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Chapitre 1 : Domaine public et domaine privé

Section 1 : La notion de domaine public

§1 – Définition du domaine public

Avant 2006 : pas de définition législative, seulement critères jurisprudentiels :

  1. Appartenance à une personne publique.
  2. Affectation à l’utilité publique (+ parfois aménagement spécial).

Aujourd’hui (CGPPP, art. L.2111-1) :

Domaine public = biens appartenant à une personne publique :

  • soit affectés à l’usage direct du public,
  • soit affectés à un service public, avec un aménagement indispensable.


1) Condition : appartenance à une personne publique

  • Art. L.1 CGPPP : État, collectivités, groupements, établissements publics.
  • Jurisprudence : biens privés ≠ domaine public, même affectés (CE, Commune de Mouveaux).
  • Interdiction de copropriété publique/privée (Cass. 1994, Préservatrice foncière ; CE 2024, Résidence Saint-Georges).
  • Bail emphytéotique → pas de DP car pas de pleine propriété.
  • Biens concédés :
  • Biens propres = privé.
  • Biens de reprise = potentiellement transférés.
  • Biens de retour = appartiennent toujours à la personne publique (CE, Ass., Commune de Douai).
  • Chaque personne publique peut avoir son DP (national, régional, communal).
  • Établissements publics :
  • Longtemps refusé, mais admis progressivement (Cass. Montagne, 1963 ; CE, 1965, Compagnie des eaux de Lyon ; CE, 1981, EPP ; CE, Manquy pour les EPIC).


2) Condition : affectation à l’utilité publique

Deux hypothèses (art. L.2111-1 CGPPP) :

  • Usage direct du public :
  • CE, 1935, Marécar (cimetière).
  • Pas besoin de gratuité.
  • Jurisprudence exigeait avant un aménagement spécial (ex : CE, 1960, Berthier → promenade publique ; CE, 1979, Gourdin → bois de Boulogne ; CE, 1975, Gozzoli → plages).
  • Aujourd’hui : plus besoin d’aménagement (CGPPP).
  • Service public :
  • Reconnaissance par CE, 1956, Société Le Béton (port industriel).
  • Confirmée par CE, 1959, Dauphin (promenade culturelle), CE, 1965, Lyonnaise des transports (garage gare de Lyon).
  • Condition supplémentaire : aménagement indispensable (voir infra).


3) Critère de l’aménagement indispensable (uniquement pour biens affectés à un SP)

  • Ancien critère : aménagement spécial (utile, opportun). → Trop large.
  • Nouveau critère depuis 2006 : aménagement indispensable (strictement nécessaire).
  • CE, 2014, Commune de Val d’Isère (piste de ski aménagée).
  • Application dans le temps :
  • CE, 2009, Brasserie du Théâtre → anciens critères pour litiges antérieurs à 2006.
  • CE, 2012, Port-Vendres → nouveaux critères seulement après 2006.
  • Aujourd’hui : coexistence des deux critères (avant/après 2006).


4) Théories jurisprudentielles complémentaires


A. Domanialité publique virtuelle

  • Bien peut relever du DP par anticipation s’il est destiné de façon certaine à l’utilité publique.
  • CE, 1985, Eurolat ; CE, 1995, Préfet de la Meuse.
  • CGPPP 2006 voulait y mettre fin → incertitude.
  • CE, 2013, Assoc. Atlalr : biens entrés avant 2006 y restent.
  • CE, 2016, Commune de Baillargues : maintenue mais restreinte → il faut que l’aménagement indispensable soit en cours de réalisation, de manière certaine et irréversible.


B. Théorie de l’accessoire

  • Biens secondaires peuvent relever du DP s’ils sont liés à un bien principal.
  • Deux cas :
  • Complément physique indissociable (ex. canalisations sous voie publique : CE, 1970, Société des eaux de Manille).
  • Lien fonctionnel (ex. locaux commerciaux dans une gare : CE, 1964, Société Montparnasse).
  • CGPPP, art. L.2111-2 → conditions désormais cumulatives (physique + fonctionnel).


C. Domanialité publique globale

  • Intégration dans le DP de l’ensemble d’un ouvrage/emprise, même si certains éléments ne remplissent pas les critères.
  • CE, 1958, Hild (terrains aérodrome).
  • Avis CE, 2012, château de Chambord.
  • CE, 2014, Régie municipale espace Cauterets.
  • Limite : la loi peut l’exclure (loi 3 juin 2011 sur locaux de gare).


A retenir :

Art. L.2111-1 CGPPP = définition centrale.

Conditions cumulatives : appartenance + affectation.

Distinction usage direct du public / service public.

Depuis 2006 → critère restrictif de l’aménagement indispensable.

Théories spéciales (virtuelle, accessoire, globale) = compléments jurisprudentiels.

§2 La composition du domaine public

1) Principe général

  • Art. L. 2111-1 CGPPP = définition supplétive → s’applique uniquement à défaut de disposition spéciale.
  • Le législateur peut :
  • Exclure des biens (ex. immeubles à usage de bureaux → domaine privé sauf indivisibilité).
  • Inclure des biens (domaine public maritime, fluvial…) sans vérifier affectation.
  • Modes de classement possibles :
  • Nature du bien (mobilier / immobilier).
  • Personne publique propriétaire (État, CT, EP).
  • Utilisation (usage direct du public / SP).
  • Géographique (maritime, fluvial, routier…).
  • Naturel / artificiel (doctrine).
  • CGPPP retient surtout : mobilier vs immobilier.


A) Domaine public immobilier (le plus important)


1. Domaine public maritime

  • Naturel :
  • Rivages de la mer (limite : plus hautes mers hors conditions exceptionnelles).
  • Sol & sous-sol mer territoriale (12 milles marins).
  • Lais & relais de la mer.
  • Étangs salés (si communication directe & permanente avec mer).
  • Zone des 50 pas géométriques (loi 1956, DOM).
  • Terrains acquis par l’État pour besoins maritimes/balnéaires/touristiques.
  • Artificiel (art. L.2111-6) :
  • Installations publiques assurant navigation maritime.
  • Biens dans la limite administrative des ports.


2. Domaine public fluvial

  • Naturel (art. L.2111-7) : cours d’eau & lacs.
  • Artificiel : canaux, plans d’eau, ouvrages, ports intérieurs.
  • Cas particuliers : canal du Midi, réservoir de Saint-Ferréol → intégrés par la loi.


3. Domaine public routier

  • Art. L.2111-14 : biens affectés à la circulation terrestre (autoroutes, routes, voies communales).
  • DP s’étend au sous-sol & dépendances (trottoirs, égouts, colonnes d’affichage → théorie de l’accessoire).
  • ❌ Exception : voies ferrées.


4. Domaine public ferroviaire

  • Art. L.2111-15 : biens affectés au transport public guidé en site propre.
  • Inclut : voies ferrées, ouvrages (ponts, tunnels…), emplacements en gare.
  • Propriétaire : SNCF Réseau (EPIC), depuis 2014 géré par 3 EP.


5. Domaine public aéronautique

  • Art. L.2111-16 : biens affectés à la circulation aérienne publique.
  • Inclut : aéroports ouverts, aéroports restreints (écoles de pilotage).
  • Exclusion : aéroports strictement privés.
  • Éléments concernés : pistes, aérogares, équipements aviation civile.


6. Domaine public hertzien

  • Reconnaissance progressive :
  • Loi 1982 → autorisation d’État pour fréquences.
  • Loi 1989 → usage = occupation privative du DP.
  • 1996 → Agence nationale des fréquences.
  • Art. L.2111-17 : fréquences radioélectriques disponibles = domaine public de l’État.


B) Domaine public mobilier


1. Débats doctrinaux

  • XIXe : majorité → pas de DP mobilier.
  • XXe :
  • Waline : biens irremplaçables, nécessaires au SP.
  • Hauriou : biens avec utilité publique évidente.


2. Jurisprudence

  • Cass., 1963, Montagne → tableau du Louvre = DP (service public culturel).
  • CE réticent (rapport 1986), puis ouverture (CE, 1996, Syndicat général des affaires culturelles CFDT).


3. Confirmation législative

  • Loi 2002 → biens des musées publics = DP.
  • CGPPP, art. L.2112-1 :
  • Domaine public mobilier = biens présentant un intérêt public historique, artistique, archéologique, scientifique ou technique.


4. Exemples

  • Archives publiques.
  • Collections des musées.
  • Documents anciens/rares des bibliothèques.
  • Collections du mobilier national.
  • Collections de la manufacture de Sèvres.


5. Particularité

  • Rupture avec logique d’affectation → ce qui compte = nature rare/irremplaçable du bien.
  • Protection découle de la valeur intrinsèque et non de l’usage.


A retenir :

CGPPP distingue mobilier vs immobilier.

Immobilier → sous-catégories (maritime, fluvial, routier, ferroviaire, aéronautique, hertzien).

Mobilier → biens rares et précieux (art. L.2112-1).

Législateur = rôle déterminant (peut élargir ou restreindre)

§3 L’incorporation dans le domaine public

Principe général

  • Lorsqu’une personne publique acquiert un bien → il entre d’abord dans le domaine privé.
  • Il n’intègre le domaine public qu’après incorporation → application du régime de domanialité publique.


A) Modalités d’incorporation

1. Incorporation automatique par phénomène naturel

  • Hypothèse : domaine public maritime (rivages de la mer).
  • Lorsqu’un terrain privé est recouvert par la mer :
  • perte automatique de la propriété privée,
  • transfert immédiat à l’État,
  • intégration directe au domaine public maritime.
  • Aucune affectation nécessaire (érosion, submersion, etc.).
  • Formalité : acte de délimitation → caractère recognitif (ne crée pas, constate).
  • Limites :
  • droits fondés en titre (avant édit de Moulin, 1566),
  • biens nationaux vendus,
  • concession d’endigage (tant que le terrain n’est pas submergé).
  • Extension aux lais & relais de la mer.
  • Validation constitutionnelle : Cons. const., 24 mai 2013
  • critère objectif indépendant de la volonté publique,
  • législateur peut estimer que zones recouvertes par la mer ne peuvent être privées.
  • Ne concerne que le domaine maritime → pas le domaine fluvial.


2. Incorporation par acte juridique + affectation effective

  • En principe, il faut une affectation réelle pour intégrer le domaine public.


a) L’acte de classement (vision doctrinale)

  • Acte administratif unilatéral (autorité compétente = propriétaire public).
  • Ex. : classement préfectoral d’un cimetière.
  • Pour la doctrine : suffisait à faire entrer le bien dans le domaine public.


b) Position du juge : primauté de l’affectation effective

  • L’acte de classement n’est ni nécessaire ni suffisant.
  • CE, Delort, 1958 : voies utilisées par le public = domaine public, sans classement.
  • Vérification par le juge : volonté réelle d’affectation (pas simple tolérance).
  • CE, Commune de Neuves-Maisons, 2011 : le juge contrôle les critères, sinon applique théorie de l’accessoire.


c) Classement sans effet automatique

  • CE, Sempé, 1951 : classement illégal si pas d’usage public effectif.
  • CE, SNCF, 1956 : classement + affectation SP, mais pas d’aménagement spécial → pas de DP.
  • Seuls les critères réels de domanialité comptent.


d) Rôle recognitif du classement

  • CGPPP, art. L. 2111-3 :
  • tout acte de classement/incorporation constate l’appartenance,
  • pas de valeur créatrice, seulement recognitive.


A retenir :

Deux modalités d’incorporation :

  1. Phénomène naturel (automatique) → uniquement pour le domaine maritime.
  2. Acte juridique + affectation effective → principe général.

Le juge privilégie l’affectation réelle à l’utilité publique.

L’acte de classement = simple constat recognitif, pas créateur

Section 2 : La notion de domaine privé

Définition et régime

  • Relève du droit privé → compétence du juge judiciaire.
  • Mais présence de règles dérogatoires (ex. : insaisissabilité des biens du domaine privé).
  • Régime non homogène → particularismes (ex. : forêts domaniales → code forestier).
  • Fonction initiale : patrimoniale et financière.
  • Aujourd’hui : peut aussi avoir une finalité d’intérêt général (ex. : préservation des forêts).
  • Des travaux publics peuvent être réalisés sur des biens du domaine privé.


§1 : Une catégorie résiduelle

1. Principe

  • Tout bien acquis par une personne publique entre d’abord dans son domaine privé.
  • Lorsqu’un bien sort du domaine public → il bascule automatiquement dans le domaine privé.
  • Définition négative : tout ce qui n’est pas dans le domaine public → appartient au domaine privé.


2. Texte clé

  • Art. L. 2211-1 CGPPP :
Font partie du domaine privé les biens des personnes publiques qui ne relèvent pas du domaine public (titre Ier, livre Ier) et qui ne remplissent pas les critères de la domanialité publique.


3. Contenu

  • Biens affectés au SP mais sans aménagement indispensable.
  • Biens affectés à l’usage du public (ex. : biens communaux : bois, pâturages).
  • Biens sans aucune affectation d’intérêt général :
  • immeubles loués à des particuliers,
  • portions délaissées de voirie routière,
  • biens mobiliers : matériel de l’armée,
  • biens incorporels : brevets, actions, obligations.
  • Espèces monétaires → domaine spécifique, ni public ni privé.


§2 : Les biens appartenant au domaine privé par détermination de la loi

1. Biens visés par l’art. L. 2211-1 CGPPP

  • Réserves foncières : intérêt stratégique, peuvent être affectées ultérieurement à un SP.
  • Immeubles à usage de bureaux (sauf indivisibles avec un bien du DP).


2. Biens visés par l’art. L. 2212-1 CGPPP

  • Chemins ruraux : historiquement toujours dans le domaine privé.
  • Forêts : législateur a voulu les exclure du DP pour répondre à des préoccupations de gestion (régime spécifique du code forestier).


A retenir :

Le domaine privé = catégorie par défaut.

Règle de compétence : juge judiciaire.

Régime hybride : droit privé + règles dérogatoires.

Distinction :

  • domaine privé immobilier : biens avec ou sans affectation d’IG,
  • domaine privé mobilier : matériel, biens incorporels.

Détermination parfois directe par la loi (réserves foncières, bureaux, chemins ruraux, forêts).


Chapitre 1 : Domaine public et domaine privé

Section 1 : La notion de domaine public

§1 – Définition du domaine public

Avant 2006 : pas de définition législative, seulement critères jurisprudentiels :

  1. Appartenance à une personne publique.
  2. Affectation à l’utilité publique (+ parfois aménagement spécial).

Aujourd’hui (CGPPP, art. L.2111-1) :

Domaine public = biens appartenant à une personne publique :

  • soit affectés à l’usage direct du public,
  • soit affectés à un service public, avec un aménagement indispensable.


1) Condition : appartenance à une personne publique

  • Art. L.1 CGPPP : État, collectivités, groupements, établissements publics.
  • Jurisprudence : biens privés ≠ domaine public, même affectés (CE, Commune de Mouveaux).
  • Interdiction de copropriété publique/privée (Cass. 1994, Préservatrice foncière ; CE 2024, Résidence Saint-Georges).
  • Bail emphytéotique → pas de DP car pas de pleine propriété.
  • Biens concédés :
  • Biens propres = privé.
  • Biens de reprise = potentiellement transférés.
  • Biens de retour = appartiennent toujours à la personne publique (CE, Ass., Commune de Douai).
  • Chaque personne publique peut avoir son DP (national, régional, communal).
  • Établissements publics :
  • Longtemps refusé, mais admis progressivement (Cass. Montagne, 1963 ; CE, 1965, Compagnie des eaux de Lyon ; CE, 1981, EPP ; CE, Manquy pour les EPIC).


2) Condition : affectation à l’utilité publique

Deux hypothèses (art. L.2111-1 CGPPP) :

  • Usage direct du public :
  • CE, 1935, Marécar (cimetière).
  • Pas besoin de gratuité.
  • Jurisprudence exigeait avant un aménagement spécial (ex : CE, 1960, Berthier → promenade publique ; CE, 1979, Gourdin → bois de Boulogne ; CE, 1975, Gozzoli → plages).
  • Aujourd’hui : plus besoin d’aménagement (CGPPP).
  • Service public :
  • Reconnaissance par CE, 1956, Société Le Béton (port industriel).
  • Confirmée par CE, 1959, Dauphin (promenade culturelle), CE, 1965, Lyonnaise des transports (garage gare de Lyon).
  • Condition supplémentaire : aménagement indispensable (voir infra).


3) Critère de l’aménagement indispensable (uniquement pour biens affectés à un SP)

  • Ancien critère : aménagement spécial (utile, opportun). → Trop large.
  • Nouveau critère depuis 2006 : aménagement indispensable (strictement nécessaire).
  • CE, 2014, Commune de Val d’Isère (piste de ski aménagée).
  • Application dans le temps :
  • CE, 2009, Brasserie du Théâtre → anciens critères pour litiges antérieurs à 2006.
  • CE, 2012, Port-Vendres → nouveaux critères seulement après 2006.
  • Aujourd’hui : coexistence des deux critères (avant/après 2006).


4) Théories jurisprudentielles complémentaires


A. Domanialité publique virtuelle

  • Bien peut relever du DP par anticipation s’il est destiné de façon certaine à l’utilité publique.
  • CE, 1985, Eurolat ; CE, 1995, Préfet de la Meuse.
  • CGPPP 2006 voulait y mettre fin → incertitude.
  • CE, 2013, Assoc. Atlalr : biens entrés avant 2006 y restent.
  • CE, 2016, Commune de Baillargues : maintenue mais restreinte → il faut que l’aménagement indispensable soit en cours de réalisation, de manière certaine et irréversible.


B. Théorie de l’accessoire

  • Biens secondaires peuvent relever du DP s’ils sont liés à un bien principal.
  • Deux cas :
  • Complément physique indissociable (ex. canalisations sous voie publique : CE, 1970, Société des eaux de Manille).
  • Lien fonctionnel (ex. locaux commerciaux dans une gare : CE, 1964, Société Montparnasse).
  • CGPPP, art. L.2111-2 → conditions désormais cumulatives (physique + fonctionnel).


C. Domanialité publique globale

  • Intégration dans le DP de l’ensemble d’un ouvrage/emprise, même si certains éléments ne remplissent pas les critères.
  • CE, 1958, Hild (terrains aérodrome).
  • Avis CE, 2012, château de Chambord.
  • CE, 2014, Régie municipale espace Cauterets.
  • Limite : la loi peut l’exclure (loi 3 juin 2011 sur locaux de gare).


A retenir :

Art. L.2111-1 CGPPP = définition centrale.

Conditions cumulatives : appartenance + affectation.

Distinction usage direct du public / service public.

Depuis 2006 → critère restrictif de l’aménagement indispensable.

Théories spéciales (virtuelle, accessoire, globale) = compléments jurisprudentiels.

§2 La composition du domaine public

1) Principe général

  • Art. L. 2111-1 CGPPP = définition supplétive → s’applique uniquement à défaut de disposition spéciale.
  • Le législateur peut :
  • Exclure des biens (ex. immeubles à usage de bureaux → domaine privé sauf indivisibilité).
  • Inclure des biens (domaine public maritime, fluvial…) sans vérifier affectation.
  • Modes de classement possibles :
  • Nature du bien (mobilier / immobilier).
  • Personne publique propriétaire (État, CT, EP).
  • Utilisation (usage direct du public / SP).
  • Géographique (maritime, fluvial, routier…).
  • Naturel / artificiel (doctrine).
  • CGPPP retient surtout : mobilier vs immobilier.


A) Domaine public immobilier (le plus important)


1. Domaine public maritime

  • Naturel :
  • Rivages de la mer (limite : plus hautes mers hors conditions exceptionnelles).
  • Sol & sous-sol mer territoriale (12 milles marins).
  • Lais & relais de la mer.
  • Étangs salés (si communication directe & permanente avec mer).
  • Zone des 50 pas géométriques (loi 1956, DOM).
  • Terrains acquis par l’État pour besoins maritimes/balnéaires/touristiques.
  • Artificiel (art. L.2111-6) :
  • Installations publiques assurant navigation maritime.
  • Biens dans la limite administrative des ports.


2. Domaine public fluvial

  • Naturel (art. L.2111-7) : cours d’eau & lacs.
  • Artificiel : canaux, plans d’eau, ouvrages, ports intérieurs.
  • Cas particuliers : canal du Midi, réservoir de Saint-Ferréol → intégrés par la loi.


3. Domaine public routier

  • Art. L.2111-14 : biens affectés à la circulation terrestre (autoroutes, routes, voies communales).
  • DP s’étend au sous-sol & dépendances (trottoirs, égouts, colonnes d’affichage → théorie de l’accessoire).
  • ❌ Exception : voies ferrées.


4. Domaine public ferroviaire

  • Art. L.2111-15 : biens affectés au transport public guidé en site propre.
  • Inclut : voies ferrées, ouvrages (ponts, tunnels…), emplacements en gare.
  • Propriétaire : SNCF Réseau (EPIC), depuis 2014 géré par 3 EP.


5. Domaine public aéronautique

  • Art. L.2111-16 : biens affectés à la circulation aérienne publique.
  • Inclut : aéroports ouverts, aéroports restreints (écoles de pilotage).
  • Exclusion : aéroports strictement privés.
  • Éléments concernés : pistes, aérogares, équipements aviation civile.


6. Domaine public hertzien

  • Reconnaissance progressive :
  • Loi 1982 → autorisation d’État pour fréquences.
  • Loi 1989 → usage = occupation privative du DP.
  • 1996 → Agence nationale des fréquences.
  • Art. L.2111-17 : fréquences radioélectriques disponibles = domaine public de l’État.


B) Domaine public mobilier


1. Débats doctrinaux

  • XIXe : majorité → pas de DP mobilier.
  • XXe :
  • Waline : biens irremplaçables, nécessaires au SP.
  • Hauriou : biens avec utilité publique évidente.


2. Jurisprudence

  • Cass., 1963, Montagne → tableau du Louvre = DP (service public culturel).
  • CE réticent (rapport 1986), puis ouverture (CE, 1996, Syndicat général des affaires culturelles CFDT).


3. Confirmation législative

  • Loi 2002 → biens des musées publics = DP.
  • CGPPP, art. L.2112-1 :
  • Domaine public mobilier = biens présentant un intérêt public historique, artistique, archéologique, scientifique ou technique.


4. Exemples

  • Archives publiques.
  • Collections des musées.
  • Documents anciens/rares des bibliothèques.
  • Collections du mobilier national.
  • Collections de la manufacture de Sèvres.


5. Particularité

  • Rupture avec logique d’affectation → ce qui compte = nature rare/irremplaçable du bien.
  • Protection découle de la valeur intrinsèque et non de l’usage.


A retenir :

CGPPP distingue mobilier vs immobilier.

Immobilier → sous-catégories (maritime, fluvial, routier, ferroviaire, aéronautique, hertzien).

Mobilier → biens rares et précieux (art. L.2112-1).

Législateur = rôle déterminant (peut élargir ou restreindre)

§3 L’incorporation dans le domaine public

Principe général

  • Lorsqu’une personne publique acquiert un bien → il entre d’abord dans le domaine privé.
  • Il n’intègre le domaine public qu’après incorporation → application du régime de domanialité publique.


A) Modalités d’incorporation

1. Incorporation automatique par phénomène naturel

  • Hypothèse : domaine public maritime (rivages de la mer).
  • Lorsqu’un terrain privé est recouvert par la mer :
  • perte automatique de la propriété privée,
  • transfert immédiat à l’État,
  • intégration directe au domaine public maritime.
  • Aucune affectation nécessaire (érosion, submersion, etc.).
  • Formalité : acte de délimitation → caractère recognitif (ne crée pas, constate).
  • Limites :
  • droits fondés en titre (avant édit de Moulin, 1566),
  • biens nationaux vendus,
  • concession d’endigage (tant que le terrain n’est pas submergé).
  • Extension aux lais & relais de la mer.
  • Validation constitutionnelle : Cons. const., 24 mai 2013
  • critère objectif indépendant de la volonté publique,
  • législateur peut estimer que zones recouvertes par la mer ne peuvent être privées.
  • Ne concerne que le domaine maritime → pas le domaine fluvial.


2. Incorporation par acte juridique + affectation effective

  • En principe, il faut une affectation réelle pour intégrer le domaine public.


a) L’acte de classement (vision doctrinale)

  • Acte administratif unilatéral (autorité compétente = propriétaire public).
  • Ex. : classement préfectoral d’un cimetière.
  • Pour la doctrine : suffisait à faire entrer le bien dans le domaine public.


b) Position du juge : primauté de l’affectation effective

  • L’acte de classement n’est ni nécessaire ni suffisant.
  • CE, Delort, 1958 : voies utilisées par le public = domaine public, sans classement.
  • Vérification par le juge : volonté réelle d’affectation (pas simple tolérance).
  • CE, Commune de Neuves-Maisons, 2011 : le juge contrôle les critères, sinon applique théorie de l’accessoire.


c) Classement sans effet automatique

  • CE, Sempé, 1951 : classement illégal si pas d’usage public effectif.
  • CE, SNCF, 1956 : classement + affectation SP, mais pas d’aménagement spécial → pas de DP.
  • Seuls les critères réels de domanialité comptent.


d) Rôle recognitif du classement

  • CGPPP, art. L. 2111-3 :
  • tout acte de classement/incorporation constate l’appartenance,
  • pas de valeur créatrice, seulement recognitive.


A retenir :

Deux modalités d’incorporation :

  1. Phénomène naturel (automatique) → uniquement pour le domaine maritime.
  2. Acte juridique + affectation effective → principe général.

Le juge privilégie l’affectation réelle à l’utilité publique.

L’acte de classement = simple constat recognitif, pas créateur

Section 2 : La notion de domaine privé

Définition et régime

  • Relève du droit privé → compétence du juge judiciaire.
  • Mais présence de règles dérogatoires (ex. : insaisissabilité des biens du domaine privé).
  • Régime non homogène → particularismes (ex. : forêts domaniales → code forestier).
  • Fonction initiale : patrimoniale et financière.
  • Aujourd’hui : peut aussi avoir une finalité d’intérêt général (ex. : préservation des forêts).
  • Des travaux publics peuvent être réalisés sur des biens du domaine privé.


§1 : Une catégorie résiduelle

1. Principe

  • Tout bien acquis par une personne publique entre d’abord dans son domaine privé.
  • Lorsqu’un bien sort du domaine public → il bascule automatiquement dans le domaine privé.
  • Définition négative : tout ce qui n’est pas dans le domaine public → appartient au domaine privé.


2. Texte clé

  • Art. L. 2211-1 CGPPP :
Font partie du domaine privé les biens des personnes publiques qui ne relèvent pas du domaine public (titre Ier, livre Ier) et qui ne remplissent pas les critères de la domanialité publique.


3. Contenu

  • Biens affectés au SP mais sans aménagement indispensable.
  • Biens affectés à l’usage du public (ex. : biens communaux : bois, pâturages).
  • Biens sans aucune affectation d’intérêt général :
  • immeubles loués à des particuliers,
  • portions délaissées de voirie routière,
  • biens mobiliers : matériel de l’armée,
  • biens incorporels : brevets, actions, obligations.
  • Espèces monétaires → domaine spécifique, ni public ni privé.


§2 : Les biens appartenant au domaine privé par détermination de la loi

1. Biens visés par l’art. L. 2211-1 CGPPP

  • Réserves foncières : intérêt stratégique, peuvent être affectées ultérieurement à un SP.
  • Immeubles à usage de bureaux (sauf indivisibles avec un bien du DP).


2. Biens visés par l’art. L. 2212-1 CGPPP

  • Chemins ruraux : historiquement toujours dans le domaine privé.
  • Forêts : législateur a voulu les exclure du DP pour répondre à des préoccupations de gestion (régime spécifique du code forestier).


A retenir :

Le domaine privé = catégorie par défaut.

Règle de compétence : juge judiciaire.

Régime hybride : droit privé + règles dérogatoires.

Distinction :

  • domaine privé immobilier : biens avec ou sans affectation d’IG,
  • domaine privé mobilier : matériel, biens incorporels.

Détermination parfois directe par la loi (réserves foncières, bureaux, chemins ruraux, forêts).

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