Exposé 10 min sur « Le Mal » de Rimbaud
I. Introduction : Présentation du poème
Le poème « Le Mal » d’Arthur Rimbaud, écrit en 1870 alors qu’il n’a que 16 ans, dénonce violemment les souffrances infligées par la guerre et met en cause non seulement les hommes, mais aussi Dieu lui-même.
Le mal ici est perçu comme universel, omniprésent, frappant indistinctement soldats et innocents.
Dès le titre, « Le Mal », Rimbaud annonce son ambition : traiter du scandale absolu de la souffrance humaine.
II. Une description crue et brutale de la guerre
Dans les premières strophes, Rimbaud décrit l’horreur de la guerre contemporaine.
Il évoque des soldats qui, « cramponnés aux chevaux haletants », avancent dans « l’éblouissement » du combat, mais ces images épiques sont immédiatement retournées : la guerre n’est pas glorieuse, elle est misérable.
Les soldats sont frappés par la maladie, notamment par « la fièvre » qui les abat autant que les balles ennemies.
Le mal n'est donc pas seulement dans la violence des armes, il est aussi dans la lente dégradation du corps, dans l'épuisement et la pourriture.
Citation : « Pendant que les soldats, cramponnés aux chevaux haletants, / Sentent monter la fièvre horrible des bataillons. »
Rimbaud fait un tableau d’une immense souffrance collective, une vision apocalyptique où l'héroïsme n'a plus sa place.
III. Une dénonciation de Dieu
Mais Rimbaud ne s'arrête pas à une critique de la guerre humaine.
Il va plus loin : il accuse Dieu lui-même.
Dans une strophe choc, il évoque « le Dieu cruel » :
Citation : « Et, tandis qu’un délire atroce les accable, / Ils vont, sous le soleil, le Dieu qui les accable. »
Dieu n'est pas ici le sauveur, mais l'oppresseur.
Le soleil, qui devrait être un symbole de vie, devient le « Dieu » qui écrase les hommes sous sa chaleur mortelle.
Le mal est donc cosmique, il vient d’en haut, du ciel lui-même.
Rimbaud renverse complètement l’image traditionnelle d'un Dieu bienveillant.
C’est une vision profondément révoltée, très moderne, voire blasphématoire.
IV. Une violence universelle et absurde
Le poème insiste sur le fait que la souffrance n’a pas de sens, qu’elle est pure absurdité.
Le mal frappe sans logique, sans finalité.
La guerre devient une machine infernale, automatique, qui dévore les hommes sans distinction.
Citation : « Ils ont, dans l’horreur des nuits sans lendemain, / Des sommeils lourds comme des fosses. »
Le sommeil des soldats ressemble à la mort : la guerre est un monde où la frontière entre la vie et la mort s'efface.
Tout est englouti dans un cauchemar collectif.
V. Une révolte de la poésie contre le mal
Par son écriture même, Rimbaud oppose à la brutalité du monde une forme d'insurrection artistique.
Même s’il décrit le mal dans toute sa violence, il le fait avec une langue magnifique :
- Des images fortes,
- Des rythmes haletants,
- Un art du contraste.
Son poème est donc un acte de résistance : face à l’absurdité du mal, Rimbaud oppose la puissance créatrice de la poésie.
Citation : « Le Mal » devient lui-même une forme de protestation lyrique, une tentative pour arracher un peu de beauté au cœur de l’horreur.
VI. Conclusion : Un poème de révolte et de lucidité
« Le Mal » est donc un poème profondément pessimiste, révolté, mais aussi lucide.
Rimbaud y dénonce :
- La violence absurde de la guerre,
- L’impuissance des hommes,
- Et jusqu’à la complicité d’un Dieu cruel.
En montrant que le mal est partout, il affirme que le monde est irrémédiablement injuste.
Mais en même temps, par l’intensité de sa poésie, Rimbaud refuse de se soumettre :
il témoigne, il s’indigne, il crie — et il fait de ce cri une œuvre d’art.
Ainsi, « Le Mal » n’est pas seulement un constat de souffrance : c’est aussi un acte de révolte, un appel à la lucidité, et un défi lancé au monde.