INTRODUCTION:
- Est-ce que l'art est un message caché ? Si oui, est-il vraiment caché ?
- La présence constante de l'art ainsi que sa diversité remarquée dès l'apparition de l'humanité et présente dans toutes les cultures, semble indiquer une nécessité universelle de l'art pour les hommes. On peut prendre l'exemple des grottes de Lascaux datant du néo-paléolithique (18 000 ans), ou bien Zhou Fang, peintre chinois du VIIIe siècle. On peut également citer "Le Sacre de Napoléon" en 1807 et "L'homme qui marche" de Giacometti réalisé en 1960.
En effet, l'art semble nécessaire, mais cette nécessité de l'art tient-elle à sa fonction ? Car faire l’expérience d'aller dans un musée est parfois pour l'homme en quête de quelque chose une expérience décevante. L'art semble muet, il ne semble pas nous apporter quelque chose d'immédiat qui répondrait à nos besoins. L'homme peut donc survivre sans art mais cette étrange nécessité que celle dont on pourrait se passer ouvre un paradoxe entre la nécessité, c'est-à-dire il faut de l'art, ainsi que l'utilité, soit le fait qu'on ait besoin de l'art.
L'art peut désigner à la fois l'ouvrage de l'artisan (Arts et métiers) et l’œuvre de l'artiste (Beaux Arts) donc bien faire la distinction entre les deux. Il faut advenir à l'existence qui n'a pas en lui-même le sens de l'existence, contrairement aux êtres naturels. Ce sont des œuvres artificielles créées par l'homme qui nécessitent un certain savoir-faire/une certaine technique.
L'art est quelque chose de sensible. Une œuvre d'art peut être considérée comme du grand art à partir du moment où dès lors qu'elle est sortie de son contexte politique ou bien de sa situation initiale, elle continue à avoir du sens. De plus, la portée artistique d'une œuvre ne se réduit pas à son origine. L'artiste se soucie également de la beauté de ce qu'il produit, ainsi la tension vient ici se poser sur l'utilité de l'œuvre d'art (au sens de l'artiste car l'œuvre de l'artisan est utile, il s'agit même de son essence).
À première vue, l'art sert à quelque chose dans le sens où sa fin est toujours semblable quel que soit l'art en question, il possède sa propre finalité commune à chaque œuvre. Cette finalité peut être interne c'est-à-dire propre à l'art lui-même et que seul l'art est capable de remplir. Ou alors, il existe aussi une fin externe c'est-à-dire que cette fin varie en fonction des usages qu'on fait de l'art. En outre, peut-on identifier une fin que tout art cherche à satisfaire ou les fins de l'art sont-elles aussi diverses qu'il y a d'artistes et de spectateurs. Auquel cas on pourrait imaginer que ce à quoi sert l'art du point de vue de l'artiste est différent de ce à quoi il sert du point de vue du spectateur. Cependant, l'art peut aussi ne servir à rien. C'est précisément cette inutilité qui permet la différence avec l'objet technique, mais cette inutilité est-elle synonyme de vanité c'est-à-dire si l'art ne sert à rien à quoi bon faire de l'art ?
N'est-ce pas un divertissement pour toutes les cultures et à travers les époques. Alors, oui l'art ne sert à rien mais il semble posséder une importance fondamentale. Elle rejoint ainsi la distinction entre nécessité et utilité et peut être à la fois inutile mais pas vain.
Soit l'art au sens de Poeisis c'est-à-dire le mode de production artificielle (créé par l'homme) en vue d'une certaine fin. Alors, l'art sert à quelque chose et donc il devrait remplir un besoin. Mais nous n'avons pas besoin de l'art. Soit on prend l'art comme la recherche de la beauté, ce qui justement le distingue de l'objet technique qui lui remplit une fonction d'utilité, alors l'art ne sert donc à rien. Mais il est nécessaire car on le voit de partout, dans chaque culture et à travers chaque époque, il est commun. On se demande donc si l'art sert à quelque chose ?
Tout d'abord nous verrons que l’œuvre d'art est précisément ce qui répond à un moyen au service d'une fin en opposition à l'objet technique. Mais peut-être que c'est cette posture d'inutilité qui sauve l'art de sa destruction peut être également un objet de construction qui en même temps permet paradoxalement à l'art d'être un moyen puissant au service de fins qui lui sont étrangères. Toutefois si l'art demeure par-delà les époques et les cultures, c'est précisément qu'il est utile.
A-) L'œuvre d'art se distingue de l'objet technique par le fait qu'elle ne sert à rien.
Tout d'abord il faut faire une distinction entre l'outil et l'œuvre d'art.
En effet,si l'on prend l'exemple de la flûte, elle obéit à un but c'est-à-dire qu'elle est faite en vue d'une fin, ici jouer un morceau. L'outil qu'est la flûte est reproductible à l'infini tandis que si cette flûte devient une œuvre d'art elle sera unique et ne pourra être qu'imitée.
La flûte est un instrument de musique au service des musiciens, il faut donc qu'elle accomplisse un son correcte. Ainsi la valeur de la flûte est relative à sa fonction c'est-à-dire que si elle produit un bon son alors est sera correct et donc utile.
il faut donc faire une distinction entre la valeur intrinsèque qui trouve sa valeur en lui-même et la valeur instrumentale qui trouve sa valeur en tant qu'il est un moyen en vue d'autre chose. Rien est utile ou inutile dans l'absolue.
On peut donc dire que l'objet technique est par définition un objet instrumental.
Mais on peut faire l'objection que travailler une flûte au point où celle-ci ne sert plus à jouer mais seulement à être admirée ou bien de plaire. La flûte perd sa valeur instrumentale et prend donc une valeur intrinsèque.
Bien que l'objet technique est définit par son utilité, l'œuvre d'art défend le beau, mais ce critère de beauté diffèrent entre les époques.
On peut ainsi se demander si le seul fait d'arracher l'objet à sa fonction d'utilité première et le placé dans un musée suffit à faire de lui une œuvre d'art? Si c'est le cas, alors véritablement on pourra dire que ce qui définit la flûte comme une œuvre d'art c'est donc d'être considérée en elle-même indépendamment de toute considération de son utilité car lorsque la flûte est placée dans un musée elle perd sa valeur utilitaire.
On a montré que l'art se distingue de la technique par sa valeur intrinsèque, ce qui fait de la technique une valeur instrumentale. Mais toutes les œuvres d'art ne sont pas des objets dont on a arraché leur fonction utilitaire. La plupart des œuvres d'art visent le beau. Mais si on définit l'œuvre d'art comme ce qui vise le beau et non l'utile, le fait de viser le beau n'est pas en soit une objection solide à l'idée que l'art sert à rien. L'enjeu est désormais de savoir si le beau sert à quelque chose ou non.
B-) Tout ce qui est beau est laid: le beau ne sert à rien.
L'intention première de l'artisan est de faire une bonne flûte, il doit se représenter la finalité de la flûte afin que celle-ci soit juste, précise et joue bien. On fait donc une distinction entre le bon et le beau.
Pour trouver que quelque chose est beau, il doit être sans représentation préalable. Sa beauté doit suffire, elle doit frapper et n'a donc pas besoin de concept préalable. C'est ce qu'explique Kant dans la Critique de la faculté de juger, lorsqu'il dit "Le beau est ce qui plaît universellement sans concept". Ici Kant parle de l'objectivité de jugement sans représentation préalable de ce que doit être l'objet.
Nous n'avons donc aucun intérêt à ce que l'art existe, il ne répond à aucun besoins. Ce n'est pas une satisfaction de nos organes sensibles mais un plaisir prit dans le désintérêt. Mais qu'est-ce qui provoque le plaisir esthétique? Pour Kant, il s'agit d'un accord entre la forme et l'esprit qui se manifeste parce que la perception de l'objet procure du plaisir. Mais affirmer que quelque chose est beau c'est juger, le jugement est un acte bien plus courant que ce qu'on pense.
Selon Kant, il existerait 3 types de jugement; celui de connaissances, celui de valeurs morales et également le jugement esthétique. Mais comment les choses peuvent-elles nous plaire?
L'art est un jeu qui ne vise que la contemplation du beau mais on peut aussi que tout ce qui est utile est laid, alors si l'on considère que l'art est beau il est donc inutile. C'est ce qu'explique Théophile Gautier dans Poésies. Selon lui, l'art ne sert à rien en revanche on ne peut s'en passer. Il est superflu, un luxe mais c'est précisément ce superflu qui en un bonheur, une jouissance, il en devient nécessaire.
Il prend l'exemple de la parure, qui est un objet intermédiaire entre l'art et l'objet décoré et décoratif car il sert à décoré, mettre en valeur le corps humain.
Théophile Gautier explique aussi qu'il faut faire une distinction entre l'art mercantile c'est-à-dire l'art possédant une fin externe à lui, ayant un but commerciale et l'art libérale qui n'a d'autre fin que lui-même. Cependant, il existe une autre distinction à faire entre l'art symbolique qui lui est ouvert et peut recevoir plusieurs sens, traduction en fonction du contexte politique, de l'époque et de l'interprète. Ainsi que l'art messager qui possède un sens unique. il est utilisé par des gens à des fins visées soit orienter les gens, on y retrouve notamment la propagande mais également la publicité.
Ici nous avons montrer que l'art est utilisé à des fins différentes et qu'utilisé l'art c'est détourner l'art lui-même.
C-) Le "philistin de la culture" est celui qui se sert de l'art comme moyen:
Emprunté à la Bible, le philistin est le personnage de l'arriviste dans le sens de l'intéressé. Ici il n'a pas un rapport authentique avec l'art mais un rapport utilitaire.
On voit donc deux finalité à l'art: Tout d'abord celui qui possède ou qui contemple l'art obtient se voit conféré l'aura du prestige sociale. En effet l'art peut être utilisé comme moyen d'ascension sociale. Bourdieu nous explique qu'on se distingue par ses pratiques de l'art. Par exemple au XIXe siècle, les cafés-concert été réservé à classe populaire, les bourgeois quant à eux vont aux théâtre et pour finir les classes les plus riches vont à l'opéra.
"Le goût classe et classe celui qui classe", pour Bourdieu certains goûts sont plus légitime que d'autres, autrement dit on ne va pas dans un musée pour le bonheur mais car il est de bon ton d'aller au musée, celui-ci exprime une certaine légitimité. Il y a des marqueurs sociaux plus dominant que d'autres, par exemple il est plus légitime d'écouter du Vivaldi que du Booba celui-ci considéré comme populaire.
Mais l'art est aussi utiliser comme un bien de consommation avec une finalité spécifique à ce que devient l’œuvre d'art, dans le sens où l'art devient une valeur marchande. Une œuvre, à la base unique devient maintenant réplicable à l'infini que ce soit sur des cartes postale, des tot-bag ou encore des mugs, elle perd donc de sa valeur et de son unicité. On peut prendre l'exemple de
La Laitière de Vermeer, réalisée en 1658, utilisée désormais pour vanter les mérites des crèmes dessert de la marque créée en 1973. En outre, les artistes deviennent eux aussi des marques, des stars, enfaite ce ne sont que leur personne qui intéresse et non pas leur talent. On peut aussi remarquer que les artistes sont utilisé à des fins commerciales, il permettent de promouvoir telle ou telle marque, ce sont des sponsors.
On ne peut pas s'arrêter à ce constat d'inutilité de l'art, car alors comment expliquer qu'une pratique inutile est une telle importance dans l'histoire de l'Humanité, que l'on retrouve à travers toutes les époques, tous les peuples: de Lascaut aux grands artistes contemporains.
Alors comment expliquer que les personnes qui consacrent leur vie à l'art sont des artistes et que beaucoup d'autres consacrent du temps et de l'argent sont des spectateurs? Peut-être qu'au final, l'art n'est pas aussi inutile qu'il y paraît et que l'artiste est celui qui exprime ce que langage ordinaire ne parvient pas à exprimer. Peut-être que le beau n'est pas la seule finalité de l'art et que l'art sert à exprimer ce qu'on arrive pas à exprimer spontanément.