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Post-Bac
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TD 7: Droit des Sociétés 2

Droit spécial des sociétés

Séance 7 : La  cession des Droit Sociaux IInd Partie 


La garantie de la Cession des Droit sociaux

Introduction Général


Un cessionnaire qui achète des actions peut être déçu par la réalité de ce qu'il a acquis, par exemple, si les actions ont été achetées à un prix élevé basé sur une surévaluation de la société. Pour se protéger, il peut mettre en œuvre des garanties, qui se divisent en deux types :

Les garanties légales : Prévisions du droit des sociétés pour protéger les parties dans ce genre de situation.

Les garanties conventionnelles : Accords spécifiques entre les parties, souvent définis dans le contrat de cession, pour couvrir ce type de risque.


I) Les garanties légales dans la Cession des Droit sociaux 


A) Les vices du l'erreur consentement


Ce sont  les vices qu’il est possible de mettre en place pour contrer un contrat de vente. Ce sont l’erreur, le dol et la violence. 

  • L'erreur

Seule l’erreur sur les qualités essentielles et substantielles va pouvoir entraîner la nullité du contrat au contraire de l’erreur sur la valeur. Cette erreur sur la valeur est indifférente et donc non-excusable. Seule est excusable l’erreur sur les qualités substantielles. 

Les qualités essentielles sont les droits donnés dans la société : droits financiers, politiques et patrimoniaux. 

Le juge va se demander si les actions reçues et les droits qu’elles donnent sont conformes aux droits qu’elles s’attendaient à avoir. A-t-on bien des droits politiques, financiers et patrimoniaux ? Même si ces droits sont moins importants que prévu, ce qui compte c’est que ces droits existent. Donc pas d’erreur sur les qualités substantielles s’ils sont moins importants. 

Un cas où l’erreur sur les qualités substantielles va jouer : action qui ne donne aucun droit politique, financier et patrimonial : lorsque la société ne peut plus exercer son objet social, qui ne peut plus avoir d’activité. 

Un Arrêt du 1er octobre 1991,  a reconnu une erreur sur les qualités substantielles. Dans cette affaire, un acheteur a acquis des actions d’une société exploitant une carrière. Le lendemain de la cession, le cédant vend le fonds de commerce à une autre personne. À l'arrivée de l'acheteur, il découvre que l'activité de la société n'existe plus. Le juge a alors estimé que l'acheteur pensait acquérir une société offrant des droits de vote et des dividendes, mais puisque l'activité avait cessé, il a jugé qu'il y avait une erreur sur les qualités substantielles du bien. Cela a constitué un vice du consentement, entraînant la nullité de la cession.

  • Le dol

Le dol, en droit des contrats, est le fait d’obtenir le consentement de l’autre partie soit par des manœuvres trompeuses, soit en cachant volontairement des informations importantes.

Pour qu’il y ait dol, deux éléments doivent être réunis :

L'élément matériel : Il s’agit d’actes concrets comme des manœuvres (exemple : falsifier un document) ou la dissimulation d’informations importantes. Dans le cas de la dissimulation,

il faut aussi prouver que cette omission était volontaire.

L'élément intentionnel : Cela signifie que la manœuvre ou la réticence était délibérée. Il faut aussi prouver que cette dissimulation a conduit l’autre partie à signer le contrat. En pratique, lorsqu’un acheteur est déçu après la cession, il invoque souvent le dol en affirmant que le vendeur lui a caché des informations déterminantes pour son consentement.

La jurisprudence tend à faciliter la tâche de l’acheteur en admettant parfois des présomptions d’intention trompeuse. Toutefois, elle reste exigeante sur la réunion des deux éléments (matériel et intentionnel).

Exemple de dol avéré :

Un acheteur achète une agence de publicité dont 95 % du chiffre d’affaires dépend d’un seul client, qui s’avère être la compagne du vendeur. Cette information n’a pas été communiquée à l’acheteur, alors qu’il était crucial de savoir si ce client continuerait à travailler avec la société après la cession. La Cour de cassation a considéré que cette dissimulation était intentionnelle et a présumé l’intention dolosive du vendeur, entraînant l’annulation de la cession.

Exemple où le dol n’a pas été retenu :

Un acheteur découvre après la cession qu’une société vendue utilisait un système de comptabilité inhabituel dans son secteur d’activité, ce qui donnait une image faussée de sa situation financière. Bien que cet élément matériel soit établi, le juge a estimé que le vendeur n’avait pas intentionnellement trompé l’acheteur, car il utilisait ce système depuis 15 ans sans penser qu’il influencerait la décision d’achat. Faute d’intention dolosive prouvée, le dol n’a pas été retenu.

La violence 

La violence est un vice du consentement qui peut entraîner l'annulation d'un contrat lorsqu'une partie a été contrainte d'accepter par la menace ou la pression.

Un exemple notable est une décision de la CA de Paris du 3 novembre 2019, où un salarié actionnaire a demandé l'annulation de l'achat d'actions, affirmant que son employeur l’avait menacé de licenciement s'il refusait d'investir dans la société. Cette situation illustre la violence morale.

Bien que les cas de violence soient rares, l'ordonnance de 2016, qui reconnaît la notion d'abus de dépendance, pourrait permettre d'élargir les situations où un contrat peut être contesté pour violence.

B)Les garanties légales

Deux types de garanties légales protègent les acheteurs dans le cadre d’une cession :

  • La garantie des vices cachés
  • La garantie d’éviction

1)La Garantie des vices cachés


La garantie des vices cachés s'applique lorsque l’objet vendu est impropre à l’usage auquel il est destiné. Pour des actions, cela signifie que les droits financiers, politiques ou patrimoniaux attendus ne sont pas respectés. Par exemple, si des actions censées offrir des dividendes importants n’en procurent que très peu, cela ne suffit pas à caractériser un vice caché. En revanche, si elles ne procurent aucun des droits attendus, on peut parler de vice caché.

En pratique, les actions en garantie des vices cachés sont rarement couronnées de succès.

Exemple de refus : Dans l'arrêt "Hôtel de l'Esplanade" du 12 décembre 1995, un acheteur a acquis une société exploitant un hôtel. Quelques mois après la cession, l'hôtel a été fermé par l'administration pour absence d'escaliers de secours. L'acheteur a invoqué la garantie des vices cachés, mais le juge a rejeté sa demande. Il a considéré que les actions donnaient bien les droits financiers et politiques attendus, et que le problème de conformité des locaux relevait de l’exploitation de l’hôtel, non de la nature des actions. Le défaut n’était donc pas un vice caché lié aux actions elles-mêmes.

2) La garantie d’éviction


Dans l'arrêt Ducros du 21 janvier 1997, des vendeurs ont cédé leurs parts sociales, puis ont créé une nouvelle société concurrente spécialisée dans la production et la commercialisation d'épices surgelées. L'acheteur des parts a alors invoqué la garantie d'éviction pour faits personnels, estimant que cette nouvelle société portait atteinte à l’activité de la société cédée.

Cependant, la jurisprudence de l'époque était stricte : la garantie d'éviction ne pouvait être retenue que si la nouvelle société empêchait réellement la société vendue de réaliser son objet social. Dans cette affaire, le juge a estimé que la société vendue pouvait continuer son activité malgré la concurrence, et la garantie d’éviction n’a donc pas été retenue.

Évolution de la jurisprudence en 2021

Cette position a changé avec l'arrêt du 10 novembre 2021 . La Cour de cassation a fait évoluer sa conception de la garantie d'éviction, affirmant que l'obligation légale de non-concurrence du vendeur devait être proportionnée aux intérêts légitimes à protéger, tout en respectant la liberté du commerce et de l'industrie.

Dès lors, la garantie d'éviction peut s'appliquer même si la société vendue peut encore exercer son activité, à condition que la restriction imposée au vendeur reste équilibrée dans sa portée géographique, temporelle et matérielle.

Confirmation en 2024

L'arrêt de renvoi du 6 novembre 2024 a confirmé cette évolution. La Cour d'appel, après renvoi, a reconnu que le vendeur était bien soumis à la garantie d'éviction, en s’appuyant sur le principe de proportionnalité de l’obligation de non-concurrence.

La garantie légale de conformité

La garantie légale de conformité, qui s’applique lorsque le bien vendu ne correspond pas aux stipulations du contrat, ne s'applique pas aux cessions d'actions, car elle ne concerne que les biens meubles corporels.

Cela souligne la difficulté pour les acheteurs d'actions de faire valoir des garanties légales adaptées, puisque la plupart des dispositifs ont été conçus pour des ventes de biens physiques.

Limites des garanties et recours du cessionnaire:En cas de vice du consentement, la sanction théorique est la nullité de la cession. Toutefois, cette solution est souvent inadaptée dans les cessions d'actions. En pratique, le cessionnaire préfère généralement demander des dommages et intérêts pour obtenir une réduction du prix, bien que cela ne soit pas directement prévu par les garanties légales.

Face à ces limites, les cessionnaires recourent donc souvent à des garanties conventionnelles, négociées entre les parties lors de la cession.


II) Les Garanties Conventionnelles dans la Cession de Droit Sociaux

Les garanties conventionnelles jouent un rôle essentiel dans les cessions d’actions et leur portée dépend souvent du rapport de force entre les parties. Lorsque le vendeur est en position de force, l’acheteur obtient généralement moins de garanties. Ces garanties conventionnelles sont principalement regroupées sous l’appellation de garanties d’actif et de passif. Elles sont souvent au cœur des négociations et il arrive que la vente échoue lorsque les parties ne parviennent pas à se mettre d’accord sur leur contenu. La garantie de passif engage le vendeur à protéger l’acheteur contre toute diminution de la valeur des actions qui résulterait soit d’une augmentation du passif soit d’une diminution de l’actif de la société, dès lors que ces événements trouvent leur cause dans une période antérieure à la cession. Par exemple, si un acheteur acquiert les titres d’une société le 1er janvier 2025 et qu’en juin de la même année il reçoit un courrier annonçant un redressement fiscal concernant l’exercice 2024, la garantie de passif s’applique, obligeant le vendeur à compenser cette augmentation du passif.

Il existe deux grands types de garanties conventionnelles de prix: 

Les clauses de révision de prix :  permettent aux parties de convenir que le prix de cession soit ajusté en cas de variation du passif ou de l’actif après la cession. Ces clauses bénéficient en principe à l’acheteur, mais il est également possible d’envisager une clause au profit du vendeur. Ainsi, si un événement favorable survenu après la cession mais lié à une cause antérieure entraîne une diminution du passif ou une augmentation de l’actif, la valeur des titres s’en trouve rehaussée et le prix de cession pourrait être augmenté. Toutefois, le montant que le vendeur pourrait être amené à verser dans le cadre de cette clause ne saurait jamais excéder le prix initialement payé par l’acheteur.

D’autre part, les clauses de passif présentent plusieurs particularités importantes. D’abord, le bénéficiaire de cette clause n’est pas uniquement l’acheteur ; la société elle-même peut en bénéficier, bien qu’étant tierce au contrat de cession. Ensuite, à la différence des clauses de révision de prix, les clauses de passif ne sont pas limitées quant au montant que le vendeur pourrait être tenu de verser. Le vendeur peut donc se voir contraint de couvrir l’intégralité du passif découvert après la cession, ce qui rend ces clauses particulièrement risquées pour lui.

Les clauses de garantie dans les cessions d’actions ont pour objet de définir les événements susceptibles de déclencher leur mise en œuvre, généralement exprimés en termes comptables. Elles précisent également la période pendant laquelle ces événements doivent trouver leur cause, appelée période de couverture, souvent fixée à trois ans. Par ailleurs, elles déterminent la période de révélation, durant laquelle les événements doivent se manifester, généralement également de trois ans.

Le montant de la garantie est un autre élément essentiel. Bien que les clauses de passif ne soient pas toujours assorties d’un plafond, il est rare que la somme versée par le vendeur corresponde exactement à l’augmentation du passif ou à la diminution de l’actif. Des ajustements sont souvent prévus, comme des seuils de déclenchement en dessous desquels l’acheteur prend à sa charge les variations, des franchises qui laissent une partie du coût à la charge de l’acheteur, ou des plafonds limitant la responsabilité du vendeur. Ces ajustements peuvent être définis pour chaque événement couvert par la garantie.

La mise en œuvre de ces clauses est souvent encadrée par un formalisme rigoureux. Par exemple, l’acheteur peut être tenu d’informer le vendeur dans un délai précis, souvent quinze jours après la survenance de l’événement. Ce formalisme est crucial car, en cas de contestation, c’est souvent le vendeur qui agit, même s’il est responsable de la situation. De plus, ces clauses organisant la transmission des informations afin que le vendeur puisse se défendre et limiter ses coûts.

Enfin, la complexité de certaines clauses peut être telle que, parfois, même les avocats impliqués peinent à se rappeler les termes exacts convenus, ce qui souligne l’importance d’une rédaction claire et précise.


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TD 7: Droit des Sociétés 2

Droit spécial des sociétés

Séance 7 : La  cession des Droit Sociaux IInd Partie 


La garantie de la Cession des Droit sociaux

Introduction Général


Un cessionnaire qui achète des actions peut être déçu par la réalité de ce qu'il a acquis, par exemple, si les actions ont été achetées à un prix élevé basé sur une surévaluation de la société. Pour se protéger, il peut mettre en œuvre des garanties, qui se divisent en deux types :

Les garanties légales : Prévisions du droit des sociétés pour protéger les parties dans ce genre de situation.

Les garanties conventionnelles : Accords spécifiques entre les parties, souvent définis dans le contrat de cession, pour couvrir ce type de risque.


I) Les garanties légales dans la Cession des Droit sociaux 


A) Les vices du l'erreur consentement


Ce sont  les vices qu’il est possible de mettre en place pour contrer un contrat de vente. Ce sont l’erreur, le dol et la violence. 

  • L'erreur

Seule l’erreur sur les qualités essentielles et substantielles va pouvoir entraîner la nullité du contrat au contraire de l’erreur sur la valeur. Cette erreur sur la valeur est indifférente et donc non-excusable. Seule est excusable l’erreur sur les qualités substantielles. 

Les qualités essentielles sont les droits donnés dans la société : droits financiers, politiques et patrimoniaux. 

Le juge va se demander si les actions reçues et les droits qu’elles donnent sont conformes aux droits qu’elles s’attendaient à avoir. A-t-on bien des droits politiques, financiers et patrimoniaux ? Même si ces droits sont moins importants que prévu, ce qui compte c’est que ces droits existent. Donc pas d’erreur sur les qualités substantielles s’ils sont moins importants. 

Un cas où l’erreur sur les qualités substantielles va jouer : action qui ne donne aucun droit politique, financier et patrimonial : lorsque la société ne peut plus exercer son objet social, qui ne peut plus avoir d’activité. 

Un Arrêt du 1er octobre 1991,  a reconnu une erreur sur les qualités substantielles. Dans cette affaire, un acheteur a acquis des actions d’une société exploitant une carrière. Le lendemain de la cession, le cédant vend le fonds de commerce à une autre personne. À l'arrivée de l'acheteur, il découvre que l'activité de la société n'existe plus. Le juge a alors estimé que l'acheteur pensait acquérir une société offrant des droits de vote et des dividendes, mais puisque l'activité avait cessé, il a jugé qu'il y avait une erreur sur les qualités substantielles du bien. Cela a constitué un vice du consentement, entraînant la nullité de la cession.

  • Le dol

Le dol, en droit des contrats, est le fait d’obtenir le consentement de l’autre partie soit par des manœuvres trompeuses, soit en cachant volontairement des informations importantes.

Pour qu’il y ait dol, deux éléments doivent être réunis :

L'élément matériel : Il s’agit d’actes concrets comme des manœuvres (exemple : falsifier un document) ou la dissimulation d’informations importantes. Dans le cas de la dissimulation,

il faut aussi prouver que cette omission était volontaire.

L'élément intentionnel : Cela signifie que la manœuvre ou la réticence était délibérée. Il faut aussi prouver que cette dissimulation a conduit l’autre partie à signer le contrat. En pratique, lorsqu’un acheteur est déçu après la cession, il invoque souvent le dol en affirmant que le vendeur lui a caché des informations déterminantes pour son consentement.

La jurisprudence tend à faciliter la tâche de l’acheteur en admettant parfois des présomptions d’intention trompeuse. Toutefois, elle reste exigeante sur la réunion des deux éléments (matériel et intentionnel).

Exemple de dol avéré :

Un acheteur achète une agence de publicité dont 95 % du chiffre d’affaires dépend d’un seul client, qui s’avère être la compagne du vendeur. Cette information n’a pas été communiquée à l’acheteur, alors qu’il était crucial de savoir si ce client continuerait à travailler avec la société après la cession. La Cour de cassation a considéré que cette dissimulation était intentionnelle et a présumé l’intention dolosive du vendeur, entraînant l’annulation de la cession.

Exemple où le dol n’a pas été retenu :

Un acheteur découvre après la cession qu’une société vendue utilisait un système de comptabilité inhabituel dans son secteur d’activité, ce qui donnait une image faussée de sa situation financière. Bien que cet élément matériel soit établi, le juge a estimé que le vendeur n’avait pas intentionnellement trompé l’acheteur, car il utilisait ce système depuis 15 ans sans penser qu’il influencerait la décision d’achat. Faute d’intention dolosive prouvée, le dol n’a pas été retenu.

La violence 

La violence est un vice du consentement qui peut entraîner l'annulation d'un contrat lorsqu'une partie a été contrainte d'accepter par la menace ou la pression.

Un exemple notable est une décision de la CA de Paris du 3 novembre 2019, où un salarié actionnaire a demandé l'annulation de l'achat d'actions, affirmant que son employeur l’avait menacé de licenciement s'il refusait d'investir dans la société. Cette situation illustre la violence morale.

Bien que les cas de violence soient rares, l'ordonnance de 2016, qui reconnaît la notion d'abus de dépendance, pourrait permettre d'élargir les situations où un contrat peut être contesté pour violence.

B)Les garanties légales

Deux types de garanties légales protègent les acheteurs dans le cadre d’une cession :

  • La garantie des vices cachés
  • La garantie d’éviction

1)La Garantie des vices cachés


La garantie des vices cachés s'applique lorsque l’objet vendu est impropre à l’usage auquel il est destiné. Pour des actions, cela signifie que les droits financiers, politiques ou patrimoniaux attendus ne sont pas respectés. Par exemple, si des actions censées offrir des dividendes importants n’en procurent que très peu, cela ne suffit pas à caractériser un vice caché. En revanche, si elles ne procurent aucun des droits attendus, on peut parler de vice caché.

En pratique, les actions en garantie des vices cachés sont rarement couronnées de succès.

Exemple de refus : Dans l'arrêt "Hôtel de l'Esplanade" du 12 décembre 1995, un acheteur a acquis une société exploitant un hôtel. Quelques mois après la cession, l'hôtel a été fermé par l'administration pour absence d'escaliers de secours. L'acheteur a invoqué la garantie des vices cachés, mais le juge a rejeté sa demande. Il a considéré que les actions donnaient bien les droits financiers et politiques attendus, et que le problème de conformité des locaux relevait de l’exploitation de l’hôtel, non de la nature des actions. Le défaut n’était donc pas un vice caché lié aux actions elles-mêmes.

2) La garantie d’éviction


Dans l'arrêt Ducros du 21 janvier 1997, des vendeurs ont cédé leurs parts sociales, puis ont créé une nouvelle société concurrente spécialisée dans la production et la commercialisation d'épices surgelées. L'acheteur des parts a alors invoqué la garantie d'éviction pour faits personnels, estimant que cette nouvelle société portait atteinte à l’activité de la société cédée.

Cependant, la jurisprudence de l'époque était stricte : la garantie d'éviction ne pouvait être retenue que si la nouvelle société empêchait réellement la société vendue de réaliser son objet social. Dans cette affaire, le juge a estimé que la société vendue pouvait continuer son activité malgré la concurrence, et la garantie d’éviction n’a donc pas été retenue.

Évolution de la jurisprudence en 2021

Cette position a changé avec l'arrêt du 10 novembre 2021 . La Cour de cassation a fait évoluer sa conception de la garantie d'éviction, affirmant que l'obligation légale de non-concurrence du vendeur devait être proportionnée aux intérêts légitimes à protéger, tout en respectant la liberté du commerce et de l'industrie.

Dès lors, la garantie d'éviction peut s'appliquer même si la société vendue peut encore exercer son activité, à condition que la restriction imposée au vendeur reste équilibrée dans sa portée géographique, temporelle et matérielle.

Confirmation en 2024

L'arrêt de renvoi du 6 novembre 2024 a confirmé cette évolution. La Cour d'appel, après renvoi, a reconnu que le vendeur était bien soumis à la garantie d'éviction, en s’appuyant sur le principe de proportionnalité de l’obligation de non-concurrence.

La garantie légale de conformité

La garantie légale de conformité, qui s’applique lorsque le bien vendu ne correspond pas aux stipulations du contrat, ne s'applique pas aux cessions d'actions, car elle ne concerne que les biens meubles corporels.

Cela souligne la difficulté pour les acheteurs d'actions de faire valoir des garanties légales adaptées, puisque la plupart des dispositifs ont été conçus pour des ventes de biens physiques.

Limites des garanties et recours du cessionnaire:En cas de vice du consentement, la sanction théorique est la nullité de la cession. Toutefois, cette solution est souvent inadaptée dans les cessions d'actions. En pratique, le cessionnaire préfère généralement demander des dommages et intérêts pour obtenir une réduction du prix, bien que cela ne soit pas directement prévu par les garanties légales.

Face à ces limites, les cessionnaires recourent donc souvent à des garanties conventionnelles, négociées entre les parties lors de la cession.


II) Les Garanties Conventionnelles dans la Cession de Droit Sociaux

Les garanties conventionnelles jouent un rôle essentiel dans les cessions d’actions et leur portée dépend souvent du rapport de force entre les parties. Lorsque le vendeur est en position de force, l’acheteur obtient généralement moins de garanties. Ces garanties conventionnelles sont principalement regroupées sous l’appellation de garanties d’actif et de passif. Elles sont souvent au cœur des négociations et il arrive que la vente échoue lorsque les parties ne parviennent pas à se mettre d’accord sur leur contenu. La garantie de passif engage le vendeur à protéger l’acheteur contre toute diminution de la valeur des actions qui résulterait soit d’une augmentation du passif soit d’une diminution de l’actif de la société, dès lors que ces événements trouvent leur cause dans une période antérieure à la cession. Par exemple, si un acheteur acquiert les titres d’une société le 1er janvier 2025 et qu’en juin de la même année il reçoit un courrier annonçant un redressement fiscal concernant l’exercice 2024, la garantie de passif s’applique, obligeant le vendeur à compenser cette augmentation du passif.

Il existe deux grands types de garanties conventionnelles de prix: 

Les clauses de révision de prix :  permettent aux parties de convenir que le prix de cession soit ajusté en cas de variation du passif ou de l’actif après la cession. Ces clauses bénéficient en principe à l’acheteur, mais il est également possible d’envisager une clause au profit du vendeur. Ainsi, si un événement favorable survenu après la cession mais lié à une cause antérieure entraîne une diminution du passif ou une augmentation de l’actif, la valeur des titres s’en trouve rehaussée et le prix de cession pourrait être augmenté. Toutefois, le montant que le vendeur pourrait être amené à verser dans le cadre de cette clause ne saurait jamais excéder le prix initialement payé par l’acheteur.

D’autre part, les clauses de passif présentent plusieurs particularités importantes. D’abord, le bénéficiaire de cette clause n’est pas uniquement l’acheteur ; la société elle-même peut en bénéficier, bien qu’étant tierce au contrat de cession. Ensuite, à la différence des clauses de révision de prix, les clauses de passif ne sont pas limitées quant au montant que le vendeur pourrait être tenu de verser. Le vendeur peut donc se voir contraint de couvrir l’intégralité du passif découvert après la cession, ce qui rend ces clauses particulièrement risquées pour lui.

Les clauses de garantie dans les cessions d’actions ont pour objet de définir les événements susceptibles de déclencher leur mise en œuvre, généralement exprimés en termes comptables. Elles précisent également la période pendant laquelle ces événements doivent trouver leur cause, appelée période de couverture, souvent fixée à trois ans. Par ailleurs, elles déterminent la période de révélation, durant laquelle les événements doivent se manifester, généralement également de trois ans.

Le montant de la garantie est un autre élément essentiel. Bien que les clauses de passif ne soient pas toujours assorties d’un plafond, il est rare que la somme versée par le vendeur corresponde exactement à l’augmentation du passif ou à la diminution de l’actif. Des ajustements sont souvent prévus, comme des seuils de déclenchement en dessous desquels l’acheteur prend à sa charge les variations, des franchises qui laissent une partie du coût à la charge de l’acheteur, ou des plafonds limitant la responsabilité du vendeur. Ces ajustements peuvent être définis pour chaque événement couvert par la garantie.

La mise en œuvre de ces clauses est souvent encadrée par un formalisme rigoureux. Par exemple, l’acheteur peut être tenu d’informer le vendeur dans un délai précis, souvent quinze jours après la survenance de l’événement. Ce formalisme est crucial car, en cas de contestation, c’est souvent le vendeur qui agit, même s’il est responsable de la situation. De plus, ces clauses organisant la transmission des informations afin que le vendeur puisse se défendre et limiter ses coûts.

Enfin, la complexité de certaines clauses peut être telle que, parfois, même les avocats impliqués peinent à se rappeler les termes exacts convenus, ce qui souligne l’importance d’une rédaction claire et précise.


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