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Post-Bac
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Epistémologie et Science

Histologie

la psychologie scientifique est née au milieu du 19ème siècle suivant de près le développement des autres domaines scientifiques. Les conceptions de la science qu'elle a faites siennes n'étaient apparues qu'à l'« époque moderne » (17ème siècle) avec par exemple Francis Bacon (1561-1626) en Angleterre, Galilée (1564-1642) en Italie, René Descartes (1596-1650) en France

De la Philosophie à la Psychologie

De la Philosophie à la Psychologie

La Psychologie, en tant que discipline distincte, a émergé à la fin du XIXe siècle, bien qu’elle ait des racines profondes dans la philosophie antique, grecque, romaine et égyptienne. Avant de devenir une science autonome, les grandes questions psychologiques étaient traitées sous l’angle philosophique. Le terme "psychologie" provient des mots grecs psyché (âme) et logia (science), et a été utilisé tardivement dans les écrits philosophiques. L’histoire de la Psychologie commence véritablement avec René Descartes (1596-1650), qui a proposé une séparation radicale entre le corps (substance matérielle) et l’âme (substance pensante), théorie connue sous le nom de dualisme cartésien.

Descartes définissait l’âme comme un principe pensant, capable de connaissance claire et distincte, essentielle à la compréhension de soi-même et de Dieu. Cette vision a influencé l’empirisme du XVIIe et XVIIIe siècles, avec des penseurs comme John Locke, qui rejetait l’idée d’idées innées, et Gottfried Wilhelm Leibniz, qui les acceptait. Christian Wolff, élève de Leibniz, introduit le terme "psychologia" et propose une division entre la "psychologie empirique" (fondée sur l'expérience) et la "psychologie rationnelle" (fondée sur la raison). Cette distinction amorce l’autonomie de la psychologie en tant que science, séparée de la philosophie.

Au XIXe siècle, la psychologie commence à se détacher des connotations métaphysiques. L’approfondissement de la psychologie empirique, en particulier en Angleterre, et la psychologie scientifique, en Allemagne, préfigurent une rupture avec les approches philosophiques. Le psychologue allemand Hermann Ebbinghaus, avec ses travaux pionniers sur la mémoire et l’apprentissage, marque un tournant en introduisant la méthode expérimentale dans l’étude des processus psychiques. Son ouvrage de 1885, Sur la Mémoire, devient une référence majeure et lance les recherches en psychologie expérimentale. Ebbinghaus défend l’idée que la psychologie doit se concentrer sur des processus mentaux observables, distincts des spéculations métaphysiques.

Ainsi, bien que des figures comme Descartes aient joué un rôle fondateur en matière de réflexion sur l’âme et la pensée, la psychologie moderne s’émancipe des spéculations philosophiques pour devenir une science expérimentale indépendante. La psychologie se distingue enfin de la métaphysique à la fin du XIXe siècle, avec des recherches de plus en plus axées sur des méthodes scientifiques rigoureuses, comme le montre l’essor des laboratoires de psychologie expérimentale et l’intégration des idées issues de la psychophysique.

Définition(s) de la Science

La science, étymologiquement dérivée du latin scientia (connaissance), désigne l’ensemble des connaissances structurées sur des phénomènes naturels, acquises par des méthodes rigoureuses et vérifiables. Selon le Dictionnaire Le Grand Robert, elle est « l'ensemble de connaissances d'une valeur universelle, caractérisées par un objet et une méthode déterminés ». Le Dictionnaire Larousse ajoute que la science est un « ensemble cohérent de connaissances relatives à certains faits, objets ou phénomènes, obéissant à des lois vérifiées par des méthodes expérimentales ». Ces définitions soulignent l’importance d’une démarche systématique et vérifiable, au cœur de la méthode scientifique.

Cette méthode repose sur l’observation, l’expérimentation et la conceptualisation, notamment par la méthode hypothético-déductive, qui permet de tester des hypothèses en construisant des expériences. La déduction (raisonnement basé sur des règles logiques) et l'induction (formulation de lois générales à partir de cas particuliers) sont des processus cognitifs essentiels pour la pensée scientifique. La science se distingue ainsi par son approche objective, reproductible et vérifiable.

Les sciences se répartissent en divers domaines comme l’astronomie, la physique, la biologie, la psychologie, etc. Chaque discipline développe ses propres théories selon les spécificités de son objet d’étude, tout en respectant les principes généraux de la méthode scientifique. Par exemple, la psychologie scientifique doit obligatoirement être expérimentale pour être considérée comme une discipline scientifique.

La science et la technologie sont liées, bien que la technologie ne soit que l’application concrète des résultats scientifiques. Contrairement à une idée reçue, le développement technologique ne constitue pas à proprement parler de la science, mais résulte de l'application des principes scientifiques validés.

La méthode hypothético-déductive, véritable pierre angulaire de la recherche scientifique, consiste à partir d’observations et de théories préexistantes pour formuler des hypothèses. Celles-ci sont ensuite testées par des expérimentations rigoureuses. Cela permet de confirmer ou d’infirmer les hypothèses et ainsi faire progresser les connaissances scientifiques.

Définition(s) de l'Épistémologie

1. Définitions courantes L'épistémologie est la discipline qui étudie la connaissance scientifique, ses fondements, sa validité et ses méthodes. Selon le Grand Robert, elle est :

  • L’étude critique des sciences, déterminant leur origine logique, leur valeur et leur portée.
  • Une théorie de la connaissance, qui s'intéresse à la constitution des connaissances valables.

Le Dictionnaire Larousse la définit comme la discipline qui prend la connaissance scientifique pour objet, en s'intéressant aux différentes pratiques scientifiques, mais sans se limiter à une simple analyse de la méthode scientifique.

Le terme épistémologie vient du grec epistêmê (science, connaissance) et logos (discours). Bien que son usage soit plus large chez les Anglo-Saxons, le terme est principalement associé en français à l'analyse critique des sciences et de leurs théories. Cette discipline se distingue par sa réflexion sur les méthodes scientifiques et leur développement historique, plutôt que par une approche purement technologique.

2. Définitions philosophiques L'épistémologie est également vue comme une théorie de la science. Selon Gilles-Gaston Granger, elle cherche à « décrire et faire comprendre le sens, la portée et les procédures de l'effort de rationalisation dans l'explication des phénomènes ». Léna Soler (2000) définit l'épistémologie comme la démarche qui vise à caractériser les sciences, en évaluant leur valeur et en étudiant leur construction théorique et leur logique.

Elle peut être distinguée en épistémologie classique (étude a posteriori des sciences) et épistémologie scientifique (évaluation critique interne des méthodes scientifiques). Cette dernière, développée par Jean Piaget, est considérée comme une réflexion critique sur les démarches de la discipline elle-même.

3. L'objet d'étude de l'épistémologie : la science L'épistémologie interroge la science, notamment :

  • Qu'est-ce que la science ?
  • Quelles méthodes sont utilisées dans la science ?
  • Comment évaluer la validité d'une théorie scientifique ?

L'épistémologie présente deux aspects :

  • Normatif : Elle définit ce qu'est la science et délimite le champ scientifique (qu'est-ce qui est une discipline scientifique ?).
  • Descriptif : Elle décrit les contenus, structures et méthodes des disciplines scientifiques (comment une discipline élabore et teste ses théories).

4. Exemples : Croyance, Intuition et Idée L'épistémologie différencie les concepts de croyance, intuition et idée :

  • Croyance : Une croyance est une opinion supposée vraie, mais elle peut être fausse. Elle se distingue du savoir, qui est considéré comme objectivement vrai.
  • Intuition : Un processus mental par lequel une connaissance surgit sans preuve logique, souvent perçue comme immédiate et anticipée.
  • Idée : Un état mental référant à quelque chose extérieur, qu'il soit présent, passé ou possible. Elle inclut les perceptions sensorielles, les souvenirs et les images créées par l'imaginaire.

Conclusion L'épistémologie s'intéresse à la nature, aux méthodes et à la validité des connaissances scientifiques, en les situant dans un cadre critique et historique. Elle ne se limite pas à une analyse des méthodes, mais cherche à comprendre le sens et la portée de la science dans la pratique humaine.

L'Épistémologie et la Psychologie

1. L'Épistémologie en Psychologie : de l'innéisme à Piaget

L'épistémologie en psychologie traite de la manière dont les individus acquièrent des connaissances sur eux-mêmes et le monde extérieur. Divers courants se sont affrontés à ce sujet :

  • Empirisme radical : La connaissance provient uniquement de l'expérience sensorielle.
  • Rationalisme : L'expérience sensorielle est la base, mais l'esprit doit intervenir pour organiser ces informations.
  • Innéisme : Certaines connaissances sont innées, comme le pensaient Platon et Descartes.

2. Chomsky vs Piaget (1975)

  • Chomsky : Défend l'idée que certaines compétences, comme la capacité linguistique, sont innées et inscrites dans le cerveau.
  • Piaget : Affirme que les capacités cognitives sont le résultat d'une construction progressive, alliant expérience et maturation interne.

3. Piaget et l'Épistémologie Génétique

  • Piaget a développé l'épistémologie génétique en utilisant les données expérimentales de la psychologie de l'enfant. Cette approche vise à décrire comment les connaissances se construisent et évoluent, de la pensée pré-scientifique à la pensée scientifique.
  • Il a introduit le concept de structure : un système autonome et fermé, caractérisé par des lois de transformation. La psychologie, dans la vision piagétienne, rejoint les mathématiques et la logique au sommet de la hiérarchie des sciences.

4. Les Théories Scientifiques

Une théorie scientifique est un système cohérent qui unifie des lois, principes et modèles. Elle a plusieurs fonctions :

  • Explicative-prédictive : Prédire des phénomènes non observés.
  • Unificatrice : Rassembler un grand nombre de faits sous un même cadre conceptuel.
  • Heuristique : Guider la recherche en suggérant de nouvelles pistes.
  • Représentation : Offrir une représentation du monde sensible.

Les théories utilisent des modèles scientifiques, qui sont des configurations d'hypothèses pour expliquer un phénomène particulier.

5. La Recherche Scientifique et la Démarche Hypothético-Déductive

La recherche scientifique repose sur la formulation d'hypothèses à partir d'une théorie antérieure. Une hypothèse est une supposition qui relie des variables et qui sera testée par des méthodes expérimentales. Il existe deux types d'hypothèses :

  • Hypothèse théorique : Relation abstraite entre variables.
  • Hypothèse opérationnelle : Version pratique et mesurable de l'hypothèse théorique.
  • Hypothèse statistique : Traduction numérique de l'hypothèse opérationnelle.

La recherche peut être exploratoire (génération d'hypothèses), descriptive (représentation objective du phénomène), confirmatoire (validation des hypothèses), technologique (création d'outils pratiques) ou d'action (résolution de problèmes sur le terrain).

6. La Recherche Scientifique selon Gaston Bachelard

Selon Bachelard, la recherche scientifique nécessite un recule épistémologique. Toute connaissance est une réponse à une question. La recherche se construit dans un va-et-vient entre théories et réalité, et chaque découverte oblige à reconsidérer les hypothèses précédentes.

7. Conclusion

L'épistémologie en psychologie est donc un domaine où se croisent diverses théories sur la nature de la connaissance, de l'acquisition du savoir à la façon dont les disciplines scientifiques se construisent et se vérifient, particulièrement à travers l'analyse des mécanismes cognitifs chez les individus.

Réalisme scientifique vs Instrumentalisme scientifique

1. Le Réalisme scientifique

Le réalisme scientifique est un courant philosophique qui considère que les théories scientifiques cherchent à décrire le monde tel qu'il est, indépendamment des théories ou des méthodes utilisées. Ce courant affirme qu'il existe des entités ou des objets qui ne sont pas directement observables, mais qui existent réellement et peuvent être détectés par d'autres moyens. Par exemple, les trous noirs sont des objets de l'univers qui ne peuvent pas être observés directement, mais leur existence est prouvée indirectement par la détection d'ondes gravitationnelles ou de jets de particules.

Le réalisme scientifique repose sur trois dimensions :

  • Dimension métaphysique : Le monde existe indépendamment de l'esprit.
  • Dimension sémantique : Les théories scientifiques décrivent littéralement la réalité.
  • Dimension épistémologique : Les théories scientifiques, interprétées littéralement, constituent la connaissance vraie du monde.

Le réalisme scientifique soutient que les théories scientifiques sont censées décrire des réalités indépendantes de la perception humaine, et qu’une recherche scientifique réussie dévoile des connaissances objectives sur le monde réel.

2. L'Instrumentalisme scientifique

L'instrumentalisme scientifique s'oppose au réalisme scientifique. Selon cette approche, les théories scientifiques ne sont pas censées décrire la réalité, mais plutôt être des outils pratiques pour résoudre des problèmes, prédire des phénomènes et organiser les données observées. Ce courant est illustré par la cinématique dans la mécanique newtonienne, qui permet de prédire les mouvements sans prétendre décrire les causes profondes des phénomènes observés.

Les caractéristiques de l'instrumentalisme sont :

  • Les théories scientifiques sont des dispositifs : Elles sont des instruments pour prédire ou expliquer des phénomènes observables, mais ne sont pas des descriptions de la réalité.
  • Les théories ne sont pas des vérités : Elles sont jugées en fonction de leur utilité, non de leur capacité à décrire une réalité profonde.
  • Distinction entre concepts observables et théoriques : Les concepts observables peuvent décrire le monde réel, tandis que les concepts théoriques sont des fictions utiles pour prédire ou organiser les observations.

L'instrumentalisme ne cherche pas à découvrir des vérités profondes sur la nature, mais à développer des outils pratiques pour traiter des phénomènes observables.

3. Discussion entre Réalisme et Instrumentalisme

Les deux positions philosophiques ont des conceptions différentes de la relation entre les théories scientifiques et la réalité :

  • Les réalistes considèrent que les théories visent à décrire le monde tel qu'il est réellement, et que ces théories sont vraies si elles correspondent au monde observé. Ils croient en l’existence d’entités inobservables (comme les trous noirs) et soutiennent que la science doit chercher à découvrir ces entités.
  • Les instrumentalistes, en revanche, estiment que les théories ne décrivent pas la réalité, mais servent uniquement à relier des phénomènes observables entre eux. Pour eux, une théorie est jugée utile ou efficace selon sa capacité à prédire ou expliquer des faits observés, et non selon sa capacité à refléter une réalité cachée.

La synthèse des deux approches pourrait combiner la rigueur scientifique et l’empirisme du réalisme, ainsi que l’innovation théorique et la créativité de l’instrumentalisme.

4. Oppositions philosophiques historiques au Réalisme scientifique

  • Positivisme et Instrumentalisme : Des penseurs comme Ernst Mach (1838-1916) ont soutenu que la science doit se concentrer uniquement sur les faits observables et leurs relations régulières. Selon Mach, les concepts tels que l'atome ou la masse sont des fictions métaphysiques, et les théories scientifiques ne sont que des "copies" des sensations humaines.
  • Hermann von Helmholtz (1821-1894), en revanche, a maintenu une position réaliste, affirmant que le but des sciences théoriques est de découvrir les causes profondes des phénomènes.
  • Henri Poincaré (1854-1912) a défendu une interprétation instrumentalisme des théories scientifiques, alors que Max Planck (1858-1947), physicien ayant découvert les quanta, a réaffirmé l'existence d'une réalité sous-jacente aux phénomènes observés, même si cette réalité ne peut être directement atteinte par la science.

5. Conclusion

La dissociation entre le réalisme et l'instrumentalisme est un débat central en épistémologie. Alors que le réalisme scientifique considère que les théories visent à décrire une réalité indépendante, l'instrumentalisme les voit comme des outils pratiques pour organiser et prédire des phénomènes observables, sans prétendre découvrir des vérités profondes sur la nature. Ces deux approches offrent des perspectives complémentaires sur le rôle des théories scientifiques et leur relation avec la réalité.

Figures de grands épistémologues en France au 20e siècle

Gaston Bachelard (1884-1962)

Bachelard remet en cause la vision linéaire du progrès scientifique, notamment le positivisme d'Auguste Comte. Selon lui, la science progresse par ruptures épistémologiques, une série de révolutions où de nouvelles connaissances remplacent les anciennes. Dans son ouvrage La formation de l’esprit scientifique (1938), il décrit la connaissance scientifique comme un processus historique et discontinu, où les erreurs doivent être identifiées et corrigées pour progresser. L'esprit scientifique, pour Bachelard, se forme en surmontant des obstacles internes à la pensée (psychologiques, cognitifs, etc.). Il soutient que "la science n'est que du caché", en ce sens qu'elle cherche à révéler les causes cachées derrière les faits observés.

Karl Popper (1902-1994)

Popper se distingue du positivisme et développe une épistémologie fondée sur le principe de falsifiabilité. Selon lui, une théorie scientifique doit être testable et réfutable. Une théorie qui ne peut être testée ou infirmée n'est pas scientifique, comme le montre sa critique des théories psychanalytiques de Freud. Popper défend une épistémologie déductive-nomologique où les théories expliquent les faits par des lois universelles et des conditions particulières. Il insiste sur la nécessité de formuler des hypothèses qui peuvent être contredites, car ce sont les échecs des théories qui mènent au progrès scientifique. La falsifiabilité devient ainsi le critère principal pour distinguer la science de la métaphysique.

Thomas S. Kuhn (1922-1996)

Kuhn introduit la notion de paradigme dans son ouvrage La structure des révolutions scientifiques (1962). Selon lui, la science progresse par des révolutions scientifiques, qui sont des changements de paradigmes. Un paradigme est un ensemble de croyances et de pratiques partagées par la communauté scientifique à un moment donné. Lorsque des anomalies s'accumulent et ne peuvent être expliquées par le paradigme dominant, un changement de paradigme survient. Ainsi, la science ne suit pas une progression linéaire mais est marquée par des ruptures. Kuhn souligne également que la communication entre chercheurs opérant dans des paradigmes différents est impossible, ce qui rend difficile toute unité dans l’histoire des sciences.

Jean Piaget (1896-1980)

Piaget, figure centrale de la psychologie et de l’épistémologie génétique, soutient que la connaissance se développe à travers un processus adaptatif, en interaction avec l'environnement. Sa théorie met en parallèle l’évolution de l’esprit humain et celle des sciences, et il introduit le concept de construction cognitive. Selon Piaget, la connaissance se structure progressivement selon des lois évolutives. Il défend une épistémologie qui fait dialoguer la psychologie, la biologie, et la logique, et insiste sur le rôle des structures cognitives dans l’élaboration des connaissances. Piaget considère l’épistémologie scientifique comme étant indissociable des interprétations psychologiques et met l’accent sur le développement des connaissances à travers les stades de l’enfance à l’âge adulte.

Résumé des contributions

Ces grands épistémologues partagent un intérêt pour la nature du progrès scientifique et la manière dont les connaissances se construisent, mais ils proposent des modèles variés. Bachelard insiste sur la rupture avec les erreurs passées et la nécessité de transformer l’esprit scientifique. Popper met l’accent sur la falsifiabilité et la testabilité des théories pour qu’elles soient scientifiques. Kuhn, quant à lui, développe une théorie des révolutions scientifiques, où des changements de paradigmes marquent le passage à de nouvelles conceptions du monde. Enfin, Piaget propose une épistémologie génétique, qui voit le développement de la connaissance comme une construction progressive, en interaction avec l’environnement, et le développement des structures cognitives. Ces épistémologues ont profondément influencé l’évolution de la pensée scientifique et philosophique du 20e siècle.

Résumé : L'Épistémologie de la Psychologie et la pensée scientifique du 20ème siècle – Intervention de Nicolas Bouleau

Dans cette intervention de 15 minutes, Nicolas Bouleau, un épistémologue français reconnu, présente et discute de l'évolution de l'épistémologie de la psychologie et de ses liens avec les courants de pensée scientifiques du 20ème siècle, en particulier le positivisme et le néo-positivisme.

Bouleau s'intéresse à la manière dont l'épistémologie de la psychologie a évolué en réponse aux grands débats philosophiques et scientifiques de l'époque. Il fait un retour sur les fondements du positivisme, qui cherche à expliquer les phénomènes par des faits observables et mesurables, rejetant toute spéculation non vérifiable. Dans cette perspective, la psychologie, comme toute science, doit se fonder sur des données empiriques et des méthodes rigoureuses de collecte et d'analyse.

Le néo-positivisme, courant de pensée influencé par le positivisme mais enrichi par les progrès des sciences du 20ème siècle, a également un rôle clé dans la discussion. Il se distingue par une approche plus nuancée, notamment par l'introduction de concepts comme la falsifiabilité (chez Popper) et l'idée que les théories scientifiques sont toujours ouvertes à la révision et à l'amélioration. Bouleau souligne l'importance de cette évolution qui permet de faire face à la complexité de la psychologie, en tant que discipline qui étudie des phénomènes mentaux souvent non directement observables.

L'intervention met également en lumière les défis spécifiques rencontrés par la psychologie en tant que science. Bouleau évoque le besoin de concilier l'approche expérimentale rigoureuse des sciences dures avec la reconnaissance de la singularité des phénomènes psychologiques et humains, qui échappent parfois aux modèles strictement quantitatifs.

En conclusion, Bouleau invite à une réflexion sur la façon dont l'épistémologie de la psychologie doit continuer à se développer pour intégrer les découvertes scientifiques tout en respectant la nature particulière des objets d’étude, tels que les phénomènes mentaux et comportementaux. Il soulève ainsi la question de l'avenir de la psychologie dans un contexte scientifique où se mêlent empirisme, rationalisme et approches constructivistes.



Le positivisme et le néo-positivisme sont deux courants philosophiques majeurs qui ont eu une influence considérable sur la science, y compris en psychologie, au cours du 19e et du 20e siècle. Voici un aperçu détaillé de ces deux mouvements :

1. Le positivisme

Le positivisme est une philosophie de la science qui a été fondée par le philosophe français Auguste Comte au début du 19e siècle. Il repose sur l’idée que la seule connaissance véritable et valable est celle qui provient des faits observables et qui peut être scientifiquement vérifiée. Le positivisme rejette toute forme de spéculation métaphysique ou théologique, estimant que seules les sciences empiriques, basées sur l'observation, l'expérimentation et la mesure, sont capables d'apporter une connaissance fiable du monde.

Principaux principes du positivisme :

  • Empirisme : La connaissance ne peut être acquise que par l’observation et l’expérience. Ce qui est vérifiable empiriquement devient la seule base de la connaissance légitime.
  • Loi de l’évolution des sciences : Comte propose une "loi des trois états", selon laquelle la société et les sciences évoluent successivement à travers trois stades :
  1. Le stade théologique (où tout est expliqué par la religion et des forces surnaturelles),
  2. Le stade métaphysique (où des concepts abstraits, non vérifiables, dominent),
  3. Le stade scientifique ou positif (où les phénomènes sont expliqués par des lois naturelles observables).
  • Réjection de la métaphysique : Le positivisme rejette les explications qui ne peuvent pas être confirmées par l'observation ou l'expérimentation. Par exemple, des questions sur l’existence de Dieu ou de la nature de l’âme humaine sont considérées comme hors du champ de la science.
  • Unité des sciences : Selon Comte, toutes les sciences, qu'elles soient naturelles (comme la physique ou la biologie) ou sociales (comme la sociologie), doivent suivre la même méthodologie fondée sur l'observation, la classification et la loi.
  • But de la science : La science a pour but d’établir des lois générales et des relations causales entre les phénomènes observables.

Influence du positivisme :

Le positivisme a eu une grande influence sur les sciences naturelles, qui se sont basées sur des méthodes expérimentales pour observer et expliquer le monde. Il a également influencé les sciences sociales, notamment la sociologie, que Comte a fondée en tant que discipline scientifique.


2. Le néo-positivisme

Le néo-positivisme (ou positivisme logique) est un courant qui émerge au début du 20e siècle, principalement avec les travaux du groupe de philosophes et scientifiques appelé le Cercle de Vienne. Ce groupe, composé de figures comme Rudolf Carnap, Moritz Schlick, Otto Neurath, et d'autres, cherche à réactualiser le positivisme à la lumière des avancées en logique et en philosophie des sciences.

Principaux principes du néo-positivisme :

  • L’accent sur la logique et les mathématiques : Les néo-positivistes croient que la logique formelle et les mathématiques peuvent fournir les outils nécessaires pour analyser les propositions scientifiques. Ils considèrent la logique comme la base de toute connaissance scientifique.
  • Vérification et falsifiabilité : Contrairement à Comte, qui cherchait à établir des lois générales sur la base de l’observation, les néo-positivistes introduisent le critère de vérifiabilité : une proposition ne peut être considérée comme scientifique que si elle peut être vérifiée par l’observation ou l’expérimentation. Plus tard, ce principe sera reformulé par Karl Popper sous l’idée de falsifiabilité.
  • Réjection des métaphysiques et des spéculations non vérifiables : Comme le positivisme, le néo-positivisme rejette toute affirmation qui ne peut être vérifiée empiriquement. Il est particulièrement rigide sur le rejet des théories métaphysiques, qui ne peuvent être ni confirmées ni infirmées par des observations.
  • Langage scientifique : Les néo-positivistes soutiennent que pour être scientifique, un énoncé doit être formulé de manière précise, en utilisant des termes vérifiables et mesurables. Ils essaient de réconcilier les sciences exactes (comme la physique) et les sciences humaines (comme la psychologie) en adoptant une méthodologie rigoureuse.
  • Connaissance comme construction logique : Le néo-positivisme souligne que la connaissance scientifique est un produit de la logique, de l'expérience et de l'analyse. C’est une construction rationnelle qui doit éviter les jugements subjectifs ou spéculatifs.

Influence du néo-positivisme :

Le néo-positivisme a joué un rôle majeur dans la philosophie des sciences du 20e siècle, en insistant sur la rigueur logique et la vérifiabilité des propositions scientifiques. Il a également influencé des domaines comme la linguistique (notamment avec la théorie du sens et de la signification de Carnap) et la psychologie scientifique.


3. Différences entre le positivisme et le néo-positivisme :

  • Évolution de la méthodologie : Tandis que le positivisme classique de Comte se concentre sur l'observation des faits et des lois générales, le néo-positivisme introduit la notion de falsifiabilité et de vérifiabilité, ce qui permet de mieux distinguer ce qui est scientifique de ce qui ne l'est pas.
  • Philosophie des sciences sociales : Le positivisme, en particulier avec Comte, cherchait à appliquer des méthodes scientifiques strictes aux sciences sociales. Le néo-positivisme, bien que partageant cette idée, a introduit la distinction plus claire entre les types de théories et de méthodes, en mettant davantage l'accent sur les structures logiques des propositions scientifiques.
  • Rôle des mathématiques et de la logique : Le néo-positivisme se distingue du positivisme par son accent sur les mathématiques et la logique comme outils essentiels pour structurer la connaissance scientifique, tandis que le positivisme classique de Comte ne mettait pas autant en avant ces outils.

Conclusion

Le positivisme et le néo-positivisme ont joué un rôle déterminant dans la construction de la pensée scientifique du 20e siècle. Le positivisme a permis de fonder la science moderne sur des principes d'observation empirique et de recherche de lois naturelles, tandis que le néo-positivisme, en introduisant la logique et la vérifiabilité, a fourni des outils pour analyser et structurer de manière plus précise les connaissances scientifiques. Cependant, ces courants ont aussi été critiqués, notamment pour leur rejet des dimensions subjectives de l'expérience humaine, ce qui a conduit à des évolutions et des débats dans la philosophie des sciences et des sciences sociales.

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Epistémologie et Science

Histologie

la psychologie scientifique est née au milieu du 19ème siècle suivant de près le développement des autres domaines scientifiques. Les conceptions de la science qu'elle a faites siennes n'étaient apparues qu'à l'« époque moderne » (17ème siècle) avec par exemple Francis Bacon (1561-1626) en Angleterre, Galilée (1564-1642) en Italie, René Descartes (1596-1650) en France

De la Philosophie à la Psychologie

De la Philosophie à la Psychologie

La Psychologie, en tant que discipline distincte, a émergé à la fin du XIXe siècle, bien qu’elle ait des racines profondes dans la philosophie antique, grecque, romaine et égyptienne. Avant de devenir une science autonome, les grandes questions psychologiques étaient traitées sous l’angle philosophique. Le terme "psychologie" provient des mots grecs psyché (âme) et logia (science), et a été utilisé tardivement dans les écrits philosophiques. L’histoire de la Psychologie commence véritablement avec René Descartes (1596-1650), qui a proposé une séparation radicale entre le corps (substance matérielle) et l’âme (substance pensante), théorie connue sous le nom de dualisme cartésien.

Descartes définissait l’âme comme un principe pensant, capable de connaissance claire et distincte, essentielle à la compréhension de soi-même et de Dieu. Cette vision a influencé l’empirisme du XVIIe et XVIIIe siècles, avec des penseurs comme John Locke, qui rejetait l’idée d’idées innées, et Gottfried Wilhelm Leibniz, qui les acceptait. Christian Wolff, élève de Leibniz, introduit le terme "psychologia" et propose une division entre la "psychologie empirique" (fondée sur l'expérience) et la "psychologie rationnelle" (fondée sur la raison). Cette distinction amorce l’autonomie de la psychologie en tant que science, séparée de la philosophie.

Au XIXe siècle, la psychologie commence à se détacher des connotations métaphysiques. L’approfondissement de la psychologie empirique, en particulier en Angleterre, et la psychologie scientifique, en Allemagne, préfigurent une rupture avec les approches philosophiques. Le psychologue allemand Hermann Ebbinghaus, avec ses travaux pionniers sur la mémoire et l’apprentissage, marque un tournant en introduisant la méthode expérimentale dans l’étude des processus psychiques. Son ouvrage de 1885, Sur la Mémoire, devient une référence majeure et lance les recherches en psychologie expérimentale. Ebbinghaus défend l’idée que la psychologie doit se concentrer sur des processus mentaux observables, distincts des spéculations métaphysiques.

Ainsi, bien que des figures comme Descartes aient joué un rôle fondateur en matière de réflexion sur l’âme et la pensée, la psychologie moderne s’émancipe des spéculations philosophiques pour devenir une science expérimentale indépendante. La psychologie se distingue enfin de la métaphysique à la fin du XIXe siècle, avec des recherches de plus en plus axées sur des méthodes scientifiques rigoureuses, comme le montre l’essor des laboratoires de psychologie expérimentale et l’intégration des idées issues de la psychophysique.

Définition(s) de la Science

La science, étymologiquement dérivée du latin scientia (connaissance), désigne l’ensemble des connaissances structurées sur des phénomènes naturels, acquises par des méthodes rigoureuses et vérifiables. Selon le Dictionnaire Le Grand Robert, elle est « l'ensemble de connaissances d'une valeur universelle, caractérisées par un objet et une méthode déterminés ». Le Dictionnaire Larousse ajoute que la science est un « ensemble cohérent de connaissances relatives à certains faits, objets ou phénomènes, obéissant à des lois vérifiées par des méthodes expérimentales ». Ces définitions soulignent l’importance d’une démarche systématique et vérifiable, au cœur de la méthode scientifique.

Cette méthode repose sur l’observation, l’expérimentation et la conceptualisation, notamment par la méthode hypothético-déductive, qui permet de tester des hypothèses en construisant des expériences. La déduction (raisonnement basé sur des règles logiques) et l'induction (formulation de lois générales à partir de cas particuliers) sont des processus cognitifs essentiels pour la pensée scientifique. La science se distingue ainsi par son approche objective, reproductible et vérifiable.

Les sciences se répartissent en divers domaines comme l’astronomie, la physique, la biologie, la psychologie, etc. Chaque discipline développe ses propres théories selon les spécificités de son objet d’étude, tout en respectant les principes généraux de la méthode scientifique. Par exemple, la psychologie scientifique doit obligatoirement être expérimentale pour être considérée comme une discipline scientifique.

La science et la technologie sont liées, bien que la technologie ne soit que l’application concrète des résultats scientifiques. Contrairement à une idée reçue, le développement technologique ne constitue pas à proprement parler de la science, mais résulte de l'application des principes scientifiques validés.

La méthode hypothético-déductive, véritable pierre angulaire de la recherche scientifique, consiste à partir d’observations et de théories préexistantes pour formuler des hypothèses. Celles-ci sont ensuite testées par des expérimentations rigoureuses. Cela permet de confirmer ou d’infirmer les hypothèses et ainsi faire progresser les connaissances scientifiques.

Définition(s) de l'Épistémologie

1. Définitions courantes L'épistémologie est la discipline qui étudie la connaissance scientifique, ses fondements, sa validité et ses méthodes. Selon le Grand Robert, elle est :

  • L’étude critique des sciences, déterminant leur origine logique, leur valeur et leur portée.
  • Une théorie de la connaissance, qui s'intéresse à la constitution des connaissances valables.

Le Dictionnaire Larousse la définit comme la discipline qui prend la connaissance scientifique pour objet, en s'intéressant aux différentes pratiques scientifiques, mais sans se limiter à une simple analyse de la méthode scientifique.

Le terme épistémologie vient du grec epistêmê (science, connaissance) et logos (discours). Bien que son usage soit plus large chez les Anglo-Saxons, le terme est principalement associé en français à l'analyse critique des sciences et de leurs théories. Cette discipline se distingue par sa réflexion sur les méthodes scientifiques et leur développement historique, plutôt que par une approche purement technologique.

2. Définitions philosophiques L'épistémologie est également vue comme une théorie de la science. Selon Gilles-Gaston Granger, elle cherche à « décrire et faire comprendre le sens, la portée et les procédures de l'effort de rationalisation dans l'explication des phénomènes ». Léna Soler (2000) définit l'épistémologie comme la démarche qui vise à caractériser les sciences, en évaluant leur valeur et en étudiant leur construction théorique et leur logique.

Elle peut être distinguée en épistémologie classique (étude a posteriori des sciences) et épistémologie scientifique (évaluation critique interne des méthodes scientifiques). Cette dernière, développée par Jean Piaget, est considérée comme une réflexion critique sur les démarches de la discipline elle-même.

3. L'objet d'étude de l'épistémologie : la science L'épistémologie interroge la science, notamment :

  • Qu'est-ce que la science ?
  • Quelles méthodes sont utilisées dans la science ?
  • Comment évaluer la validité d'une théorie scientifique ?

L'épistémologie présente deux aspects :

  • Normatif : Elle définit ce qu'est la science et délimite le champ scientifique (qu'est-ce qui est une discipline scientifique ?).
  • Descriptif : Elle décrit les contenus, structures et méthodes des disciplines scientifiques (comment une discipline élabore et teste ses théories).

4. Exemples : Croyance, Intuition et Idée L'épistémologie différencie les concepts de croyance, intuition et idée :

  • Croyance : Une croyance est une opinion supposée vraie, mais elle peut être fausse. Elle se distingue du savoir, qui est considéré comme objectivement vrai.
  • Intuition : Un processus mental par lequel une connaissance surgit sans preuve logique, souvent perçue comme immédiate et anticipée.
  • Idée : Un état mental référant à quelque chose extérieur, qu'il soit présent, passé ou possible. Elle inclut les perceptions sensorielles, les souvenirs et les images créées par l'imaginaire.

Conclusion L'épistémologie s'intéresse à la nature, aux méthodes et à la validité des connaissances scientifiques, en les situant dans un cadre critique et historique. Elle ne se limite pas à une analyse des méthodes, mais cherche à comprendre le sens et la portée de la science dans la pratique humaine.

L'Épistémologie et la Psychologie

1. L'Épistémologie en Psychologie : de l'innéisme à Piaget

L'épistémologie en psychologie traite de la manière dont les individus acquièrent des connaissances sur eux-mêmes et le monde extérieur. Divers courants se sont affrontés à ce sujet :

  • Empirisme radical : La connaissance provient uniquement de l'expérience sensorielle.
  • Rationalisme : L'expérience sensorielle est la base, mais l'esprit doit intervenir pour organiser ces informations.
  • Innéisme : Certaines connaissances sont innées, comme le pensaient Platon et Descartes.

2. Chomsky vs Piaget (1975)

  • Chomsky : Défend l'idée que certaines compétences, comme la capacité linguistique, sont innées et inscrites dans le cerveau.
  • Piaget : Affirme que les capacités cognitives sont le résultat d'une construction progressive, alliant expérience et maturation interne.

3. Piaget et l'Épistémologie Génétique

  • Piaget a développé l'épistémologie génétique en utilisant les données expérimentales de la psychologie de l'enfant. Cette approche vise à décrire comment les connaissances se construisent et évoluent, de la pensée pré-scientifique à la pensée scientifique.
  • Il a introduit le concept de structure : un système autonome et fermé, caractérisé par des lois de transformation. La psychologie, dans la vision piagétienne, rejoint les mathématiques et la logique au sommet de la hiérarchie des sciences.

4. Les Théories Scientifiques

Une théorie scientifique est un système cohérent qui unifie des lois, principes et modèles. Elle a plusieurs fonctions :

  • Explicative-prédictive : Prédire des phénomènes non observés.
  • Unificatrice : Rassembler un grand nombre de faits sous un même cadre conceptuel.
  • Heuristique : Guider la recherche en suggérant de nouvelles pistes.
  • Représentation : Offrir une représentation du monde sensible.

Les théories utilisent des modèles scientifiques, qui sont des configurations d'hypothèses pour expliquer un phénomène particulier.

5. La Recherche Scientifique et la Démarche Hypothético-Déductive

La recherche scientifique repose sur la formulation d'hypothèses à partir d'une théorie antérieure. Une hypothèse est une supposition qui relie des variables et qui sera testée par des méthodes expérimentales. Il existe deux types d'hypothèses :

  • Hypothèse théorique : Relation abstraite entre variables.
  • Hypothèse opérationnelle : Version pratique et mesurable de l'hypothèse théorique.
  • Hypothèse statistique : Traduction numérique de l'hypothèse opérationnelle.

La recherche peut être exploratoire (génération d'hypothèses), descriptive (représentation objective du phénomène), confirmatoire (validation des hypothèses), technologique (création d'outils pratiques) ou d'action (résolution de problèmes sur le terrain).

6. La Recherche Scientifique selon Gaston Bachelard

Selon Bachelard, la recherche scientifique nécessite un recule épistémologique. Toute connaissance est une réponse à une question. La recherche se construit dans un va-et-vient entre théories et réalité, et chaque découverte oblige à reconsidérer les hypothèses précédentes.

7. Conclusion

L'épistémologie en psychologie est donc un domaine où se croisent diverses théories sur la nature de la connaissance, de l'acquisition du savoir à la façon dont les disciplines scientifiques se construisent et se vérifient, particulièrement à travers l'analyse des mécanismes cognitifs chez les individus.

Réalisme scientifique vs Instrumentalisme scientifique

1. Le Réalisme scientifique

Le réalisme scientifique est un courant philosophique qui considère que les théories scientifiques cherchent à décrire le monde tel qu'il est, indépendamment des théories ou des méthodes utilisées. Ce courant affirme qu'il existe des entités ou des objets qui ne sont pas directement observables, mais qui existent réellement et peuvent être détectés par d'autres moyens. Par exemple, les trous noirs sont des objets de l'univers qui ne peuvent pas être observés directement, mais leur existence est prouvée indirectement par la détection d'ondes gravitationnelles ou de jets de particules.

Le réalisme scientifique repose sur trois dimensions :

  • Dimension métaphysique : Le monde existe indépendamment de l'esprit.
  • Dimension sémantique : Les théories scientifiques décrivent littéralement la réalité.
  • Dimension épistémologique : Les théories scientifiques, interprétées littéralement, constituent la connaissance vraie du monde.

Le réalisme scientifique soutient que les théories scientifiques sont censées décrire des réalités indépendantes de la perception humaine, et qu’une recherche scientifique réussie dévoile des connaissances objectives sur le monde réel.

2. L'Instrumentalisme scientifique

L'instrumentalisme scientifique s'oppose au réalisme scientifique. Selon cette approche, les théories scientifiques ne sont pas censées décrire la réalité, mais plutôt être des outils pratiques pour résoudre des problèmes, prédire des phénomènes et organiser les données observées. Ce courant est illustré par la cinématique dans la mécanique newtonienne, qui permet de prédire les mouvements sans prétendre décrire les causes profondes des phénomènes observés.

Les caractéristiques de l'instrumentalisme sont :

  • Les théories scientifiques sont des dispositifs : Elles sont des instruments pour prédire ou expliquer des phénomènes observables, mais ne sont pas des descriptions de la réalité.
  • Les théories ne sont pas des vérités : Elles sont jugées en fonction de leur utilité, non de leur capacité à décrire une réalité profonde.
  • Distinction entre concepts observables et théoriques : Les concepts observables peuvent décrire le monde réel, tandis que les concepts théoriques sont des fictions utiles pour prédire ou organiser les observations.

L'instrumentalisme ne cherche pas à découvrir des vérités profondes sur la nature, mais à développer des outils pratiques pour traiter des phénomènes observables.

3. Discussion entre Réalisme et Instrumentalisme

Les deux positions philosophiques ont des conceptions différentes de la relation entre les théories scientifiques et la réalité :

  • Les réalistes considèrent que les théories visent à décrire le monde tel qu'il est réellement, et que ces théories sont vraies si elles correspondent au monde observé. Ils croient en l’existence d’entités inobservables (comme les trous noirs) et soutiennent que la science doit chercher à découvrir ces entités.
  • Les instrumentalistes, en revanche, estiment que les théories ne décrivent pas la réalité, mais servent uniquement à relier des phénomènes observables entre eux. Pour eux, une théorie est jugée utile ou efficace selon sa capacité à prédire ou expliquer des faits observés, et non selon sa capacité à refléter une réalité cachée.

La synthèse des deux approches pourrait combiner la rigueur scientifique et l’empirisme du réalisme, ainsi que l’innovation théorique et la créativité de l’instrumentalisme.

4. Oppositions philosophiques historiques au Réalisme scientifique

  • Positivisme et Instrumentalisme : Des penseurs comme Ernst Mach (1838-1916) ont soutenu que la science doit se concentrer uniquement sur les faits observables et leurs relations régulières. Selon Mach, les concepts tels que l'atome ou la masse sont des fictions métaphysiques, et les théories scientifiques ne sont que des "copies" des sensations humaines.
  • Hermann von Helmholtz (1821-1894), en revanche, a maintenu une position réaliste, affirmant que le but des sciences théoriques est de découvrir les causes profondes des phénomènes.
  • Henri Poincaré (1854-1912) a défendu une interprétation instrumentalisme des théories scientifiques, alors que Max Planck (1858-1947), physicien ayant découvert les quanta, a réaffirmé l'existence d'une réalité sous-jacente aux phénomènes observés, même si cette réalité ne peut être directement atteinte par la science.

5. Conclusion

La dissociation entre le réalisme et l'instrumentalisme est un débat central en épistémologie. Alors que le réalisme scientifique considère que les théories visent à décrire une réalité indépendante, l'instrumentalisme les voit comme des outils pratiques pour organiser et prédire des phénomènes observables, sans prétendre découvrir des vérités profondes sur la nature. Ces deux approches offrent des perspectives complémentaires sur le rôle des théories scientifiques et leur relation avec la réalité.

Figures de grands épistémologues en France au 20e siècle

Gaston Bachelard (1884-1962)

Bachelard remet en cause la vision linéaire du progrès scientifique, notamment le positivisme d'Auguste Comte. Selon lui, la science progresse par ruptures épistémologiques, une série de révolutions où de nouvelles connaissances remplacent les anciennes. Dans son ouvrage La formation de l’esprit scientifique (1938), il décrit la connaissance scientifique comme un processus historique et discontinu, où les erreurs doivent être identifiées et corrigées pour progresser. L'esprit scientifique, pour Bachelard, se forme en surmontant des obstacles internes à la pensée (psychologiques, cognitifs, etc.). Il soutient que "la science n'est que du caché", en ce sens qu'elle cherche à révéler les causes cachées derrière les faits observés.

Karl Popper (1902-1994)

Popper se distingue du positivisme et développe une épistémologie fondée sur le principe de falsifiabilité. Selon lui, une théorie scientifique doit être testable et réfutable. Une théorie qui ne peut être testée ou infirmée n'est pas scientifique, comme le montre sa critique des théories psychanalytiques de Freud. Popper défend une épistémologie déductive-nomologique où les théories expliquent les faits par des lois universelles et des conditions particulières. Il insiste sur la nécessité de formuler des hypothèses qui peuvent être contredites, car ce sont les échecs des théories qui mènent au progrès scientifique. La falsifiabilité devient ainsi le critère principal pour distinguer la science de la métaphysique.

Thomas S. Kuhn (1922-1996)

Kuhn introduit la notion de paradigme dans son ouvrage La structure des révolutions scientifiques (1962). Selon lui, la science progresse par des révolutions scientifiques, qui sont des changements de paradigmes. Un paradigme est un ensemble de croyances et de pratiques partagées par la communauté scientifique à un moment donné. Lorsque des anomalies s'accumulent et ne peuvent être expliquées par le paradigme dominant, un changement de paradigme survient. Ainsi, la science ne suit pas une progression linéaire mais est marquée par des ruptures. Kuhn souligne également que la communication entre chercheurs opérant dans des paradigmes différents est impossible, ce qui rend difficile toute unité dans l’histoire des sciences.

Jean Piaget (1896-1980)

Piaget, figure centrale de la psychologie et de l’épistémologie génétique, soutient que la connaissance se développe à travers un processus adaptatif, en interaction avec l'environnement. Sa théorie met en parallèle l’évolution de l’esprit humain et celle des sciences, et il introduit le concept de construction cognitive. Selon Piaget, la connaissance se structure progressivement selon des lois évolutives. Il défend une épistémologie qui fait dialoguer la psychologie, la biologie, et la logique, et insiste sur le rôle des structures cognitives dans l’élaboration des connaissances. Piaget considère l’épistémologie scientifique comme étant indissociable des interprétations psychologiques et met l’accent sur le développement des connaissances à travers les stades de l’enfance à l’âge adulte.

Résumé des contributions

Ces grands épistémologues partagent un intérêt pour la nature du progrès scientifique et la manière dont les connaissances se construisent, mais ils proposent des modèles variés. Bachelard insiste sur la rupture avec les erreurs passées et la nécessité de transformer l’esprit scientifique. Popper met l’accent sur la falsifiabilité et la testabilité des théories pour qu’elles soient scientifiques. Kuhn, quant à lui, développe une théorie des révolutions scientifiques, où des changements de paradigmes marquent le passage à de nouvelles conceptions du monde. Enfin, Piaget propose une épistémologie génétique, qui voit le développement de la connaissance comme une construction progressive, en interaction avec l’environnement, et le développement des structures cognitives. Ces épistémologues ont profondément influencé l’évolution de la pensée scientifique et philosophique du 20e siècle.

Résumé : L'Épistémologie de la Psychologie et la pensée scientifique du 20ème siècle – Intervention de Nicolas Bouleau

Dans cette intervention de 15 minutes, Nicolas Bouleau, un épistémologue français reconnu, présente et discute de l'évolution de l'épistémologie de la psychologie et de ses liens avec les courants de pensée scientifiques du 20ème siècle, en particulier le positivisme et le néo-positivisme.

Bouleau s'intéresse à la manière dont l'épistémologie de la psychologie a évolué en réponse aux grands débats philosophiques et scientifiques de l'époque. Il fait un retour sur les fondements du positivisme, qui cherche à expliquer les phénomènes par des faits observables et mesurables, rejetant toute spéculation non vérifiable. Dans cette perspective, la psychologie, comme toute science, doit se fonder sur des données empiriques et des méthodes rigoureuses de collecte et d'analyse.

Le néo-positivisme, courant de pensée influencé par le positivisme mais enrichi par les progrès des sciences du 20ème siècle, a également un rôle clé dans la discussion. Il se distingue par une approche plus nuancée, notamment par l'introduction de concepts comme la falsifiabilité (chez Popper) et l'idée que les théories scientifiques sont toujours ouvertes à la révision et à l'amélioration. Bouleau souligne l'importance de cette évolution qui permet de faire face à la complexité de la psychologie, en tant que discipline qui étudie des phénomènes mentaux souvent non directement observables.

L'intervention met également en lumière les défis spécifiques rencontrés par la psychologie en tant que science. Bouleau évoque le besoin de concilier l'approche expérimentale rigoureuse des sciences dures avec la reconnaissance de la singularité des phénomènes psychologiques et humains, qui échappent parfois aux modèles strictement quantitatifs.

En conclusion, Bouleau invite à une réflexion sur la façon dont l'épistémologie de la psychologie doit continuer à se développer pour intégrer les découvertes scientifiques tout en respectant la nature particulière des objets d’étude, tels que les phénomènes mentaux et comportementaux. Il soulève ainsi la question de l'avenir de la psychologie dans un contexte scientifique où se mêlent empirisme, rationalisme et approches constructivistes.



Le positivisme et le néo-positivisme sont deux courants philosophiques majeurs qui ont eu une influence considérable sur la science, y compris en psychologie, au cours du 19e et du 20e siècle. Voici un aperçu détaillé de ces deux mouvements :

1. Le positivisme

Le positivisme est une philosophie de la science qui a été fondée par le philosophe français Auguste Comte au début du 19e siècle. Il repose sur l’idée que la seule connaissance véritable et valable est celle qui provient des faits observables et qui peut être scientifiquement vérifiée. Le positivisme rejette toute forme de spéculation métaphysique ou théologique, estimant que seules les sciences empiriques, basées sur l'observation, l'expérimentation et la mesure, sont capables d'apporter une connaissance fiable du monde.

Principaux principes du positivisme :

  • Empirisme : La connaissance ne peut être acquise que par l’observation et l’expérience. Ce qui est vérifiable empiriquement devient la seule base de la connaissance légitime.
  • Loi de l’évolution des sciences : Comte propose une "loi des trois états", selon laquelle la société et les sciences évoluent successivement à travers trois stades :
  1. Le stade théologique (où tout est expliqué par la religion et des forces surnaturelles),
  2. Le stade métaphysique (où des concepts abstraits, non vérifiables, dominent),
  3. Le stade scientifique ou positif (où les phénomènes sont expliqués par des lois naturelles observables).
  • Réjection de la métaphysique : Le positivisme rejette les explications qui ne peuvent pas être confirmées par l'observation ou l'expérimentation. Par exemple, des questions sur l’existence de Dieu ou de la nature de l’âme humaine sont considérées comme hors du champ de la science.
  • Unité des sciences : Selon Comte, toutes les sciences, qu'elles soient naturelles (comme la physique ou la biologie) ou sociales (comme la sociologie), doivent suivre la même méthodologie fondée sur l'observation, la classification et la loi.
  • But de la science : La science a pour but d’établir des lois générales et des relations causales entre les phénomènes observables.

Influence du positivisme :

Le positivisme a eu une grande influence sur les sciences naturelles, qui se sont basées sur des méthodes expérimentales pour observer et expliquer le monde. Il a également influencé les sciences sociales, notamment la sociologie, que Comte a fondée en tant que discipline scientifique.


2. Le néo-positivisme

Le néo-positivisme (ou positivisme logique) est un courant qui émerge au début du 20e siècle, principalement avec les travaux du groupe de philosophes et scientifiques appelé le Cercle de Vienne. Ce groupe, composé de figures comme Rudolf Carnap, Moritz Schlick, Otto Neurath, et d'autres, cherche à réactualiser le positivisme à la lumière des avancées en logique et en philosophie des sciences.

Principaux principes du néo-positivisme :

  • L’accent sur la logique et les mathématiques : Les néo-positivistes croient que la logique formelle et les mathématiques peuvent fournir les outils nécessaires pour analyser les propositions scientifiques. Ils considèrent la logique comme la base de toute connaissance scientifique.
  • Vérification et falsifiabilité : Contrairement à Comte, qui cherchait à établir des lois générales sur la base de l’observation, les néo-positivistes introduisent le critère de vérifiabilité : une proposition ne peut être considérée comme scientifique que si elle peut être vérifiée par l’observation ou l’expérimentation. Plus tard, ce principe sera reformulé par Karl Popper sous l’idée de falsifiabilité.
  • Réjection des métaphysiques et des spéculations non vérifiables : Comme le positivisme, le néo-positivisme rejette toute affirmation qui ne peut être vérifiée empiriquement. Il est particulièrement rigide sur le rejet des théories métaphysiques, qui ne peuvent être ni confirmées ni infirmées par des observations.
  • Langage scientifique : Les néo-positivistes soutiennent que pour être scientifique, un énoncé doit être formulé de manière précise, en utilisant des termes vérifiables et mesurables. Ils essaient de réconcilier les sciences exactes (comme la physique) et les sciences humaines (comme la psychologie) en adoptant une méthodologie rigoureuse.
  • Connaissance comme construction logique : Le néo-positivisme souligne que la connaissance scientifique est un produit de la logique, de l'expérience et de l'analyse. C’est une construction rationnelle qui doit éviter les jugements subjectifs ou spéculatifs.

Influence du néo-positivisme :

Le néo-positivisme a joué un rôle majeur dans la philosophie des sciences du 20e siècle, en insistant sur la rigueur logique et la vérifiabilité des propositions scientifiques. Il a également influencé des domaines comme la linguistique (notamment avec la théorie du sens et de la signification de Carnap) et la psychologie scientifique.


3. Différences entre le positivisme et le néo-positivisme :

  • Évolution de la méthodologie : Tandis que le positivisme classique de Comte se concentre sur l'observation des faits et des lois générales, le néo-positivisme introduit la notion de falsifiabilité et de vérifiabilité, ce qui permet de mieux distinguer ce qui est scientifique de ce qui ne l'est pas.
  • Philosophie des sciences sociales : Le positivisme, en particulier avec Comte, cherchait à appliquer des méthodes scientifiques strictes aux sciences sociales. Le néo-positivisme, bien que partageant cette idée, a introduit la distinction plus claire entre les types de théories et de méthodes, en mettant davantage l'accent sur les structures logiques des propositions scientifiques.
  • Rôle des mathématiques et de la logique : Le néo-positivisme se distingue du positivisme par son accent sur les mathématiques et la logique comme outils essentiels pour structurer la connaissance scientifique, tandis que le positivisme classique de Comte ne mettait pas autant en avant ces outils.

Conclusion

Le positivisme et le néo-positivisme ont joué un rôle déterminant dans la construction de la pensée scientifique du 20e siècle. Le positivisme a permis de fonder la science moderne sur des principes d'observation empirique et de recherche de lois naturelles, tandis que le néo-positivisme, en introduisant la logique et la vérifiabilité, a fourni des outils pour analyser et structurer de manière plus précise les connaissances scientifiques. Cependant, ces courants ont aussi été critiqués, notamment pour leur rejet des dimensions subjectives de l'expérience humaine, ce qui a conduit à des évolutions et des débats dans la philosophie des sciences et des sciences sociales.

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