I. L’entrée progressive de Rome en Grèce : des guerres d’Illyrie à la Première guerre de Macédoine (229-205)
A. Les guerres d’Illyrie : la première apparition de Rome dans les Balkans
Les tribus illyriennes de la côte adriatique inquiètent Rome par leurs activités de piraterie. À la fin du IIIe siècle, un État fédéré dirigé par la reine Teuta prend forme et contrôle la côte dalmate.
La Première guerre d’Illyrie (229-228) marque la première intervention militaire de Rome dans la région. Rome y établit plusieurs états clients, notamment sur l’île de Pharos. Cependant, Rome se retire volontairement à l’issue du conflit, révélant une absence initiale de visée expansionniste directe en Grèce.
Mais la situation se dégrade : Démétrios de Pharos, roi illyrien, reprend ses activités de piraterie. Il se rapproche de la Macédoine de Philippe V, notamment en participant à la bataille de Sellasie (222). La Deuxième guerre d’Illyrie (220-219) conduit à sa défaite et à son exil à la cour de Macédoine.
B. La Première guerre de Macédoine (215-205) : Rome face à Philippe V
Profitant de la Deuxième guerre punique, Philippe V de Macédoine tente de s’emparer de territoires en Illyrie et dans l’Égée. Rome, occupée par Hannibal, ne peut intervenir directement mais scelle une alliance stratégique avec les Étoliens en 212. Ce traité romano-étolien marque la première véritable alliance diplomatique entre Rome et une puissance grecque.
La guerre s’étend au Péloponnèse, où les Achéens luttent contre Sparte, et en Grèce centrale, où les Étoliens affrontent la Macédoine. En 206, les combats cessent. Une paix est signée à Phoiniké en 205, marquant un compromis sans grande victoire pour Rome, mais elle pose les bases de futures interventions.
II. Rome, protectrice des Grecs contre Philippe V (205-196)
A. Philippe V et Antiochos III, menaces conjointes pour l'équilibre hellénistique
Dans cette même période, Antiochos III (règne 223-187) tente de réaffirmer la puissance séleucide. Après avoir surmonté la révolte de Molon (222-220) et celle d’Achaios, il est défait par Ptolémée IV à Raphia (217). Il entame alors une "Anabase" (212-205), une campagne ambitieuse vers l’est pour affirmer sa légitimité, inspirée d’Alexandre.
En 204, la mort de Ptolémée IV et la minorité de son fils Ptolémée V suscitent les convoitises. Philippe V et Antiochos III s'entendent pour se partager les territoires lagides, notamment la Syrie et certaines cités d’Asie Mineure.
B. La Deuxième guerre de Macédoine (200-197) : Rome contre la Macédoine
Philippe V multiplie alors les agressions, notamment contre Pergame et Rhodes, alliés traditionnels de Rome. Ces derniers sollicitent l’intervention du Sénat romain. Un ultimatum est lancé en 200, puis Rome déclare la guerre.
Au départ, les combats sont indécis. Mais à partir de 198, l’arrivée du consul T. Quinctius Flamininus, soucieux de libérer les cités grecques de l’emprise macédonienne, change la donne. En 197, la bataille décisive de Cynoscéphales voit la victoire de Rome sur Philippe V. La paix de Tempé réduit considérablement la puissance macédonienne.
C. La proclamation de la liberté des Grecs par Flamininus
En 196, lors des Jeux isthmiques de Corinthe, Flamininus proclame solennellement la "liberté des Grecs". Ce geste de propagande, aux accents bienfaisants, s’appuie sur le vocabulaire hellénistique de l’"autonomie" et de l’"isonomie". Rome se positionne comme protectrice des cités grecques contre toute domination monarchique.
Cependant, cette liberté reste encadrée : certaines cités (Locride, Phocide) sont confiées aux Achéens ou à d’autres alliés de Rome. Les tensions avec les Étoliens montent, car ils estiment être lésés dans le partage post-conflit.
III. Rome face à Antiochos III et la fin de la monarchie macédonienne (192-168)
A. De la guerre contre Nabis à l’intervention d’Antiochos III
Entre 195 et 192, les tensions s’accroissent. Rome mène une campagne contre Nabis de Sparte, roi tyrannique qui avait annexé Argos. Flamininus réussit à unir les Grecs dans une symmachie informelle, mais cette union ne dure pas.
Les Étoliens, frustrés par la montée de Rome, cherchent alors l’alliance avec Antiochos III. Ce dernier, conseillé par Hannibal, débarque en Grèce avec une armée réduite en 192. Il s’installe à Démétrias, mais sa tentative échoue.
B. La guerre antiochique (192-188) et la paix d’Apamée
En 191, les troupes romaines battent Antiochos aux Thermopyles, qui se retire en Asie Mineure. Rome le poursuit jusque dans ses territoires. En 190, la bataille de Magnésie du Sipyle marque une défaite cinglante pour les Séleucides.
La paix d’Apamée (188) impose à Antiochos des conditions humiliantes : abandon de l’Asie Mineure à l’ouest du Taurus, livraison d’otages (dont son fils Antiochos IV), interdiction de recruter des éléphants et de signer des traités à l’ouest, indemnités de guerre massives. Rome en ressort en arbitre de la Méditerranée orientale.
C. La fin de la monarchie macédonienne (188-168)
Après la mort de Philippe V en 179, son fils Persée lui succède. Il cherche à restaurer l’influence macédonienne et s’allie avec les Séleucides. Rome, alarmée, déclare la Troisième guerre de Macédoine en 171.
La guerre est lente et difficile. Mais en 168, la bataille de Pydna, remportée par le consul Paul-Émile, marque la fin du royaume macédonien. Celui-ci est divisé en quatre républiques vassales de Rome. Les ambitions royales hellénistiques sont durablement brisées.