Le premier mouvement = galerie de portraits faits de quelques traits caractéristiques et pittoresques = satire de la bourgeoisie de Charleville.
Le deuxième mouvement (25-36) s’inscrit dans une rupture. Passage à la première personne du singulier, fortement présente ( 11 occurrences) = le Poète. Les 3 ultimes quatrains évoquent l’attitude du poète lors de ces soirées. Il semble étranger au spectacle et au jeu social qui précède.
Q7 = Les différences du poète
* le vêtement et comportement : « débraillé » + comparaison « comme un étudiant» *engage un jeu de relations avec « les alertes fillettes » :
o « alertes », à la fois vives et attentives (qualité physique et morale)
o s’opposent au « bourgeois poussifs »
o sont caractérisées par leur côté vivant : « en riant ». atmosphère de jeu , v35. A l’opposé de la société figée dans ses rites des premiers quatrains.
*Le poète s’intéresse aux jeunes filles « je suis » (25 ;31 = verbe suivre) . Des rapports de séduction se mettent en place : ainsi qu’une complicité « savent bien » + jeux de regards « je regarde toujours » (29) ; jeu malicieux : « leur yeux tout pleins de choses indiscrètes ». Le poète est comme les pioupious, du côté de l’amour .
Q8 se concentre sur le poète : son silence « je ne dis pas un mot »(29). Les deux points (29) introduisent la justification de ce silence : l’enjambement du deuxième hémistiche du vers 29 au vers 30 met en valeur la fascination qu’exercent le corps des jeunes filles. Son regard est de plus en plus charnel :
*Le champ lexical du corps : 30,32
*Le regard, qui se fait de plus en plus indiscret, devine les formes sous les tissus : (31,32)
*L’assonance en « ou » et l’allitération « le dos divin » Tout cela met en évidence une atmosphère très sensuelle, une érotisation des corps et du moment. Les regards se poursuivent dans le
Q9 : Le regard descend et cherche sous la robe « la bottine, le bas ». Les points de suspension (33) suggèrent le déshabillage réel ou rêvé auquel se livre le poète. « La bottine » et « le bas », cachés sous les longues robes, sont deux motifs érotiques au XIXème siècle. Il s’agit toujours de découvrir ce qui est caché : cf la préposition « sous » : on est « sous les marronniers » « sous le corsage », « déniché ». Le ton de ce second mouvement n’est plus celui de la satire. On est davantage dans une forme de lyrisme amoureux.
*Le tiret (34) met en valeur cette reconstruction rêvée des corps. C’est tout le pouvoir de la poésie qui lui permet de se glisser sous les « frêles atours » et d’approcher ces corps amoureux.
*La métaphore hyperbolique et traditionnelle du feu de l’amour : «brûlés » et de la maladie « fièvres » + Les allitérations en « b et l » « brûlés de belles fièvres » insistent sur l’émoi, le désir qui s’empare du poète.
*Les points de suspension par trois fois (33 ;35 ;36) fonctionnent comme des litotes. Ils laissent entendre davantage, l’indicible. Le temps s’étire. On est dans la suggestion du bonheur et du plaisir qui habitent le poète.
*Le poème s’achève sur les « baisers » qui viennent aux lèvres du poète. Tout ici évoque la sensualité, le désir : la rime « fièvres / lèvres », les allitérations et les assonances qui traversent les trois derniers quatrains, l’absence de mots, le silence. Juste les regards, la fièvre amoureuse et la musicalité des vers. Mais d’une certaine manière le poète se regarde et s’amuse de lui-même, en recourant à un lyrisme amoureux qui reprend les codes romantiques.