Fiche de Lecture : La Déclaration des droits de la femme et de la citoyenne d’Olympe de Gouges
Introduction :
La Déclaration des droits de la femme et de la citoyenne, rédigée en 1791 par Olympe de Gouges, s'inscrit dans le contexte de la Révolution française. Bien que la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen ait été adoptée en 1789, les femmes en ont été exclues malgré leurs contributions significatives à la Révolution. Olympe de Gouges revendique ainsi l'égalité des droits pour les femmes, remettant en cause l’ordre patriarcal établi. Le texte que nous allons étudier est une interpellation directe aux hommes, questionnant leur prétendue supériorité.
Lecture du texte :
Le texte se divise en trois parties distinctes. Dans la première partie, Olympe de Gouges interpelle les hommes par une série de questions. Dans la deuxième, elle les guide pour observer la nature et dans la troisième, elle conclut que seul l’homme opprime l’autre sexe.
Partie 1 : Interpellation des hommes
Olympe de Gouges s’adresse directement aux hommes, utilisant le terme « homme » au singulier, mais sous-entendant tous les hommes. Sa question initiale « es-tu capable d’être juste ? » positionne le débat sur le plan de la justice, invitant à une réflexion sur les fondements des inégalités. Cette question rhétorique remet en cause la légitimité de la domination masculine.
Elle introduit aussi des mots liés à la justice, tels que « droit » (l. 2) et « opprimés » (l. 3), établissant ainsi un vocabulaire de légitimité. En se posant en porte-parole des femmes avec l’affirmation « c’est une femme qui t’en fait la question » (l. 1-2), elle crée un face-à-face entre « hommes » et « femmes » (l. 1). Ce renversement de l’ordre établi lui confère une autorité, affirmée par la question concise « dis-moi » (l. 2), qui ouvre un débat pressant.
Les phrases courtes et percutantes, comme « Qui t’a donné le pouvoir d’opprimer un sexe ? » (l. 3), visent à déstabiliser les justifications des hommes, les réduisant à la seule force physique ou à des prétentions intellectuelles. Olympe conclut que même le Créateur n’a pas octroyé ce droit, suggérant que dans la nature, la supériorité masculine n’est pas fondée.
Partie 2 : Observation de la nature
Dans cette seconde partie, Olympe de Gouges propose aux hommes d’observer la nature, en utilisant des verbes à l’impératif tels que « observe », « parcours », et « étudie ». Ces impératifs impliquent une démarche scientifique et invitent à une réflexion rationnelle.
En énonçant « remonte aux éléments les plus simples » (l. 6), elle suggère une analyse des bases de la nature. Elle n'examine pas seulement les animaux, mais aussi les végétaux, utilisant le terme « matière organisée » pour insister sur l’harmonie naturelle.
La conclusion implicite de cette observation est que, dans la nature, il n’existe pas de différences de valeur entre les sexes. La répétition du mot « partout » (l. 10, 11) souligne l’universalité de cette égalité. Olympe utilise des verbes comme « confondus » et « coopèrent » (l. 11-12) pour montrer que l'égalité est la norme dans le monde naturel, la qualifiant d’« ensemble harmonieux » (l. 12). Cette description s’oppose à l’inégalité des sociétés humaines.
Partie 3 : Conclusion sur l’oppression masculine
Dans cette dernière section, Olympe abandonne le tutoiement pour parler des hommes à la troisième personne, ce qui généralise son propos tout en l’intensifiant. Elle les accuse de façon cinglante, en utilisant des termes péjoratifs comme « se fagoter » (l. 14), qui évoque une action bâclée, pour contraster avec le terme abstrait « principe » qui désigne leur prétendue supériorité.
Cette partie se distingue par une accumulation d’adjectifs péjoratifs, comme « bizarre », « aveugle », « boursouflé de sciences » et « dégénéré », qui décrivent l’homme comme un personnage grotesque et incompétent. La gradation des adjectifs accentue le caractère ridicule de la prétendue supériorité masculine.
Olympe souligne l’absurdité des préjugés des hommes, qui, à l'ère des Lumières, devraient pourtant posséder un savoir éclairé. Elle conclut en affirmant que les femmes ont « toutes les facultés intellectuelles », et dénonce ainsi l’incohérence des révolutionnaires qui prônent l’égalité tout en maintenant des inégalités de genre.
Conclusion :
Olympe de Gouges écrit un texte véhément, empreint d’ironie et de moquerie, qui vise à faire réfléchir sur la condition féminine. En confrontant les sociétés humaines à la nature, elle plaide pour une égalité des sexes qu’elle présente comme un droit naturel. Sa charge polémique met en lumière l’arbitraire de la domination masculine et revendique avec force une reconnaissance des droits des femmes.