la juridiction ecclésiastique, et introduit la procédure inquisitoire d’office en matière pénale.
  • Ordonnances de réformation par le chancelier : Orléans (1561) et Moulins (1566) pour réformer la justice ecclésiastique, les finances municipales, et les juridictions civiles.


Ordonnances de codification au 17e siècle :

  • Objectif : Organiser et rationaliser les lois dans des domaines précis, établissant un cadre clair pour réduire les interprétations et améliorer la justice.
  • Ordonnances de Colbert (1667-1685) : Elles constituent des codes juridiques spécifiques :
  • 1667 : Procédure civile
  • 1669 : Eaux et forêts
  • 1670 : Procédure criminelle
  • 1673 : Commerce terrestre
  • 1681 : Marine
  • 1685 : Code Noir pour les colonies


Influence des magistrats et des réformes de Lamoignon :

  • Guillaume Lamoignon : Premier président du Parlement de Paris, il propose une codification inspirée des compilations de Justinien pour unifier le droit sous l’autorité royale.
  • Arrêtés de Lamoignon (1669) : Ces documents posent les bases d’un droit commun codifié, influençant les ordonnances de codification de Colbert.


III. Synthèse et importance pour l’évolution du droit français

  • Réformation médiévale : Pose les fondations d'une justice liée au bien commun et au contrôle de l’administration royale.
  • Ordonnances modernes : Transforment la réformation en un instrument politique et législatif visant à centraliser et codifier le droit, inspirant les codes napoléoniens.
  • Évolution vers un État de droit : La réformation passe d’une réponse ponctuelle aux abus à une codification systématique, posant les bases d’une justice claire, centralisée et uniforme pour la monarchie absolue.


La réforme judiciaire en France du XVIIe au XVIIIe siècle


I. Les domaines d’intervention des ordonnances de réformation


Procédure civile : Ordonnance de 1667 – « Code Louis »

  • Contexte et structure : Ce texte est souvent perçu comme un véritable code de procédure, conçu par l’auteur Pussort, défenseur des idées absolutistes visant à limiter le pouvoir des parlements. Il se distingue par une structure rigoureuse organisée en 35 titres.
  • Uniformité : Première uniformisation de la procédure civile à l’échelle du royaume, où chaque procès suit la même procédure.
  • Caractéristiques : La procédure civile est simplifiée et écrite. Les « avoués » jouent un rôle central dans la représentation de la partie dans la procédure, sans prendre part aux autres aspects de la défense.
  • Impact : Accélération et clarification de la justice civile, mettant en avant l’importance de l’écrit. Ce texte inspirera le Code de procédure civile napoléonien.


Procédure criminelle : Ordonnance de 1670

  • Contexte européen : Cette ordonnance est influencée par des textes comme la Caroline de Charles Quint, une première codification européenne avec une structure inquisitoire et rigoureuse.
  • Innovation en matière pénale :
  • Procédure inquisitoire : Renforcement du rôle du juge, autorisé à interroger l’accusé sans défenseur, dans une procédure souvent secrète.
  • Éléments clés :
  • Torture : Permise pour obtenir des aveux, sans modalités précises (variations locales).
  • Appel obligatoire : Les condamnations à mort doivent être confirmées par le Parlement.
  • Hiérarchisation judiciaire : Limitation de la justice à deux degrés, et renforcement du contrôle sur les justices seigneuriales.
  • Garantie accrue : Introduction de garanties contre la justice prévôtale.
  • Déroulement du procès criminel : En quatre étapes clés :


Mise en mouvement de l’action publique : Par plainte, dénonciation, ou initiative du juge.

Premier degré d’instruction : Collecte des preuves et témoignages ; interrogatoire de l’accusé.

Instruction extraordinaire : Second degré d’instruction avec confrontation témoin/accusé.


  1. Jugement : Rendu par une formation collégiale, avec le rôle central du juge et un dernier interrogatoire de l’accusé (sans assistance).
  • Résultats possibles : Jugement interlocutoire (demandant des preuves justificatives) ou définitif sur la culpabilité.


  1. Évolution des pratiques au XVIIIe siècle :
  • Mémoires judiciaires (factum) : Nouvelle pratique permettant aux avocats de rédiger des mémoires extérieurs pour défendre leurs clients, favorisant ainsi la défense malgré l’absence de représentation en procès.


II. Les réformes de l’institution judiciaire

  1. Un discours de réforme inspiré par des critiques et la crise de la justice sous l’Ancien Régime
  • Critiques de l’organisation judiciaire :
  • Multiplicité des juridictions : Complexité pour le justiciable face à des juridictions multiples et souvent concurrentes.
  • Patrimonialité des offices : Système des épices qui alourdit les coûts de la justice pour les justiciables et dilue le lien des magistrats avec le pouvoir royal.
  • Crise institutionnelle : Les cours souveraines sous Louis XIV perdent en indépendance, devenant des juridictions « supérieures » mais non souveraines.


  • Critiques de la procédure pénale inquisitoire :
  • Secret et absence de défense : Accusations de partialité envers la procédure secrète sans justification de décision.
  • Défenseurs et opposants : Voltaire et d’autres philosophes dénoncent le manque de transparence et de défense ; Daniel Jousse, juriste, défend le caractère secret pour éviter les litiges.


  1. Propositions de réformes par les penseurs du XVIIIe siècle


  • Beccaria et le droit pénal :
  • Prise de position : Dans Des délits et des peines, Beccaria prône des peines légales et fixes, décidées uniquement par le législateur en vertu du contrat social.
  • Caractères de la peine :


  • Publicité et rapidité : Peine publique et immédiate.
  • Proportionnalité : Peine juste et proportionnelle au délit.
  • Nécessité et légalité : Peine prévue par la loi, sans arbitraire du juge.
  • Concept du juge au service de la loi : Le juge doit appliquer la loi de manière syllogistique : loi générale (majeure) + acte conforme ou non à la loi (mineure) = peine ou liberté (conséquence).


  • Objectif de la peine : Prévenir le crime plutôt que de se venger du passé, axée sur la dissuasion et la protection sociale.


  • Bentham et la codification utilitaire :
  • Peine dissuasive : Basée sur la souffrance proportionnelle, individualisme (adaptation de la peine), et prévention sociale.


  • Importance de la codification : Dans la perspective d’une justice claire, Bentham soutient une codification en common law, inspirant la Révolution française et les premiers codes pénaux de l’ère napoléonienne.


Les réformes entreprises et la doctrine de l’Union des Classes


Les réformes de Maupeou et Lamoignon


La réforme Maupeou (1771)


  • Objectif : Limiter le rôle politique et judiciaire des Parlements, réduire leur influence et éviter qu’ils s’opposent aux réformes royales.
  • Mesures principales :
  • Par un arrêt du conseil du roi (janvier 1771), tous les membres du Parlement de Paris doivent démissionner. Ceux qui refusent sont exilés et leurs charges confisquées.
  • Création du Grand Conseil, composé non d’officiers royaux mais de commissaires du roi. Ce Conseil n’a qu’une compétence judiciaire restreinte.
  • Réforme des Parlements provinciaux : Ils sont remplacés par des conseils supérieurs de justice, répartis dans plusieurs zones.
  • Inamovibilité des magistrats et gratuité de la justice (abolition des “épices”, frais qui alourdissaient les coûts judiciaires).
  • Conséquence : Le Parlement de Paris est reconstitué avec des compétences limitées, n’intervenant que pour les affaires de la Couronne et la Cour des pairs.


La réforme Lamoignon (1788)

  • Objectif : Restreindre les attributions politiques et législatives des Parlements et réorganiser la carte judiciaire.
  • Principales mesures :
  • Suppression de l’enregistrement des ordonnances royales par les Parlements, transférée à un conseil unique de hauts dignitaires royaux.
  • Nouvelle carte judiciaire : Création de grands bailliages pour remplacer les Parlements. Leur ressort est limité (20 000 livres) et les degrés d’appel réduits à deux pour accélérer les procès.


  • Conséquence : La réforme Lamoignon est suspendue trois mois après son introduction face à l’opposition parlementaire et des émeutes. Le pouvoir royal doit alors convoquer les États généraux (mai 1789), entraînant la chute progressive de l’ancien système judiciaire et amorçant la Révolution française.


Doctrine de l’Union des Classes


Principe de l’Union des Classes

  • Définition : Concept selon lequel les Parlements de France, notamment autour du Parlement de Paris, forment un corps unique lié par des valeurs et des objectifs communs.
  • Fondement : Basé sur un droit de remontrance, les Parlements peuvent protester, suspendre leurs fonctions (grève) ou même démissionner collectivement.
  • But : Positionner les Parlements comme un contrepoids à l’autorité royale, se définissant comme les défenseurs des droits du royaume et de la Nation face au pouvoir monarchique.
  • Conséquence : Cette doctrine sert de base aux revendications politiques des Parlements et alimente les conflits, par exemple lors de l’affaire La Chalotais (crise entre le Parlement de Bretagne et le roi).

Réception variée dans les Parlements


  • Théorie non unanimement acceptée : Certains Parlements, comme celui d’Aix, préfèrent une désunion des classes. Ils défendent leurs intérêts locaux et maintiennent un certain gallicanisme (fidélité au roi contre le pouvoir papal).
  • Loyauté et intérêts propres : Dans certaines régions, la loyauté au pouvoir royal prédomine sur la solidarité interparlementaire.


Attitude des Parlements vis-à-vis des réformes


Réforme Maupeou :

  • Appliquée jusqu’à la mort de Louis XV, avec le retour des Parlements sous Louis XVI, qui dissout le Grand Conseil et rétablit les Parlements. Ceux-ci reprennent leurs prétentions en tant que représentants des intérêts de la Nation.

Réforme Lamoignon :

  • L'opposition parlementaire contraint à la suspension de la réforme (août 1788). Les Parlements déclarent l'édit contraire à la Constitution et s’opposent à de nouveaux impôts royaux, poussant le roi à convoquer les États généraux (mai 1789).


Contexte pré-révolutionnaire


  • Opposition des Parlements : Face aux réformes de la monarchie, les Parlements mêlent revendications politiques et constitutionnelles.
  • Échec des réformes : Les tentatives royales pour réformer la justice et limiter les prérogatives parlementaires échouent devant cette résistance. La convocation des États généraux en mai 1789 marque la fin de l’ancien régime parlementaire et l’entrée dans une période révolutionnaire où de nouvelles structures judiciaires seront envisagées.





Post-Bac

Histoire de la justice

CH 3 : Réformer la justice du Moyen Âge aux Temps modernes


I. La Réformation médiévale de la justice : une politique de la monarchie


L’idée de réformation et le bien commun :

  • Origine : Inspirée des écrits d’Aristote et développée par Thomas d’Aquin, l’idée de bien commun devient une notion clé du bon gouvernement.
  • Thomas d’Aquin : Associe le bien commun à l’idée de "Caritas" (charité) et "ordo caritatis" (ordre de charité), prônant une monarchie au service de la communauté. Le roi incarne la mission de garantir le bien commun, opposée à la tyrannie, où le prince agit dans son intérêt personnel.
  • Éducation des princes : Cette réflexion influence les manuels pour les princes, établissant le bien commun comme critère d’un bon gouvernement et base de la légitimité.


Les enquêtes de réparation sous Saint Louis (13e siècle) :

  • Objectif : Saint Louis initie des enquêtes de réparation pour surveiller les officiers royaux et répondre aux plaintes des sujets, redressant ainsi les abus et favorisant le dialogue avec le peuple.
  • Processus : Les enquêtes incluent trois acteurs : déposants (justiciables), officiers royaux, et enquêteurs (qui prononcent une sentence).
  • Impact : Saint Louis renforce l'autorité royale, affirmant l’attention du roi pour ses sujets et promouvant le bien commun.


Utilisation politique de la réformation au 14e siècle :

  • Ordonnance de 1254 : Première ordonnance réformatrice de Saint Louis, visant à une amélioration générale du royaume plutôt qu’une simple réparation individuelle.
  • Influence : Cette ordonnance sert de modèle pour ses successeurs, instaurant une vision globale de la réformation pour tout le royaume.


La réformation comme réponse aux critiques de l’Église (Philippe le Bel et Boniface VIII, début 14e) :

  • Conflit : Le pape accuse Philippe le Bel de mauvaise gouvernance ; en réponse, le roi s'engage à la réformation du royaume.
  • Ordonnance de 1303 : Philippe le Bel édicte cette ordonnance pour réformer le royaume en prenant exemple sur Saint Louis, marquant un tournant vers une réformation plus structurelle et politique.


II. Les ordonnances modernes de réformation (16e-17e siècles)


Le véhicule législatif et continuité médiévale :

  • Ordonnances variées : Les ordonnances de réformation se diversifient et couvrent différents domaines sans systématisation, répondant aux doléances des États généraux ou locaux.
  • Exemples marquants :
  • Ordonnance de Villers-Cotterêts (1539) : Officialise le français dans les actes juridiques, limite la juridiction ecclésiastique, et introduit la procédure inquisitoire d’office en matière pénale.
  • Ordonnances de réformation par le chancelier : Orléans (1561) et Moulins (1566) pour réformer la justice ecclésiastique, les finances municipales, et les juridictions civiles.


Ordonnances de codification au 17e siècle :

  • Objectif : Organiser et rationaliser les lois dans des domaines précis, établissant un cadre clair pour réduire les interprétations et améliorer la justice.
  • Ordonnances de Colbert (1667-1685) : Elles constituent des codes juridiques spécifiques :
  • 1667 : Procédure civile
  • 1669 : Eaux et forêts
  • 1670 : Procédure criminelle
  • 1673 : Commerce terrestre
  • 1681 : Marine
  • 1685 : Code Noir pour les colonies


Influence des magistrats et des réformes de Lamoignon :

  • Guillaume Lamoignon : Premier président du Parlement de Paris, il propose une codification inspirée des compilations de Justinien pour unifier le droit sous l’autorité royale.
  • Arrêtés de Lamoignon (1669) : Ces documents posent les bases d’un droit commun codifié, influençant les ordonnances de codification de Colbert.


III. Synthèse et importance pour l’évolution du droit français

  • Réformation médiévale : Pose les fondations d'une justice liée au bien commun et au contrôle de l’administration royale.
  • Ordonnances modernes : Transforment la réformation en un instrument politique et législatif visant à centraliser et codifier le droit, inspirant les codes napoléoniens.
  • Évolution vers un État de droit : La réformation passe d’une réponse ponctuelle aux abus à une codification systématique, posant les bases d’une justice claire, centralisée et uniforme pour la monarchie absolue.


La réforme judiciaire en France du XVIIe au XVIIIe siècle


I. Les domaines d’intervention des ordonnances de réformation


Procédure civile : Ordonnance de 1667 – « Code Louis »

  • Contexte et structure : Ce texte est souvent perçu comme un véritable code de procédure, conçu par l’auteur Pussort, défenseur des idées absolutistes visant à limiter le pouvoir des parlements. Il se distingue par une structure rigoureuse organisée en 35 titres.
  • Uniformité : Première uniformisation de la procédure civile à l’échelle du royaume, où chaque procès suit la même procédure.
  • Caractéristiques : La procédure civile est simplifiée et écrite. Les « avoués » jouent un rôle central dans la représentation de la partie dans la procédure, sans prendre part aux autres aspects de la défense.
  • Impact : Accélération et clarification de la justice civile, mettant en avant l’importance de l’écrit. Ce texte inspirera le Code de procédure civile napoléonien.


Procédure criminelle : Ordonnance de 1670

  • Contexte européen : Cette ordonnance est influencée par des textes comme la Caroline de Charles Quint, une première codification européenne avec une structure inquisitoire et rigoureuse.
  • Innovation en matière pénale :
  • Procédure inquisitoire : Renforcement du rôle du juge, autorisé à interroger l’accusé sans défenseur, dans une procédure souvent secrète.
  • Éléments clés :
  • Torture : Permise pour obtenir des aveux, sans modalités précises (variations locales).
  • Appel obligatoire : Les condamnations à mort doivent être confirmées par le Parlement.
  • Hiérarchisation judiciaire : Limitation de la justice à deux degrés, et renforcement du contrôle sur les justices seigneuriales.
  • Garantie accrue : Introduction de garanties contre la justice prévôtale.
  • Déroulement du procès criminel : En quatre étapes clés :


Mise en mouvement de l’action publique : Par plainte, dénonciation, ou initiative du juge.

Premier degré d’instruction : Collecte des preuves et témoignages ; interrogatoire de l’accusé.

Instruction extraordinaire : Second degré d’instruction avec confrontation témoin/accusé.


  1. Jugement : Rendu par une formation collégiale, avec le rôle central du juge et un dernier interrogatoire de l’accusé (sans assistance).
  • Résultats possibles : Jugement interlocutoire (demandant des preuves justificatives) ou définitif sur la culpabilité.


  1. Évolution des pratiques au XVIIIe siècle :
  • Mémoires judiciaires (factum) : Nouvelle pratique permettant aux avocats de rédiger des mémoires extérieurs pour défendre leurs clients, favorisant ainsi la défense malgré l’absence de représentation en procès.


II. Les réformes de l’institution judiciaire

  1. Un discours de réforme inspiré par des critiques et la crise de la justice sous l’Ancien Régime
  • Critiques de l’organisation judiciaire :
  • Multiplicité des juridictions : Complexité pour le justiciable face à des juridictions multiples et souvent concurrentes.
  • Patrimonialité des offices : Système des épices qui alourdit les coûts de la justice pour les justiciables et dilue le lien des magistrats avec le pouvoir royal.
  • Crise institutionnelle : Les cours souveraines sous Louis XIV perdent en indépendance, devenant des juridictions « supérieures » mais non souveraines.


  • Critiques de la procédure pénale inquisitoire :
  • Secret et absence de défense : Accusations de partialité envers la procédure secrète sans justification de décision.
  • Défenseurs et opposants : Voltaire et d’autres philosophes dénoncent le manque de transparence et de défense ; Daniel Jousse, juriste, défend le caractère secret pour éviter les litiges.


  1. Propositions de réformes par les penseurs du XVIIIe siècle


  • Beccaria et le droit pénal :
  • Prise de position : Dans Des délits et des peines, Beccaria prône des peines légales et fixes, décidées uniquement par le législateur en vertu du contrat social.
  • Caractères de la peine :


  • Publicité et rapidité : Peine publique et immédiate.
  • Proportionnalité : Peine juste et proportionnelle au délit.
  • Nécessité et légalité : Peine prévue par la loi, sans arbitraire du juge.
  • Concept du juge au service de la loi : Le juge doit appliquer la loi de manière syllogistique : loi générale (majeure) + acte conforme ou non à la loi (mineure) = peine ou liberté (conséquence).


  • Objectif de la peine : Prévenir le crime plutôt que de se venger du passé, axée sur la dissuasion et la protection sociale.


  • Bentham et la codification utilitaire :
  • Peine dissuasive : Basée sur la souffrance proportionnelle, individualisme (adaptation de la peine), et prévention sociale.


  • Importance de la codification : Dans la perspective d’une justice claire, Bentham soutient une codification en common law, inspirant la Révolution française et les premiers codes pénaux de l’ère napoléonienne.


Les réformes entreprises et la doctrine de l’Union des Classes


Les réformes de Maupeou et Lamoignon


La réforme Maupeou (1771)


  • Objectif : Limiter le rôle politique et judiciaire des Parlements, réduire leur influence et éviter qu’ils s’opposent aux réformes royales.
  • Mesures principales :
  • Par un arrêt du conseil du roi (janvier 1771), tous les membres du Parlement de Paris doivent démissionner. Ceux qui refusent sont exilés et leurs charges confisquées.
  • Création du Grand Conseil, composé non d’officiers royaux mais de commissaires du roi. Ce Conseil n’a qu’une compétence judiciaire restreinte.
  • Réforme des Parlements provinciaux : Ils sont remplacés par des conseils supérieurs de justice, répartis dans plusieurs zones.
  • Inamovibilité des magistrats et gratuité de la justice (abolition des “épices”, frais qui alourdissaient les coûts judiciaires).
  • Conséquence : Le Parlement de Paris est reconstitué avec des compétences limitées, n’intervenant que pour les affaires de la Couronne et la Cour des pairs.


La réforme Lamoignon (1788)

  • Objectif : Restreindre les attributions politiques et législatives des Parlements et réorganiser la carte judiciaire.
  • Principales mesures :
  • Suppression de l’enregistrement des ordonnances royales par les Parlements, transférée à un conseil unique de hauts dignitaires royaux.
  • Nouvelle carte judiciaire : Création de grands bailliages pour remplacer les Parlements. Leur ressort est limité (20 000 livres) et les degrés d’appel réduits à deux pour accélérer les procès.


  • Conséquence : La réforme Lamoignon est suspendue trois mois après son introduction face à l’opposition parlementaire et des émeutes. Le pouvoir royal doit alors convoquer les États généraux (mai 1789), entraînant la chute progressive de l’ancien système judiciaire et amorçant la Révolution française.


Doctrine de l’Union des Classes


Principe de l’Union des Classes

  • Définition : Concept selon lequel les Parlements de France, notamment autour du Parlement de Paris, forment un corps unique lié par des valeurs et des objectifs communs.
  • Fondement : Basé sur un droit de remontrance, les Parlements peuvent protester, suspendre leurs fonctions (grève) ou même démissionner collectivement.
  • But : Positionner les Parlements comme un contrepoids à l’autorité royale, se définissant comme les défenseurs des droits du royaume et de la Nation face au pouvoir monarchique.
  • Conséquence : Cette doctrine sert de base aux revendications politiques des Parlements et alimente les conflits, par exemple lors de l’affaire La Chalotais (crise entre le Parlement de Bretagne et le roi).

Réception variée dans les Parlements


  • Théorie non unanimement acceptée : Certains Parlements, comme celui d’Aix, préfèrent une désunion des classes. Ils défendent leurs intérêts locaux et maintiennent un certain gallicanisme (fidélité au roi contre le pouvoir papal).
  • Loyauté et intérêts propres : Dans certaines régions, la loyauté au pouvoir royal prédomine sur la solidarité interparlementaire.


Attitude des Parlements vis-à-vis des réformes


Réforme Maupeou :

  • Appliquée jusqu’à la mort de Louis XV, avec le retour des Parlements sous Louis XVI, qui dissout le Grand Conseil et rétablit les Parlements. Ceux-ci reprennent leurs prétentions en tant que représentants des intérêts de la Nation.

Réforme Lamoignon :

  • L'opposition parlementaire contraint à la suspension de la réforme (août 1788). Les Parlements déclarent l'édit contraire à la Constitution et s’opposent à de nouveaux impôts royaux, poussant le roi à convoquer les États généraux (mai 1789).


Contexte pré-révolutionnaire


  • Opposition des Parlements : Face aux réformes de la monarchie, les Parlements mêlent revendications politiques et constitutionnelles.
  • Échec des réformes : Les tentatives royales pour réformer la justice et limiter les prérogatives parlementaires échouent devant cette résistance. La convocation des États généraux en mai 1789 marque la fin de l’ancien régime parlementaire et l’entrée dans une période révolutionnaire où de nouvelles structures judiciaires seront envisagées.





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